Joseph Irvine Keeper (Ka-Kah-Nuh-Wayn-Tum), C.M., soldat, défenseur, conseiller (né le 17 octobre 1928 à Norway House, au Manitoba; décédé le 9 janvier dans la Nation crie de Norway House). Joseph Keeper a joué un rôle clé dans la création de bon nombre des premiers mouvements visant à organiser les peuples autochtones au Canada en groupes de pression efficaces.
Antécédents
Joseph Keeper est le fils de Joseph Benjamin Keeper et de Christina McLeod. Son père est un coureur de fond célèbre qui participe aux Jeux olympiques d’été de 1912 dans les épreuves de 5 000 m et de 10 000 m, terminant quatrième dans cette dernière épreuve. Le jeune Joseph fréquente un pensionnat indien à Portage la Prairie. Il étudie ensuite au Portage Collegiate Institute, où il obtient son diplôme en 1946.
Joseph Keeper s’enrôle dans l’Artillerie royale canadienne. Il sert en Corée pendant 14 mois après la signature de l’armistice, jusqu’en 1957 (voir aussi Guerre de Corée). Il travaille ensuite dans le Nord du Canada comme arpenteur pour la société Canadian Nickel, une filiale d’Inco.
Le 1er septembre 1959, il épouse Phyllis Beardy, qui devient plus tard pasteure anglicane. Ils ont quatre enfants, dont l’une est actrice, productrice, politicienne et activiste sociale, Tina Keeper. Son épouse décède avant lui le 22 mai 2014.
Activisme
Jeune homme à la fin des années 1950, Joseph Keeper est convaincu que des changements s’annoncent pour son peuple. Il s’engage alors comme travailleur en développement communautaire dans les collectivités autochtones. Grâce à son travail et aux subventions du gouvernement fédéral, Joseph Keeper contribue grandement au développement communautaire, à l’autonomie gouvernementale et à l’amélioration des conditions économiques de son peuple.
Conseil national des Indiens
En 1961, Joseph Keeper cofonde le Conseil national des Indiens (CNI), un groupe de pression national visant à promouvoir « l’unité entre tous les Indiens ». Des problèmes internes entraînent la dissolution du CNI en 1968. Deux autres groupes remplacent alors le CNI : la Fraternité nationale des Indiens (FNI) pour les membres des Premières Nations inscrits ou visés par un traité, et le Conseil des autochtones du Canada (CAC) pour les Métis et les Indiens non inscrits. En 1982, le FNI devient l’Assemblée des Premières Nations, qui continue de représenter les intérêts des Premières Nations au Canada.
Manitoba Métis Federation
En 1967, Joseph Keeper cofonde la Fédération Métisse du Canada, la Manitoba Métis Federation (MMF). La création de la MMF s’inscrit dans la remontée généralisée de l’activisme des Autochtones au Canada des années 1960 et 1970, alors que les collectivités métisses et autochtones tentent de récupérer leurs terres, leurs droits et leur culture. La MMF a pour objectifs initiaux d’obtenir les terres promises par la Loi sur le Manitoba, de promouvoir la culture et l’identité métisses et d’améliorer les conditions socioéconomiques des Métis.
Convention sur l’inondation des terres du nord du Manitoba
Fort de son expertise en matière de traitement des demandes de subventions, Joseph Keeper participe aux négociations qui, après trois ans, mènent à la signature de la Convention sur l’inondation des terres du nord du Manitoba (CITNM) en 1977. Dans les années 1960, Manitoba Hydro et la province du Manitoba réalisent qu’il faut accroître la production d’énergie hydroélectrique. Pour produire cette énergie supplémentaire, Manitoba Hydro lance de vastes projets hydrologiques, connus sous le nom de projets de régularisation du lac Winnipeg et de dérivation de la rivière Churchill.
Les projets permettent de détourner les eaux de la rivière Churchill vers le bassin du fleuve Nelson et de régulariser l’écoulement du lac Winnipeg dans le fleuve Nelson. Par conséquent, environ 20 % des terres de cinq Premières Nations cries du nord du Manitoba, soit quelque 5 000 hectares, sont inondées. Cette inondation touche environ 8000 membres des Premières Nations de Cross Lake (aujourd’hui la Nation crie de Pimicikamak), de Nelson House (aujourd’hui la Nation des Cris de Nisichawayasihk), de la Nation crie de Norway House (le lieu de naissance de Joseph Keeper), de Split Lake (aujourd’hui la Tataskweyak Cree Nation) et de York Landing (aujourd’hui la York Factory First Nation).
Ce projet entraîne également une modification des niveaux d’eau de plusieurs lacs, rivières et ruisseaux situés sur les terres ancestrales des Premières Nations, ce qui entraîne une dégradation supplémentaire de l’environnement. Ces changements affectent la capacité des peuples à chasser, à pêcher et à se déplacer sur le territoire. Ils ont des répercussions négatives importantes sur le mode de vie traditionnel des membres des Premières Nations qui y vivent.
Les cinq Premières Nations mettent sur pied un comité, le Comité des inondations dans le Nord, afin d’aborder ces questions et de négocier avec le gouvernement provincial et Manitoba Hydro. Joseph Keeper est l’un des représentants de ce comité et contribue à la signature de la CITNM en 1977. Cette dernière porte sur divers domaines, dont les répercussions sur l’environnement, les occupations traditionnelles, les droits fonciers, les équipements collectifs, la planification communautaire et la promotion de l’emploi.
Plus précisément, la CITNM prévoit l’attribution de quatre acres pour chaque acre inondé, l’élargissement et la protection des droits d’exploitation des ressources fauniques, un investissement de 5 millions de dollars sur cinq ans pour appuyer des projets de développement économique dans les Premières Nations et la promesse de perspectives d’emploi.
Comme le projet de construction et les négociations avec les Premières Nations concernées se déroulent simultanément, certains sujets importants sont négligés et certaines promesses de la CITNM ne sont pas tenues. Près de deux décennies plus tard, quatre des cinq Premières Nations composant le Comité des inondations dans le Nord (toutes sauf la Nation crie de Pimicikamak) signent individuellement des accords de mise en œuvre pour remédier aux promesses non tenues et aux lacunes de la CITNM initiale.
Prix et distinctions
- Membre de l’Ordre du Canada (1992)
- Médaille du Jubilé d’or de la reine Elizabeth II (2002)
- Médaille du Jubilé de diamant de la reine Elizabeth II Medal (2012)