La démocratie parlementaire est un système de gouvernement constitutionnel. Ce régime politique, inspiré du système de Westminster britannique, a également développé certaines caractéristiques uniques au Canada. Le Canada est une démocratie libérale : un État dans lequel les pouvoirs exécutifs sont restreints et les droits et libertés des personnes sont protégés. Outre la Constitution, principalement la Loi constitutionnelle de 1867, la Loi constitutionnelle de 1982 et la Charte canadienne des droits et libertés, la démocratie parlementaire au Canada repose sur les conventions constitutionnelles, les partis politiques, le système électoral et le droit de vote.

Contexte : le Canada et le système de Westminster
Le système de Westminster désigne le système parlementaire du Royaume-Uni. Il subit d’importantes modifications au fil du temps. Lorsque les politicologues évoquent le système de Westminster, ils font généralement référence au système qui existe également dans de nombreuses anciennes colonies britanniques. (Voir Commonwealth.)
Le système présente plusieurs caractéristiques principales. La plus importante étant peut-être le principe de la suprématie parlementaire. Autrement dit, c’est le Parlement qui est suprême, et non un individu en particulier. Ce principe est étroitement lié à celui du gouvernement responsable. Selon ce principe, le pouvoir exécutif, le premier ministre et le cabinet, est responsable devant le reste de la Chambre des communes. Par conséquent, si le parti au pouvoir perd la confiance de la Chambre, il n’est plus en mesure de fonctionner et de nouvelles élections doivent être organisées.
Une autre caractéristique clé est la nature intégrée du parlement. Au Royaume-Uni, le parlement est composé de la Chambre des communes, de la Chambre des lords et de la Couronne. De même, au Canada, le parlement est composé de la Chambre des communes (la Chambre basse), du Sénat (la Chambre haute) et de la Couronne (représentée par le gouverneur général). Les lois sont promulguées lorsqu’elles sont acceptées par ces trois organes.
Les principes fondamentaux de la suprématie parlementaire, soit le bicamérisme (deux chambres : la chambre basse et la chambre haute), le parlement intégré (des pouvoirs distincts, mais coopérants) et la distinction entre le pouvoir exécutif et le chef de l’État (la Couronne) sont tous des caractéristiques essentielles du système de Westminster. Les circonscriptions géographiques uninominales ainsi que l’importance des partis politiques, la règle de la majorité et les élections ordinaires sont autant d’autres caractéristiques du système de Westminster.
Le système de Westminster repose sur des documents fondateurs (appelés collectivement la Constitution) qui définissent et limitent les pouvoirs du gouvernement. Mais le système s’appuie aussi sur des coutumes non écrites appelées conventions constitutionnelles. Celles-ci sont si profondément ancrées dans le système qu’elles ont effectivement force de loi. Au Royaume-Uni et au Canada, par exemple, les lois (actes législatifs) définissent explicitement la compétence du parlement et des autres paliers de gouvernement. (Voir Répartition des pouvoirs.) Pourtant, aucune loi ne définit la fonction de premier ministre. L’existence du premier ministre est techniquement une question de convention. Les pouvoirs du premier ministre sont limités par le pouvoir du Parlement lui-même, comme c’est le cas pour tout autre député. Néanmoins, la convention veut que le premier ministre soit le chef du parti qui détient le plus de sièges à la Chambre des communes. Elle veut également qu’il soit officiellement nommé par la Couronne.
Compte tenu de ces caractéristiques, le Canada se qualifie en tant que démocratie libérale. Il s’agit d’un État dans lequel les pouvoirs exécutifs sont restreints et les droits et libertés des personnes sont protégés.

Histoire coloniale : vers un gouvernement responsable
La démocratie britannique évolue au fil des siècles, en grande partie en raison des crises fiscales et politiques auxquelles la Couronne doit faire face. Au XIIIe siècle, les rois anglais sont entraînés dans de nombreux conflits militaires coûteux en Europe. Leur demande d’augmentation des recettes fiscales les met en conflit avec les barons féodaux. Après de multiples conflits internes, le Parlement s’impose progressivement comme un forum au sein duquel les barons peuvent négocier la politique intérieure avec la monarchie.
Au XVIIe siècle, la question de l’imposition entraîne de nouveau un violent conflit entre la Couronne et l’aristocratie. Il en résulte une guerre civile dévastatrice, une brève expérience du républicanisme et une restauration précaire de la monarchie. À la fin du siècle, l’Angleterre s’impose comme une monarchie constitutionnelle. Le Parlement se voit octroyer le contrôle de l’imposition, et les pouvoirs intérieurs du monarque sont considérablement limités.
La démocratie parlementaire canadienne évolue selon un processus complexe et inégal. Certains éléments du système de Westminster sont adoptés dans les colonies, d’autres sont le résultat d’un compromis politique. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, la Nouvelle-France est gouvernée par des vice-rois de la monarchie française. En 1758, la Nouvelle-Écosse, sous domination britannique, est autorisée par la Couronne à former une assemblée élue. (Voir La Nouvelle-Écosse, berceau de la démocratie parlementaire canadienne.)

Après sa conquête par les Britanniques lors de la guerre de Sept Ans, la Nouvelle-France est dirigée par un gouverneur et un conseil législatif nommés par la Couronne. En 1791, à la suite de l’afflux de dizaines de milliers de loyalistes anglophones dans la région à l’ouest de la rivière des Outaouais, Londres adopte l’Acte constitutionnel. Cet acte divise la Province de Québec en deux : le Haut-Canada et le Bas-Canada. Bien que les deux régions disposent d’une assemblée élue, elles sont principalement gouvernées par un gouverneur et un conseil législatif nommés par la Couronne. À l’instar du système de Westminster, les lois doivent être approuvées par les trois parties. Les assemblées élues n’ont donc que peu de contrôle sur l’imposition et sur les dépenses. Au cours des premières décennies du XIXe siècle, la politique des deux colonies est dominée par des cellules d’élites : la clique du Château au Bas-Canada et la Family Compact au Haut-Canada.
La frustration dans les deux régions dégénère en rébellions armées en 1837-1838. Bien que les rébellions échouent, l’élite dirigeante tient à prévenir une autre révolte. En 1840, le Parlement britannique adopte l’Acte d’Union. Il unifie les deux régions sous un seul gouvernement et adopte le concept de gouvernement responsable revendiqué par les réformistes. Cet acte pave également la voie au gouvernement Baldwin-Lafontaine du Reform Party en 1848. L’adoption d’une loi en 1856 fait en sorte que les deux chambres parlementaires soient élues par les citoyens masculins des colonies. Ces réformes enchâssent finalement le principe de gouvernement responsable. George Brown, un partisan du Reform Party, le décrit comme un système dans lequel « le pouvoir exécutif ne peut prendre aucune mesure sans l’avis de son conseil, son conseil devant être choisi parmi les représentants du peuple et avoir la confiance de ceux-ci ».
La démocratie parlementaire canadienne en pratique
Le principe fondamental du gouvernement responsable, selon lequel le gouvernement est responsable devant des représentants dûment élus, et non devant des élites nommées, influe sur le développement du fédéralisme, de la partisanerie, de la règle de la majorité et du droit de vote.
Le gouvernement colonial du Canada devient techniquement plus responsable après 1858. Mais l’unification des deux Canadas et la structure bicamérale de son gouvernement mènent à une impasse politique. Pour George Brown et d’autres politiciens, le dénouement de l’impasse passe par la répartition des pouvoirs entre les gouvernements régionaux et le gouvernement central. Ils esquissent les plans d’un système fédéral qui accorderait au Dominion du Canada des pouvoirs dans des domaines d’intérêt commun aux provinces, notamment le droit criminel, l’immigration, l’activité bancaire et la défense. Les provinces, quant à elles, devaient contrôler les lois relatives aux entreprises locales, aux infrastructures locales et aux services publics (comme les soins de santé et l’éducation). En théorie, cela signifie qu’aucune province ne peut empêcher une autre province d’adopter ses propres lois.
Le principe du gouvernement responsable est donc étroitement lié au fédéralisme canadien. Il est énoncé dans les Résolutions de Québec de 1864 et enchâssé dans la Loi constitutionnelle de 1867. La répartition des pouvoirs est demeurée fermement en place. Elle fixe les conditions de toute négociation entre Ottawa et les provinces. (Voir aussi Relations fédérales-provinciales; Conférences des premiers ministres.)

Système de partis et Cabinet canadiens
Le principe du gouvernement responsable dépend également de la force des partis politiques. Pour rester au pouvoir, le pouvoir exécutif doit compter sur une majorité stable de députés à la Chambre des communes. Cette majorité ne peut être maintenue de manière fiable que par des blocs de députés votant à l’unisson. (Une étude démontre qu’entre 2015 et 2019, les députés ont voté selon la ligne de leur parti 99,6 % du temps.)
En revanche, d’autres systèmes démocratiques dissocient le pouvoir exécutif du corps législatif. Aux États-Unis, par exemple, les membres du cabinet ne sont pas des membres effectifs de l’organe législatif élu. Ce sont généralement des fonctionnaires de carrière, d’anciens élus, des avocats, des proches du parti, d’anciens chefs militaires ou des membres éminents du secteur privé. Ils sont nommés par le président (qui préside le cabinet, mais n’en est pas officiellement membre), avec l’approbation du Sénat. Dans le système de Westminster, par contre, le cabinet est exclusivement composé de députés élus. Les membres du Cabinet ne sont pas techniquement tenus d’être des députés, mais le fait qu’ils ne le soient pas va à l’encontre des conventions et n’est considéré comme acceptable que dans certaines circonstances.
En outre, dans le système américain, les membres du pouvoir exécutif (le président et le vice-président) et du corps législatif (le Congrès et le Sénat) exercent leurs fonctions indépendamment les uns des autres. Au Canada, il n’y a pas de vote pour l’élection du premier ministre; c’est le chef du parti qui remporte le plus grand nombre de sièges à la Chambre des communes qui devient premier ministre. Dans le système américain, le président et le vice-président sont élus lors d’un vote distinct de celui des membres du Congrès ou du Sénat. Pour le théoricien politique Philip Pettit, « cette séparation signifie que le sort de l’administration ne dépend pas du vote des membres. Ces derniers sont donc libres de voter comme ils l’entendent, les contraintes liées aux partis ne constituant qu’une discipline relativement légère, du moins dans des conditions normales. C’est là la différence essentielle entre le régime de Washington et celui de Westminster ».
Système électoral canadien
La démocratie canadienne se caractérise également par des circonscriptions électorales uninominales. Après la Confédération, le Canada compte 180 circonscriptions, chacune étant représentée par un député (MP). Il en compte aujourd’hui 338. Ces circonscriptions sont redessinées tous les dix ans pour refléter les changements dans la répartition de la population du Canada. (Voir Redécoupage des circonscriptions électorales fédérales.)
Pour ce faire, Élections Canada utilise une formule qui permet d’obtenir une répartition démographique équitable. La formule attribue d’abord des sièges à la Chambre des communes aux différentes provinces, puis délimite des circonscriptions électorales à l’intérieur de chacune d’entre elles. Tout cela parce qu’il y a de grandes différences entre les circonscriptions urbaines des provinces très peuplées et les circonscriptions rurales des provinces peu peuplées. (Après la mise à jour de 2013, par exemple, la circonscription du Labrador comptait environ 27 000 habitants, tandis que celle du centre-ville d’Edmonton–Wetaskiwin en comptait environ 209 000. Cependant, plus de 90 % des circonscriptions ont une population comprise entre 75 000 et 150 000.)
Dans les circonscriptions, les élections sont déterminées selon le système uninominal majoritaire à un tour. Cela signifie que le candidat ayant obtenu le plus grand nombre de voix remporte le siège à l’unanimité. Ce système tend à favoriser les partis dont le soutien est concentré à l’échelle régionale. (Lors des élections de 2021, par exemple, le NPD a remporté 25 sièges avec 17,8 % des voix. Quant au Bloc québécois, il a obtenu 32 sièges avec 7,6 % des voix.)
Le calendrier et l’organisation des élections au Canada sont également inscrits dans le droit constitutionnel. Les Lois constitutionnelles de 1867 et de 1982 stipulent que des élections doivent être organisées au moins une fois tous les cinq ans.
Droit de vote au Canada
Le droit de vote au Canada s’étend progressivement au fil du temps. Lorsqu’il apparaît pour la première fois au milieu du XVIIIe siècle, il est réservé aux propriétaires fonciers de sexe masculin. Entre 1791 et 1849, le Bas-Canada autorise certaines femmes propriétaires à voter. Mais ce n’est qu’en 1918 que les citoyennes commencent à obtenir le droit de vote au palier fédéral. En 1916, le Manitoba devient la première province à octroyer le droit de vote aux femmes. Le Québec est la dernière province à le faire, en 1940. À divers moments de l’histoire du Canada, les personnes appartenant à certains groupes ethniques ou religieux, comme les catholiques et les Canadiens d’origine chinoise, se voient interdire le droit de vote. Les Indiens inscrits n’obtiennent le droit de vote qu’en 1960.
Le droit de vote est l’un des droits les plus fondamentaux de la citoyenneté. L’élargissement du droit de vote au fil du temps reflète l’évolution des valeurs sociales du Canada et sa maturation en tant que démocratie libérale. Le droit de vote est officialisé dans la Charte canadienne des droits et libertés. Elle établit que « tout citoyen canadien a le droit de vote et est éligible aux élections législatives fédérales ou provinciales ».
(Voir aussi Parlement; Procédure parlementaire; Monarchie constitutionnelle; Constitution du Canada; Système de partis canadien; Système électoral canadien; Droit de vote au Canada.)