La bataille
de l’Escaut s’est déroulée dans le nord de la Belgique et le sud-ouest des Pays-Bas en 1944, pendant la Deuxième Guerre mondiale. Elle fait partie de la campagne
des Alliés pour libérer le nord-ouest de l’Europe et vaincre l’Allemagne nazie.
La Première Armée canadienne a joué un rôle de premier plan pour
chasser les forces allemandes de l’Escaut et ouvrir une ligne
d’approvisionnement cruciale à partir du port d’Anvers. Toutefois, cette victoire
a eu un prix : la bataille a fait près de 13 000 victimes parmi
les Alliés, dont plus de 6 300 Canadiens.
Carte de la bataille de l’Escaut, du 1er octobre au 8 novembre 1944, pendant la Deuxième Guerre mondiale. La Première Armée canadienne a réussi à chasser les occupants allemands de l’Escaut, ouvrant une voie d’approvisionnement d’une
importance critique pour les Alliés.
(CP Stacey, Histoire officielle de la participation de l’Armée canadienne à la Seconde Guerre mondiale, VolIII La campagne de la victoire : les opérations dans le nord-ouest de l’Europe, 1944-1945 (1960))
Bataille de l’Escaut : faits saillants
Date |
1er octobre au 8 novembre 1944 |
Lieu |
Nord de la Belgique, sud-ouest des Pays-Bas |
Pays participants |
Alliés : Canada, Royaume-Uni, Pologne, États-Unis, Belgique, Pays-Bas Axe : Allemagne |
Pertes |
Alliés : 12 873 tués, blessés ou disparus (dont 6 367 Canadiens) Allemagne : 41 043 soldats capturés par les forces alliées (nombre de pertes inconnu) |
Contexte
Le 6 juin 1944, à peu près 150 000 soldats alliés débarquent sur les plages de Normandie (voir Le jour J et la bataille de Normandie). Ceci comprend la Première Armée canadienne, une force internationale dirigée par le général Henry Duncan Graham (Harry) Crerar. Au cours des mois suivants, elle combattra pour pénétrer en France, en Belgique et dans les Pays-Bas. (Voir Libération des Pays-Bas.)
En septembre 1944, la Première Armée canadienne a nettoyé la plus grande partie de la côte française, tandis que la Deuxième Armée britannique a atteint le sud des Pays-Bas. Toutefois, l’offensive alliée s’enlise durant le mois car les troupes britanniques, américaines et polonaises échouent à prendre un pont sur le Rhin à Arnhem. L’opération Market Garden s’est soldée par la mort de 1 400 soldats alliés et la capture de 6 000 autres par les forces allemandes.
Néanmoins, la Deuxième Armée britannique a remporté une victoire importante en prenant le port d’Anvers, en Belgique, le 3 septembre. Ce port est d’importance cruciale pour les Alliés, qui mènent une difficile campagne d’hiver avec des lignes d’approvisionnement qui s’étendent depuis la Normandie. Toutefois, pour y décharger des approvisionnements, ils doivent d’abord repousser les forces allemandes de la région. Anvers, deuxième port en importance du nord-ouest de l’Europe, est situé près de 80 km à l’intérieur des terres et est relié à la mer par le fleuve l’Escaut. L’embouchure du fleuve et son estuaire sont contrôlés par des troupes allemandes, qui doivent être chassées afin d’ouvrir le port. La Première Armée canadienne se voit confier la mission de nettoyer la zone.
Le sergent Hugh H. McCaughey, de l’Unité de film et de photographie de l’Armée canadienne, filme l’avance du North Shore Regiment le long de l’Escaut entre Ayelsche Gat et Eecloo, Belgique, le 11 octobre 1944.
(Photo de Donald I. Grant, avec la permission du ministère de la Défense nationale du Canada et de Bibliothèque et Archives Canada/PA-137227)
Bataille de l’Escaut
Durant la bataille de l’Escaut, la Première Armée canadienne est commandée par le lieutenant général Guy Simonds. (Le général Crerar est retourné en Angleterre pour cause de maladie.) Le défi est considérable pour Guy Simonds et ses hommes. Le terrain est plat, boueux et inondé, en grande partie plus bas que le niveau de la mer. La région est caractérisée par les polders (terres basses drainées et conquises sur la mer pour être cultivées) et entourée par une série de canaux et de digues de quatre à cinq mètres de hauteur. Les blindés s’enlisent dans la boue et les assaillants doivent avancer le long de routes étroites et exposées construites au sommet des digues. Dans ces conditions, les défendeurs disposent d’un avantage incontestable. De plus, les Allemands ont établi une solide défense, incluant de l’artillerie lourde.
Nous avons avancé d’à peu près mille mètres, sans couverture, sans rien. La seule chose qu’il y avait là, ce sont des betteraves. Comment nous avons pu traverser, je l’ignore, parce que les Allemands étaient terrés dans une grosse digue de l’autre côté, qui contenait une voie ferrée et un route, le seul moyen de se rendre à [l’île de] Walcheren. (Témoignages d’anciens combattants : William « Bill » Davis)
Les opérations commencent au début d’octobre. Les combats sont féroces, et la Première Armée subit de lourdes pertes. Le 13 octobre, par exemple, le régiment Black Watch perd 145 hommes et tous ses officiers commandants dans ce que l’on appelle le « vendredi noir ».
Le 16 octobre, le feld-maréchal britannique Bernard Montgomery ordonne que la libération de l’Escaut devienne la priorité principale des forces sous son commandement. Dans ce but, la 52e Division britannique est rattachée à la Première Armée canadienne. Malgré une résistance acharnée des Allemands, les Alliés s’emparent de la plus grande partie de la zone dès le 3 novembre. À ce moment, les unités canadiennes, épuisées, sont retirées du front et remplacées par des unités britanniques.
Véhicules amphibies Buffalo transportant des troupes sur l’Escaut vers Hooftplaat pendant la Deuxième Guerre mondiale (13 octobre1944).
(Photo de Donald I. Grant, avec la permission du ministère de la Défense nationale du Canada et de Bibliothèque et Archives Canada/PA-136754)
Seule l’île de Walcheren, à l’embouchure de l’Escaut, demeure entre les mains des Allemands. L’île est solidement fortifiée et difficile à attaquer. Le seul accès terrestre est une jetée longue et étroite. Les terres qui l’entourent sont trop humides pour traverser à pied, mais l’eau est insuffisamment profonde pour traverser en bateau. La Royal Air Force bombarde les digues, afin d’inonder la zone et de permettre une attaque amphibie. Après avoir lancé une offensive sur trois fronts, les Alliés parviennent à prendre la capitale de l’île, Middelburg, le 6novembre. La résistance allemande prend fin le 8novembre.
Le saviez-vous?
Le feld-maréchal britannique Bernard Montgomery a surnommé les soldats de la 3e Division canadienne les « Rats d’eau » à cause de leur expérience des opérations amphibies en Normandie et durant la bataille de l’Escaut. C’est une allusion aux « Rats du désert », le surnom nommé à la 7e Division blindée, faisant partie de l’armée britannique, qui a combattu sous ses ordres en Afrique du Nord.
Les résidents regardent les vaisseaux de la Royal Navy nettoyer l’Escaut, libérant le port d’Anvers à l’usage des Alliés durant la Deuxième Guerre mondiale (octobre 1944).
(Photo avec la permission du ministère de la Défense nationale du Canada et de Bibliothèque et Archives Canada/e002113670)
Signification
À la fin de novembre 1944, toutes les mines ont été retirées de l’Escaut. Le 28 novembre, le premier convoi allié pénètre dans le port d’Anvers. Le port est d’une importance cruciale pour les Alliés, qui poursuivent leur campagne en Europe. À la fin d’avril, les Pays-Bas sont libérés, et le 5 mai 1945, les forces allemandes présentes dans le pays se rendent officiellement. La guerre en Europe se termine deux jours plus tard. ( Voir Les soldats canadiens et la libération des Pays-Bas et Jour de la Victoire.)
La bataille de l’Escaut a joué un rôle important dans la victoire des Alliés durant la Deuxième Guerre mondiale. Elle leur a permis de prendre le contrôle de l’Escaut, d’ouvrir le port d’Anvers et de capturer 41 043 soldats allemands. Mais les Alliés ont aussi subi des pertes considérables, soit 12 873 tués, blessés ou disparus, dont 6 367 Canadiens.
La plus terrible tâche de l’armée canadienne a été d’ouvrir l’Escaut, parce que les Alliés avaient désespérément besoin du port d’Anvers. […] Aussi, la 3e Division a reçu l’ordre de nettoyer le côté ouest et nous [la 2e Division d’infanterie canadienne] avions la tâche de libérer le côté est, soit la péninsule de Beveland et l’île de Walcheren. Et ce fut la plus terrible mission que nous ayons jamais eue [la bataille de l’Escaut]. À ce moment, nous avions subi tant de pertes, que l’armée a démantelé des unités anti-aériennes et des unités de transmission et envoyé ces gars combattre dans l’infanterie. Les pauvres diables n’avaient aucun espoir d’en revenir vivants. C’était vraiment horrible. (Témoignages d’anciens combattants: William « Bill » Davis)
Une femme dépose des fleurs sur des tombes en 1944, probablement aux Pays-Bas. En octobre et au début de novembre 1944, les forces alliées ont mené une dure bataille pour nettoyer la zone entourant l’Escaut. Le coût de la victoire a été élevé. Les Alliés ont perdu près de 13 000 hommes durant la bataille, dont plus de 6 300 Canadiens.
(Photo avec la permission du ministère de la Défense nationale du Canada et de Bibliothèque et Archives Canada/e002113671)
Mémoire
La plupart des Canadiens morts durant la bataille de l’Escaut sont enterrés dans le cimetière de guerre Canadien d’Adegem, dans la province d’Oost-Vlaanderen, en Belgique, ou dans le cimetière de guerre canadien de Bergen-op-Zoom, dans le Brabant septentrional, aux Pays-Bas.
Le bombardier C. A. Flanders écrit une lettre sur le pont de sa péniche, où vivent plusieurs membres de l’équipe des artilleurs, sur le fleuve l’Escaut, le 2 octobre 1944.
(Photo de Lieutenant Ken Bell, avec la permission du ministère de la Défense nationale du Canada et de Bibliothèque et Archives Canada/PA-145574)