Imaginez-vous que votre famille vit sur les mêmes terres depuis des générations. Au fil du temps, d’autres gens arrivent, s’installent et instaurent un gouvernement dont la plupart des règles s’appliquent désormais à vous. Mais ces gens ne vous incluent pas dans les consultations. En fait, ils vous excluent spécifiquement.
Imaginez-vous que votre famille vit sur les mêmes terres depuis des générations. Au fil du temps, d’autres gens arrivent, s’installent et instaurent un gouvernement dont la plupart des règles s’appliquent désormais à vous. Mais ces gens ne vous incluent pas dans les consultations. En fait, ils vous excluent spécifiquement.
Telle est la situation à laquelle ont été confrontés les peuples autochtones du Canada durant la majeure partie de la période suivant la Confédération de 1867. Bien que de nombreux membres des Premières Nations ont le droit de voter, on exige d’eux qu’ils renoncent à leur statut d’Indien par l’intermédiaire d’un processus appelé émancipation. En 1885, une loi instaurée par le premier ministre sir John A. Macdonald accorde le droit de vote aux Indiens inscrits, comme on les appelle à l’époque, qui répondent aux exigences déjà établies. Cependant, l’intention de John A. Macdonald d’étendre le droit de vote à tous les peuples autochtones se heurte à une forte opposition. L’un des résultats est l’exclusion spécifique des peuples autochtones vivants dans les régions impliquées dans la récente résistance des Premières Nations et des Métis (voir Résistance du Nord-Ouest). Quoi qu’il en soit, cette législation ne dure pas longtemps : en 1898, sept ans après la mort de John A. Macdonald alors au pouvoir, la loi est abrogée.
Mais d’où vient cette réticence à accorder le droit de vote aux peuples autochtones ? Elle prend racine dans des préjugés radicaux combinés à une logique malavisée et souvent paternaliste. Le langage utilisé lors du débat sur la législation en 1885 est brutal et insultant; les membres des Premières Nations sont décrits comme étant « inférieurs », « sales », « barbares » et « ignorants ».
En fin de compte, il faut la participation des peuples autochtones à la Première Guerre mondiale pour qu’on accepte enfin d’accorder le droit de vote à certains Indiens inscrits, bien qu’il faudra attendre jusqu’en 1924 pour émanciper pleinement ces anciens combattants. En 1934, la Loi du cens électoral fédéral interdit de façon explicite aux membres des Premières nations vivant sur les réserves, ainsi qu’à tous les Inuits, de voter, à l’exception des anciens combattants de guerre.
En 1950, les Inuits obtiennent le droit de vote; mais beaucoup d’entre eux vivent si loin des bureaux de scrutin que ce changement n’a que peu d’application pratique. En 1958, le premier ministre John Diefenbaker, un défenseur du droit de vote des peuples autochtones, nomme le premier membre des Premières Nations au Sénat, James Gladstone, aussi appelé Akay-na-muka. En 1960, le gouvernement de John Diefenbaker étend le droit de vote sans condition à tous les peuples autochtones; et huit ans plus tard, Leonard Marchand, de la Colombie-Britannique, devient le premier Indien inscrit à être élu député. Toutefois, en raison de disputes sur la classification des femmes basée sur le fait qu’elles soient mariées à un Indien inscrit ou un homme non inscrit, ce n’est qu’en 1985 que la loi est amendée pour éliminer les éléments de discrimination contre les femmes des Premières Nations (voir aussi Questions relatives aux femmes autochtones du Canada).
Aujourd’hui, bien que de nombreux défis persistent, il existe de nouvelles occasions pour les peuples autochtones du Canada de pouvoir réfléchir à leur passé, y compris à leurs frustrations et à leurs réalisations. Parmi ces occasions, on compte le mois de juin, déclaré Mois national de l’histoire autochtone en 2009, et le 21 juin, nommé Journée nationale des Autochtones en 1996. Au cours des dernières années, il y a eu des progrès à célébrer : lors des élections fédérales de 2015, un nombre record de 10 députés autochtones sont élus à la même Chambre des communes que celle qui a autrefois méprisé leur peuple. Deux ministres autochtones sont assermentés au Cabinet du premier ministre Justin Trudeau en 2015 : Jody Wilson-Raybould, ancienne procureure de la couronne, cheffe régionale de l’Assemblée des Premières Nations de la Colombie-Britannique et membre du peuple kwakwaka’wakw, en tant que ministre de la Justice et procureure générale; et Hunter Tootoo, membre de l’Assemblée législative du Nunavut (1999-2013), en tant que ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne.