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Moosehead Breweries Ltd.

Moosehead Breweries Limited, productrice de la Moosehead Canadian Lager, est la plus ancienne société familiale indépendante de brassage au Canada. Située à Saint John au Nouveau-Brunswick, l’entreprise appartient à la même famille depuis six générations et elle est actuellement gérée par Andrew Oland, l’arrière-arrière-arrière-petit-fils des fondateurs Susannah et John Oland. Moosehead est la quatrième brasserie en importance au Canada derrière Molson, Labatt et Sleeman, et elle est la dernière grande brasserie appartenant encore à des Canadiens. La bière Moosehead est vendue d’un bout à l’autre du pays, dans plusieurs États américains ainsi que dans 15 pays dans le monde. La société produit 19 bières différentes commercialisées sous 10 marques distinctes, dont la classique Moosehead Canadian Lager ainsi que James Ready, Alpine et Hop City. Elle brasse également de la bière pour six entreprises, dont Samuel Adams aux États-Unis, et Estralla Damm en Espagne. Moosehead est une entreprise privée et ne divulgue pas ses rapports financiers; toutefois, en 2018, des analystes de marché ont évalué que la société détenait jusqu’à 3,8 % du marché canadien de la bière et qu’elle générait 247,1 millions de dollars de recettes.

Moosehead Breweries

Susannah et John Oland

John Oland naît le 14 juillet 1819 à Bristol en Angleterre. Étant donné sa situation familiale modeste, il occupe une variété d’emplois avant d’épouser Susannah Culverwell en 1842. Neuf enfants naissent de cette union. Même après le mariage, John Oland multiplie les emplois, travaillant tour à tour comme vendeur de cigares, drapier, boutiquier, agent de commerce et comptable, entre autres. Son esprit agité fait qu’il a de la difficulté à garder ses emplois pendant une période prolongée, ce qui nuit à sa sécurité financière; en 1844, il est contraint de déclarer faillite. Par la suite, il se met à étudier la comptabilité et il commence à travailler pour le London and Southwestern Railroad. Peu après, la famille déménage dans le Surrey pour se lancer dans l’agriculture. En 1862, alors qu’il est presque sans le sou, John Oland décide d’immigrer en Amérique du Nord britannique, laissant à Susannah Oland la charge d’élever les enfants et de maintenir la ferme familiale. En 1865, Susannah Oland et les enfants le rejoignent à Truro en Nouvelle-Écosse, une région qui connaît un essor économique en raison de la construction du chemin de fer (voir Histoire du chemin de fer).

Susannah Oland

Fondation de la brasserie, 1867

En 1867, la famille Oland vit désormais à Dartmouth. Afin de suppléer le maigre salaire de son mari, Susannah Oland vend de la bière qu’elle fabrique dans la remise à l’arrière de leur domicile à l’aide d’une vieille recette familiale. Sa « bière brune d’octobre » s’avère si populaire auprès des résidents du coin qu’un ami de la famille, le capitaine Francis Walter DeWinton (1835-1901), lui suggère de se mettre à brasser à plus grande échelle. Francis Walter DeWinton et deux autres investisseurs fournissent les fonds nécessaires pour démarrer une brasserie commerciale. Comme ils commencent cette entreprise dans la région de Turtle Grove à Dartmouth, une communauté mi’kmaq, ils nomment la brasserie Turtle Grove Brewery. Le 1er octobre 1867, l’entreprise est incorporée. Sur papier, John Oland est le directeur de l’entreprise, mais en réalité c’est Susannah Oland qui dirige les opérations quotidiennes. Selon de nombreuses personnes, elle supervise le processus de brassage qu’elle effectue avec l’aide de ses trois fils. (Voir aussi Femmes entrepreneures remarquables dans l’histoire du Canada.)

La nouvelle brasserie commerciale est située sur un lopin de 12,5 acres avec 300 pieds du terrain donnant sur le port d’Halifax. Cette ville est l’endroit idéal pour une jeune brasserie en raison de sa population militaire et navale. La bière fait depuis longtemps partie de la vie des forces armées. Pendant la guerre de Succession d’Espagne (1701-1714), le duc de Marlborough, commandant des forces britanniques, déclare : « Aucun soldat ne peut se battre sans avoir été convenablement nourri de bœuf et de bière. » Les autorités britanniques font de cette déclaration une véritable devise et, dans les années qui suivent, les soldats britanniques reçoivent assez « d’argent de bière » pour s’acheter cinq pintes par jour. Ceci, ajouté au fait que la majorité de la population de Dartmouth et de Halifax provient de pays à la culture de buveurs de bière comme l’Angleterre, l’Écosse et l’Irlande, donne une motivation immédiate pour quiconque comme Susannah Oland qui cherche à tirer profit de leurs connaissances dans l’art du brassage.

Grâce au réseau professionnel de Francis Walter DeWinton (il est secrétaire militaire pour le marquis de Lorne, alors gouverneur général du Canada), la brasserie devient rapidement la troisième plus grande entreprise de Dartmouth. En octobre 1870, la famille est frappée par la tragédie lorsque John Oland meurt des suites d’un accident d’équitation. La situation empire davantage lorsque Francis Walter DeWinton est transféré à Gibraltar et que les deux autres partenaires vendent leurs parts de l’entreprise à George Fraser, un gestionnaire qui a déjà travaillé pour une brasserie concurrente. Susannah et ses fils ne se découragent pas et continuent de travailler à la brasserie maintenant renommée Army and Navy Brewery en l’honneur de ses principaux clients.

S. Oland Sons & Co.

En 1877, après avoir reçu un héritage d’un parent en Angleterre, Susannah Oland rachète les parts de George Fraser et dissout le partenariat. Après avoir renommé l’entreprise S. Oland, Sons and Company, elle s’affaire à enseigner à ses fils l’art du brassage. Susannah Oland travaille au sein de la brasserie pour le restant de sa vie.

La famille Oland

À la mort de Susannah Oland en 1885, la brasserie est reprise par le plus jeune fils de la famille, George W. C. Oland. En 1895, George vend la brasserie à un syndicat anglais et utilise les fonds pour faire l’acquisition de la Highland Spring Brewery à Halifax. La brasserie de Halifax est détruite lors de l’explosion de 1917 (voir Explosion de Halifax). Conséquemment, en 1918, George W. C. Oland achète la Red Ball Brewery à Saint John. La Red Ball Brewery est d’abord dirigée par son fils George Bauld, et plus tard par Geoffrey (voir Explosion de Halifax). Son deuxième fils, Sidney, se joint à l’entreprise à la fin de la Première Guerre mondiale et, avec l’aide financière que le gouvernement offre aux victimes de l’explosion de Halifax, la famille Oland reconstruit l’ancienne Highland Spring Brewery.

L'explosion de Halifax

Prohibition et discorde au sein de la famille Oland

Pendant la prohibition, la vente de boissons alcoolisées devient illégale. Malgré tout, les Oland suppléent les maigres profits qu’ils font de la vente de boissons gazeuses et de bières à 2 % d’alcool, dont la production est légale, en vendant illégalement de la bière « forte » dans des pubs et des magasins. En 1927, George Bauld admet avoir vendu de la bière illégale à divers pubs et magasins, ce qui coûte à son entreprise plus de 24 000 dollars en amendes au cours de la prohibition. Cette pratique douteuse permet à la brasserie de rester à flots. En 1928, Oland & Sons fait l’acquisition de la Alexander Keith’s Brewery qui est alors à vendre. Keith’s est la plus vieille brasserie des provinces maritimes, et son acquisition donne à la famille Oland le monopole du marché de la bière en Nouvelle-Écosse.

La brasserie Moosehead

Peu de temps après l’acquisition de la brasserie Alexander Keith’s par la famille Oland, le frère aîné de Sidney Oland, George Bauld Oland, achète la James Ready Brewery à Saint John et la renomme New Brunswick Breweries (elle devient Moosehead Breweries Limited en 1947). En 1933, il lance une nouvelle bière, la Moosehead Pale Ale. Depuis leur enfance, Sidney et George Bauld sont en compétition l’un contre l’autre. Lorsqu’il était vivant, leur père ne permettait pas à cette intense rivalité de dégénérer en querelle familiale. Mais lorsque George Senior meurt en 1933, les frères se séparent. À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, la famille Oland est divisée en deux branches distinctes : les Oland de Nouvelle-Écosse, qui possèdent et exploitent la Alexander Keith’s Brewery, et les Oland du Nouveau-Brunswick, qui contrôlent Moosehead. Éventuellement, le contrôle de la brasserie Moosehead à Saint John est confié au fils de George Bauld, Philip, tandis que la société Oland & Sons de Halifax est reprise par les trois fils de Sidney; Victor, Bruce et Don.

Consolidation de l’industrie brassicole après la guerre

Après la Deuxième Guerre mondiale, l’industrie brassicole se consolide autour des trois plus importantes sociétés de brassage : Labatt, Molson et Canadian Breweries Limited. Les obstacles au commerce interprovincial, les lois provinciales réglementant la vente au détail et la distribution des boissons alcoolisées, la sensibilité locale ainsi que des politiques permissives à l’égard des reprises commerciales, ouvrent la voie à la consolidation du marché au Canada. En 1962, les trois grandes brasseries produisent près de 95 % des bières vendues au Canada. En outre, bien qu’un peu plus de 50 des 61 brasseries en activité en 1945 vendent encore de la bière au début des années 1960, la plupart d’entre elles appartiennent désormais à ces trois géants brassicoles. Leur présence physique se trouve dans toutes les régions à travers le pays, à l’exception des provinces maritimes et du nord de l’Ontario, et leurs marques nationales dominent le marché.

La taille limitée du marché local et le tarif protectionniste que la province impose aux bières importées protègent Moosehead de ses trois grands concurrents. Malgré tout, Moosehead rencontre des difficultés au cours des années d’après-guerre en raison des effets persistants de la prohibition. Bien que la prohibition ait pris fin au Nouveau-Brunswick en 1927, la consommation d’alcool en public demeure interdite jusqu’en 1961. Cela mène à certains des plus bas taux de consommation de bière au Canada. Pire encore, Moosehead ne parvient pas à gagner de parts de marché à l’extérieur du Nouveau-Brunswick. La taille de son budget publicitaire, sa culture d’entreprise conservatrice et les barrières à l’entrée dans le reste du Canada signifient que Moosehead demeure un producteur régional. Conscients du fait que les lois sur l’alcool vont se libéraliser en 1962, les vendeurs de Moosehead introduisent leur bière en fût dans toute la province, ce qui permet à l’entreprise de dominer le marché des fûts pour les décennies à venir. En 1970, Moosehead contrôle environ la moitié du marché dans les provinces maritimes.

Tout au long de cette période difficile, Moosehead continue de faire ce en quoi elle excelle : brasser et vendre de la bière. Ce n’est pas le cas des trois géants brassicoles, qui dans les années 1970 et 1980, mettent en place une stratégie de diversification, choisissant de miser sur la sécurité de la diversité plutôt que sur le haut rendement de la spécialisation. Labatt, par exemple, se diversifie dans les plats surgelés, les jus, les produits laitiers, les céréales et le divertissement, notamment en amenant les Blue Jays à Toronto. Molson fait de même et se diversifie dans les produits chimiques et le secteur de la rénovation, par exemple en dépensant des centaines de millions de dollars pour acheter Beaver Lumber et Home Depot.

« The Moose is Loose » : expansion dans les marchés américains

Toutefois, Moosehead ne suit pas cette tendance. La société tente au contraire d’accroître ses ventes en trouvant de nouveaux marchés pour ses produits phares. En 1975, Derek Oland, fils du président de l’époque, Philip Oland, suggère une incursion aux États-Unis après avoir reçu la suggestion d’importateurs américains. Par le passé, des brasseurs canadiens ont tenté de percer le marché américain extrêmement compétitif sans succès. Philip Oland est donc sceptique des mérites d’une telle manœuvre. Mais Derek Oland continue de défendre sa cause, et après trois ans de délibérations, Moosehead passe à l’action.

La direction de Moosehead réalise que la clé de son succès de l’entreprise réside dans le marketing. L’emballage de ses bières est donc reconçu pour afficher une allure plus canadienne. L’étiquette en aluminium bleu et blanc est remplacée par l’étiquette verte que l’on connaît, sur laquelle trônent une tête d’orignal et les mots « Moosehead Canadian Lager Beer ». L’étiquette est censée avoir un aspect rustique et évoquer les grands espaces canadiens. La marque est également vendue comme un produit de haute qualité, et son prix est ajusté en conséquence. Plutôt que de se lancer dans de vastes campagnes publicitaires pour grand public, Moosehead place ses produits en évidence dans des magasins de détail et des bars et distribue une foule de produits promotionnels, comme des t-shirts portant le slogan « The Moose is Loose » (« L’orignal est en cavale »).

La campagne initiale a l’effet escompté. Lors de son lancement aux États-Unis en 1978, l’entreprise vend 96 000 caisses de bières, soit deux fois plus que prévu. La marque est particulièrement populaire auprès des étudiants du nord-est des États-Unis. À son apogée, Moosehead vend 6 millions de caisses de bières annuellement aux États-Unis, ce qui stimule également les ventes canadiennes. Lorsque les barrières commerciales à l’entrée provinciale tombent en 1992, Moosehead s’étend à la grandeur du pays. À la fin des années 2010, l’entreprise est le quatrième plus important brasseur canadien et le seul à n’être pas majoritairement détenu par des intérêts étrangers.

Meurtre de Richard Oland

En 2011, Richard Oland, l’ancien vice-président de Moosehead Breweries Ltd. et le frère cadet du président Derek Oland, est assassiné dans son bureau de Saint John. Étant donné la renommée de la famille Oland au Nouveau-Brunswick et la nature violente du décès, la nouvelle attire une attention nationale. En 2015, le fils de Richard, Dennis, est reconnu coupable du meurtre de son père. Cependant, sa condamnation est renversée par la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick en 2016. En 2019, Dennis Oland est déclaré non coupable de meurtre au deuxième degré lors d’un nouveau procès (voir Affaire Dennis Oland).

Caisses de bières Moosehead volées

En août 2004, une cargaison de plus de 50 000 canettes de bière Moosehead disparaît en chemin vers le Mexique. Le camionneur responsable de la livraison est arrêté en Ontario et condamné à 19 mois d’emprisonnement. La majorité de ces bières, facilement identifiables en raison de leur étiquette en espagnol, est retrouvée par la police et des citoyens. Selon un communiqué de presse de la GRC, « six canettes ont été retrouvées avec des marques de dents, ce qui veut dire qu’à un moment donné, un ours s’est amouraché de la bière ».

Étant donné la nature cocasse de l’événement, la nouvelle fait les manchettes à l’échelle internationale. Profitant de la publicité gratuite, Moosehead vend une série de t-shirts avec le slogan « Beer Heist Tour ‘04 » (« Tournée du grand vol de bière 2004 ») et fait des déclarations opportunes aux médias disant : « Si quelqu’un vous offre une Moosehead froide dans une canette en espagnol, la bière est dangereuse ».

En septembre 2007, une cargaison encore plus grosse de Moosehead, soit 77 000 canettes et 44 000 bouteilles, est volée à Mississauga en Ontario. Un porte-parole de l’entreprise exhorte les consommateurs de Moosehead à « faire des réserves », et il dit à un journaliste : « Il nous semble que les voleurs savent manifestement ce que veulent les consommateurs. » Une personne est arrêtée pour le vol en octobre.

Hop City Brewing Co.

Au milieu des années 2000, les petites brasseries artisanales deviennent de plus en plus populaires et augmentent considérablement leurs ventes, ce qui pousse les grandes entreprises brassicoles à faire l’acquisition de ces marques ou à établir leurs propres marques. En 2009, Moosehead répond à la tendance des bières artisanales en fondant sa propre microbrasserie à Brampton en Ontario nommée Hop City Brewing Co. La brasserie produit des marques comme Barking Squirrel et Hop Bot IPA.

Prix

  • Or (Alpine Lager), « Lager, ale ou cream ale américaine », World Beer Cup (2000)
  • Argent (Moosehead Light), « Lager, ale ou cream ale américaine », World Beer Cup (2000)
  • Bronze (Moosehead Lager), « Lager premium de style américain », World Beer Cup (2002)
  • Bronze (Moosehead Lager), « Lager premium de style américain », World Beer Cup (2004)
  • Or, Monde Selection (2005)
  • Or (Moosehead Pale Ale), « Bière blonde ou dorée de style nord-américain », Canadian Brewing Awards (2015)
  • Or (Alpine Lager), « Lager de style nord-américain », Canadian Brewing Awards (2016)
  • Argent (Moosehead Cracked Canoe), « Lager légère (faible en calories) », Canadian Brewing Awards (2016)
  • Bronze (Moosehead Lager), « Lager premium de style nord-américain », Canadian Brewing Awards (2017)
  • Bronze (Moosehead Cracked Canoe), « Lager légère (faible en calories) », Canadian Brewing Awards (2017)
  • Argent (Moosehead Small Batch Ten Penny Stock Ale), Pale Ale de style anglais, Canadian Brewing Awards (2019)
  • Bronze (Moosehead Small Batch Honey Wheat Ale), bière blonde ou bière spéciale miel/érable, Canadian Brewing Awards (2019)
  • Or (Moosehead Small Batch Sugar Bush), bière blonde ou bière spéciale miel/érable, Canadian Brewing Awards (2019)
  • Bronze (Cracked Canoe), bière blonde légère (à teneur réduite en calories), Canadian Brewing Awards (2020)
  • Or (Moosehead Shaker Tropical Pina Colada), bière expérimentale, Canadian Brewing Awards (2020)
  • Argent (Moosehead Small Batch Rauchbier), bière fumée, Canadian Brewing Awards (2020)
  • Bronze (Grapefruit Radler), Fruits/Fruits de blé/Field/Citrouille, Canadian Brewing Awards (2021)