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Morrice, James Wilson

 Morrice ne reviendra jamais vivre au Canada, mais chaque année jusqu'à la mort de son père, survenue en 1914, il y séjourne et peint les extraordinaires croquis de scènes d'hiver et les vues de Québec et de ses environs, qui représentent le côté canadien de son oeuvre.
Étude pour \u00ab Dieppe \u00bb
Huile sur bois, vers 1906, de James Wilson Morrice (avec la permission de la National Gallery of Canada/Musée des Beaux-Arts du Canada, Ottawa).\r\n \r\n\r\n
Tanger, paysage
Huile sur toile de James Wilson Morrice, 1912 (avec la permission de la National Gallery of Canada/Musée des Beaux-Arts du Canada, Ottawa).\r\n \r\n
\u00ab Wharf on the St. Lawrence \u00bb
James Wilson Morrice, vers 1900, huile sur toile (avec la permission du Musée des beaux-arts du Canada).
Le bac, Québec
Huile sur toile de James Wilson Morrice, 1907 (avec la permission de la National Gallery of Canada/Musée des Beaux-Arts du Canada, Ottawa).\r\n \r\n\r\n

Morrice, James Wilson

James Wilson Morrice, peintre (Montréal, 10 août 1865 -- Tunis, Tunisie, 23 janv. 1924). Morrice est l'un des premiers peintres modernistes canadiens et le premier Canadien à atteindre une grande renommée à l'étranger. Né dans une famille de commerçants fortunés, de religion presbytérienne d'observance stricte, il démontre très jeune un intérêt pour la peinture. Suivant la volonté de son père, il fait son droit, étudiant à l'U. de Toronto et à Osgoode Hall. Il est admis au barreau de l'Ontario en 1889, mais il ne pratiquera jamais le droit. Un marchand de Montréal, William Stewart, lui conseille d'étudier à l'étranger, et sir William VAN HORNE, reconnaissant son talent, persuade son père de financer ses études d'art en Europe. Il commence ses études en 1890 à l'Académie Julian, à Paris, mais cherche bientôt à étudier auprès de maîtres particuliers, d'abord le peintre de Barbizon Henri Harpignies, puis le peintre américain James McNeill Whistler. Cependant, c'est à Venise, qu'il visite en 1896 en compagnie de Maurice CULLEN, que les effets de lumière particuliers changent sa façon de voir et lui ouvrent l'univers de la peinture.

Morrice ne reviendra jamais vivre au Canada, mais chaque année jusqu'à la mort de son père, survenue en 1914, il y séjourne et peint les extraordinaires croquis de scènes d'hiver et les vues de Québec et de ses environs, qui représentent le côté canadien de son oeuvre. Pendant de nombreuses années, Paris reste le centre de son univers. Il devient l'un des membres du groupe de peintres et d'écrivains expatriés de la rive gauche et fréquente les cafés tels que le Chat Blanc, à Montparnasse, où il côtoie Whistler et Charles Conder de même que les écrivains anglais Arnold Bennett et Somerset Maugham, qui font de lui un personnage secondaire dans leurs livres. Ils notent son esprit, sa cordialité portée sur l'alcool et l'habitude qu'il a de faire rapidement des études à l'huile sur de petits panneaux de bois. Ces esquisses sont toujours le point de départ des peintures de Morrice. Il en fait des centaines, dont quelques-unes seront développées sur toile. À ses débuts, il subit l'influence des derniers impressionnistes, notamment Bonnard et Vuillard, mais, à partir de 1909, à peu près au moment où il rencontre Henri Matisse, il se rapproche des Fauves, avec leurs coloris plus violents et leurs compositions plus fortes et plus rythmées. À la même époque, il fait un séjour en Afrique du Nord. C'est là et dans les Caraïbes, où il se rend pour la première fois en 1915, qu'il découvre les tons clairs et violents qui composeront plus tard sa palette. Même au sommet de leur splendeur, ses oeuvres ne présentent pas de couleurs criardes, ne perdant jamais leur délicatesse et leur translucidité particulières.

Les années de guerre le perturbent particulièrement. Les cafés de Paris perdent leur animation. Il va à Londres mais y trouve le climat difficile. Il devient peintre de guerre canadien pendant un moment et réalise à ce titre sa pièce la plus inusitée : une murale dans laquelle une interminable rangée de soldats marchent au pas dans la boue d'un champ de bataille. Quand la guerre prend fin, il passe plus de temps dans des pays où la chaleur est bénéfique pour sa santé et où les couleurs et la lumière l'inspirent. En 1922, il est très gravement malade à Montreux, en Suisse. Lorsqu'il part pour l'Afrique du Nord, le bruit court à Paris qu'il est mort et, en 1923, quelques amis préparent une rétrospective de ses oeuvres. Il meurt en fait quelques mois plus tard.

La renommée de Morrice dans son pays natal est presque entièrement posthume. Bien qu'il soit membre de l'éphémère Canadian Art Club (1907-1915) et qu'il soit élu à l'Académie royale des arts du Canada en 1913, il est surtout apprécié par quelques-uns de ses pairs, et la première exposition importante de ses oeuvres au Canada n'a lieu qu'après sa mort. En Europe, toutefois, il commence à être reconnu au début des années 1900. À Paris, il expose régulièrement au moderniste Salon d'Automne, dont il devient vice-président. Les peintres français les plus importants reconnaissent sa valeur, et les oeuvres de Morrice font partie des grandes collections publiques européennes bien avant que les musées canadiens n'en acquièrent une seule.

L'oeuvre de Morrice recouvre deux mondes. Il a sa place dans la tradition moderniste européenne, et ses peintures tropicales possèdent par leurs couleurs et leur esprit un exotisme que peu de peintres canadiens ont égalé jusqu'à ces derniers temps. Ses paysages d'hiver de Québec, qui comptent quelques-unes de ses toiles les plus célèbres, notamment The Ferry, Québec et The Ice Bridge, sont cependant si caractéristiques avec leur lumière froide et leurs formes austères qu'il est impossible d'imaginer qu'elles ne sont pas canadiennes. Elles figurent parmi les premières grandes peintures véritablement canadiennes.

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