Lloyd Hamilton (source primaire) | l'Encyclopédie Canadienne

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Lloyd Hamilton (source primaire)

« On apprend toutes sortes de recettes. J’ai encore les livres de recettes. Je me souviens même qu’en Corée j’ai dû… les pages se défaisaient. J’ai dû prendre une planche de bois et deux clous pour garder les pages ensemble. Mais on apprenait toutes sortes de recettes. La première chose qu’on apprenait à cuisiner c’était des sablés. C’était amusant. »

Pour le témoignage complet de M. Hamilton, veuillez consulter en bas.


Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.

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Transcription

Lorsque la guerre a eu lieu, lorsqu’elle a vraiment eu lieu, j’étais au secondaire. Je crois que nous étions la seule école secondaire à Calgary, ma ville natale. Il y avait à peu près 1500 élèves à Western Canada High, et à l’époque, nous avions des cours appelés « études sociales ». Personne n’avait jamais entendu parler de la Corée. Tout le monde se demandait à quel endroit se déroulait cette guerre. Ce jour-là, le directeur a mis en pause tous les curriculums d’études sociales et a demandé à tous les enseignants d’études sociales de parler de la Corée. Je suis certain que les enseignants ne savaient pas de quoi ils allaient parler, mais à l’aide de toutes les informations qui circulaient, de la radio aux cartes, en passant par ce qui était offert dans la bibliothèque de l’école, ils ont trouvé quelque chose.

Lorsque nous avons entendu parler de la Corée, je me suis mis à penser à la grande famille de l’humanité, au fait que les gens perdent leur liberté partout dans le monde, mais que nous avons la nôtre. C’était à l’arrière de mon esprit, une graine avait été plantée. Lorsque j’ai fini l’école secondaire, la guerre durait déjà depuis une ou deux années. Je voulais voyager. Je suis allé à Vancouver pour devenir serveur sur un paquebot, mais il y avait une liste d’attente de deux ans. Lorsque je suis revenu, j’ai décidé de m’enrôler dans l’armée, car mon père était cuisinier dans l’armée et je voulais suivre ses traces.

Mais lorsque je suis arrivé au [No.] 25 FDS – 25 pour la division de la brigade d’infanterie britannique*, j’imagine que c’était le cas à cause de 20 000 troupes. Poste de secours** - C’est là que j’ai été envoyé. Le premier jour où je suis arrivé, le… tout le monde devait sauter dans le fossé, et je portais cet uniforme neuf, et j’ai aussi dû sauter dans le fossé. Un MiG (appareil de chasse russe) volait au-dessus de nous, et ils avaient peur de se faire mitrailler ou bombarder. Rien de cela ne s’est passé, mais nous étions tout de même dans le fossé.

Je crois que c’est lors de mon premier jour qu’ils m’ont donné une caisse de pommes avec un coton-fromage sur le dessus et m’ont dit: « Tiens. Voilà ton souper pour ce soir ». J’ai enlevé le coton-fromage et il y avait là, j’allais apprendre ce que c’était plus tard, une jambe de Maori, un Maori de Nouvelle-Zélande. Ils avaient amputé sa jambe, et ils enterrent ou brûlent normalement ce genre de chose, et ils voulaient voir si j’étais mou ou quelque chose du genre, mais je les ai bien eus. Je n’ai pas dit un mot. J’ai pris la boîte, un peu de pétrole et de gaz, et je suis allé sur le coté de la colline, j’ai creusé un trou, j’y ai déposé la jambe, versé le pétrole et l’ai brûlée puis enterrée. Jamais dit un mot à qui que ce soit.

On apprend toutes sortes de recettes. J’ai encore les livres de recettes. Je me souviens même qu’en Corée j’ai dû… les pages se défaisaient. J’ai dû prendre une planche de bois et deux clous pour garder les pages ensemble. Mais on apprenait toutes sortes de recettes. La première chose qu’on apprenait à cuisiner c’était des sablés. C’était amusant. Bien souvent, c’est de la cuisine de bon sens. Bien que lorsque j’étais en Corée, il y avait là quelques soldats britanniques. Je devais remplacer dans un camp d’officier, et ils voulaient du pudding Yorkshire, mais je n’avais jamais mangé de pudding Yorkshire dans ma famille aux racines métisses. J’ai donc pensé… un pudding, c’est sucré. Alors j’y ai ajouté du sucre. Ces Anglais n’ont jamais autant ri avec un pudding Yorkshire.

Il y avait toujours approximativement 20 personnes en même temps, et parfois quatre. Ça dépendait de ce que je cuisinais et de combien d’hommes étaient présents, car cela variait. Les hélicoptères, nous étions le seul hôpital de la division, amenaient un ou deux patients toutes les deux ou trois heures. Les gens qui étaient simplement blessés étaient traités dans leurs propres camps. Les blessés graves étaient amenés par hélicoptère. Il y avait un homme, l’hélicoptère est arrivé et j’attendais que le repas cuise, et suis donc sorti pour accueillir l’hélicoptère, jamais seul, il y avait toujours quatre ou cinq personnes. La plateforme de l’hélicoptère n’était qu’à 20 mètres de là. Et j’ai vu le bras d’un homme sur le côté. Je me suis dit que j’allais prendre le bras et le mettre sous la couverture. Et lorsque j’ai saisi le bras, il m’est resté dans les mains. Il pendait, ne tenant que par la peau. C’était bien pire que la jambe. Mais je l’ai mis sur le dessus de la civière, et j’ai laissé les porteurs de civière l’amener rapidement à l’hôpital.

Les quarts de travail étaient longs, ils duraient parfois 12 heures. Tu cuisinais dans la journée et tu cuisinais le soir aussi à cause du changement de personnel. Les heures s’empiétaient. Ce n’était pas que les gens de notre camp qui venaient manger. La police militaire venait depuis différentes unités afin de manger. De choses comme ça.

La nourriture n’était pas variée. Et il y avait des camps américains tout près. J’ai rencontré ces Américains. Ils avaient le même bateau, et je leur ai demandé de voir s’ils avaient du Jell-O, et ils m’en ont donné. Les Américains mangeaient toujours mieux. Et j’avais besoin de congeler quelque chose, et le sang qui était dans l’ambulance était toujours branché à l’électricité pour le garder froid. J’ai mis le Jell-O là pour le refroidir et je me suis fait gronder: « Ne fais plus jamais cela, car ça change la température à l’intérieur! ». Ça a donc été la première et la dernière fois que nous avons eu du Jell-O.

Tu deviens un vétéran et tu penses à la camaraderie: nous avons partagé les mêmes expériences même si nous étions tous des étrangers au début. Nous sommes fiers de ce que nous avons fait. C’est encore plus fort quand on se retrouve.

*25e Brigade d’infanterie canadienne

**Poste de secours situé près de la zone de combat.

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