Le Monument aux anciens combattants autochtones a été inauguré en 2001 à Ottawa, pour commémorer les contributions des peuples autochtones du Canada pendant la Première Guerre mondiale, la Deuxième Guerre mondiale et la guerre de Corée. Le monument, une statue de bronze sur un socle de granit, a été créé par l’artiste autochtone Noel Lloyd Pinay de la Première Nation Peepeekisis en Saskatchewan. Le monument est situé dans le parc de la Confédération, juste en face de l’hôtel Lord Elgin. Il s’agit du premier monument consacré aux anciens combattants autochtones au Canada.

Création et développement
Le Monument aux anciens combattants autochtones est créé par le sculpteur et peintre Noel Lloyd Pinay de la Première Nation Peepeekisis, en Saskatchewan. Noel Lloyd Pinay est d’origine ojibwée des Plaines, crie des Plaines et sioux (Dakota). L’Association nationale des anciens combattants autochtones (devenue l’Association canadienne des vétérans et membres actifs autochtones) lui commande une statue de bronze commémorant les sacrifices et la bravoure des peuples autochtones dans les efforts de guerre du Canada lors de la Première Guerre mondiale, de la Deuxième Guerre mondiale, de la guerre de Corée, des conflits subséquents, ainsi que des opérations de maintien de la paix. ( Voir aussi Les peuples autochtones et les guerres mondiales.)
Noel Lloyd Pinay s’inspire du service militaire et de l’héroïsme de son père, Noel Joseph Pinay, qui a servi en tant que parachutiste dans l’Armée canadienne pendant la Deuxième Guerre mondiale. Il cherche également à attirer l’attention sur les sacrifices oubliés de son père et d’autres anciens combattants autochtones dans les guerres du Canada : « Ce monument est pour mon père et pour les autres anciens combattants autochtones qui ont été relégués à l’obscurité. Même s’ils ont accompli des choses exceptionnelles, ils semblent avoir été ignorés… Je considère qu’il s’agit là d’une injustice majeure. » En s’appuyant sur les conseils des aînés autochtones, Noel Lloyd Pinay veut rendre compte du rôle que les Premières Nations, les Métis et les Inuits ont joué dans « la défense du pays et la défense de la liberté » au cours du 20e siècle et par la suite.
Noel Lloyd Pinay est un fondeur expérimenté de statues en bronze, et il construit le monument de bronze et de granit de six mètres en plusieurs pièces dans son atelier des Prairies. Il expédie l’ensemble des pièces par train jusqu’à Ottawa, où elles sont assemblées et où la statue est officiellement dévoilée le 21 juin 2001, à l’occasion de la Journée nationale des Autochtones (maintenant la Journée nationale des peuples autochtones).
Signification et symbolisme
L’artiste Noel Lloyd Pinay crée le monument en utilisant des symboles traditionnels et des valeurs importantes pour sa culture autochtone. Par exemple, le chiffre quatre est très présent sur la statue, représentant les quatre saisons, les quatre directions et les quatre étapes de la vie. De plus, quatre esprits animaux sont représentés; un ours, un loup, un buffle et un wapiti. Ces animaux représentent les « guides spirituels » traditionnels autochtones. Noel Lloyd Pinay affirme que l’aigle royal de la sculpture représente « le messager entre le Créateur et l’homme », tandis que les quatre esprits animaux guident les guerriers dans leur quête de victoire sur le champ de bataille. L’aigle royal représente également l’oiseau-tonnerre, un symbole traditionnel du Créateur et de la Création. Il est assis au sommet de la statue, unissant et guidant ceux qui se trouvent dessous.
La sculpture comprend également deux figures masculines et deux figures féminines, qui représentent les nombreuses contributions des Autochtones hommes et femmes aux efforts de guerre et aux opérations de maintien de la paix du Canada. Dans leurs mains, ils tiennent des symboles de guerre et des objets spirituels, comme un éventail en plumes d’aigle et un calumet de paix, reconnaissant ainsi l’équilibre entre la paix et la guerre.
L’inscription sur le monument évoque le dévouement, la bravoure et le sacrifice des soldats autochtones au service du Canada depuis la Première Guerre mondiale :
« Plusieurs milliers d’Autochtones subirent de dures épreuves en participant à la Première et à la Deuxième Guerres mondiales ainsi qu’à la guerre de Corée. Ils servirent avec honneur et distinction dans tous les services et à tous les rangs, depuis celui de soldat à celui de brigadier. Ils livrèrent combat outre-mer pour défendre la souveraineté et la liberté des nations alliées, et ils appuyèrent cette cause au pays. Enfin, dans les opérations de maintien de la paix à l’étranger, ils continuent de faire preuve du même dévouement. »
Contributions autochtones aux guerres du Canada
Les soldats, les infirmières et les civils autochtones apportent d’immenses contributions aux guerres et aux opérations de maintien de la paix auxquelles le Canada participe au 20e et au 21e siècle. L’historien Timothy Winegard révèle que plus de 4000 Indiens inscrits, sur une population totale de seulement 103 774 personnes en 1914, servent dans le Corps expéditionnaire canadien pendant la Première Guerre mondiale. De plus, 4250 autres Indiens inscrits, dont 72 femmes, s’enrôlent lors de la Deuxième Guerre mondiale. Des centaines d’Indiens inscrits meurent sur les champs de bataille au cours des deux guerres mondiales, et de nombreux autres sont grièvement blessés, notamment Edwin Victor Cook, de la Première Nation ’Namgis, un soldat décoré et tué au combat en 1918.
Les chiffres ci‑dessus n’incluent pas les milliers de Métis, d’Inuits et d’Indiens non inscrits qui se portent volontaires et combattent dans les guerres du Canada au cours du 20e siècle, sans la moindre reconnaissance officielle de leur ascendance autochtone. En 1916, par exemple, un journal de Winnipeg note l’enrôlement dans le Corps expéditionnaire canadien de 30 soldats métis de Qu’Appelle en Saskatchewan. Un bon nombre de ces soldats sacrifient leur vie au combat, notamment deux tireurs d’élite, le Métis Henry Norwest et l’Inuit John Shiwak.
Comme leurs homologues des Premières Nations, les hommes et les femmes métis et inuits s’enrôlent pour plusieurs raisons, incluant pour leur loyauté au Canada, à la Couronne britannique, ou les deux; pour l’aventure; pour un emploi régulier et un salaire, qui sont presque inaccessibles pour la plupart des Autochtones; et pour le désir de raviver les traditions guerrières et la gloire de leurs ancêtres. Ils s’enrôlent malgré les persécutions et la discrimination dans leur pays, comme l’impossibilité de voter aux élections fédérales jusqu’aux années 1960. Ils combattent et meurent pour le Canada, mais ils ne bénéficient pas des mêmes privilèges et droits des citoyens canadiens qui sont accordés aux soldats canadiens non autochtones. (Voir aussi Droit de vote des peuples autochtones.)
Le saviez-vous?
Yann Castelnot, un historien amateur né en France et installé au Québec, a consacré deux décennies à rechercher les noms de plus de 154 000 soldats autochtones qui ont servi dans les forces armées canadiennes et américaines en temps de guerre, depuis les années 1890. Le travail de Yann Castelnot suggère que 14 800 Autochtones ont servi dans les Forces armées canadiennes au cours de la Première Guerre mondiale et de la Deuxième Guerre mondiale, soit des milliers de plus que les estimations précédentes. Inspiré par le travail de Yann Castelnot, le Fonds du Souvenir a lancé l’Initiative pour vétérans autochtones en 2019 afin d’identifier et de placer des pierres tombales sur les tombes anonymes des anciens combattants autochtones, ainsi que de pouvoir ajouter des noms traditionnels aux pierres tombales existantes.
Legs
Le Monument aux anciens combattants autochtones est le premier monument consacré aux anciens combattants autochtones qui ont combattu pour le Canada en temps de guerre, en plus de ceux qui participent aux nombreuses missions de maintien de la paix. En date de septembre 2022, on compte environ 5500 soldats autochtones dans les forces armées du Canada qui perpétuent une tradition de service militaire qui remonte à plus d’un siècle.