Norman Heide se remémore ses expériences du temps où il servait dans la Marine marchande pendant la Deuxième Guerre mondiale, des traversées de l’Atlantique aux rencontres inattendues et tragiques qu’il était possible de faire au milieu de l’océan pendant cette période agitée.
Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.
Transcription
Il y avait un dépôt des effectifs, ici à Vancouver. J’y suis allé et j’ai déposé une demande, et ils avaient besoin de cadets officiers pour en faire de futurs navigateurs. Donc j’ai été accepté et on m’a donné un bon de transport, et j’ai traversé le Canada d’un bout à l’autre en train, tout seul à l’âge de 16 ans. J’ai passé une nuit à Montréal et une nuit à Halifax et je me suis retrouvé dans un endroit qui s’appelait Hubbard en Nouvelle-Écosse et c’était un endroit qui assurait l’entraînement des aspirants navigateurs, etc. J’ai suivi une formation là-bas et j’ai fait le même trajet dans l’autre sens jusqu’à Vancouver et j’ai rejoint un navire au CFCP Quai B. Et on est partis de là avec un chargement de matériel militaire. Je ne sais pas trop de quoi il s’agissait et on a fait le voyage tout seul, dans le noir, en zigzag, jusqu’au canal de Panama, on a rejoint un convoi et on est allés jusqu’à Ward, New York. Et à partir de là, on a traversé en passant par le sud de l’Islande et du Groenland jusqu’en l’Angleterre, jusqu’à Liverpool en fait, et on a déchargé notre cargaison là-bas et on a refait la traversée pour aller en chercher davantage. Je me souviens toujours de la première fois après avoir dépassé le canal de Panama, on a rejoint un convoi dans les Caraïbes et on remontait, je crois que c’était au large de la Floride quelque part, un petit peu plus au nord. Je faisais le quart du matin avec le second de navire. Il était dans la salle des cartes. Et tout à coup, j’ai levé la tête pour regarder devant moi, et ça ressemblait à ces gros donuts noirs flottant sur l’eau. Et j’ai appelé le second de navire et je lui ai dit ça. C’était mon instructeur. Je lui ai dit, j’ai dit que ça ressemblait à de gros donuts noirs. Il est sorti, a regardé. Et le jour commençait juste à pointer. Et il s’agissait de pneus de camions militaires et il y avait des caissons et des boites et il s’exclame : « Oh! Il doit y avoir un navire qui a sombré récemment et ça devait faire partie de son chargement ». Et j’ai toujours remarqué que – plus tard, j’ai vu des cadavres flottant sur l’eau. Ceux qui portaient des gilets de sauvetage avec une espèce de truc autour du cou, ils étaient sur le dos avec les jambes et les bras écartés, la bouche ouverte. Et ceux qui n’avaient pas de gilets de sauvetage étaient sur le ventre. Étrange.