Ruth Werbin a servi dans le Service féminin de la Marine royale du Canada pendant la Deuxième Guerre mondiale.
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Transcription
Je m’appelle Ruth Charleton (mon nom de jeune fille). J’ai servi pendant la Deuxième Guerre mondiale dans le Service féminin de la Marine royale du Canada et j’en ai été l’une des principales rédactrices. À l’époque où je me suis enrôlée, j’étais motivée à la fois par le patriotisme et l’aventure. J’avais 20 ans. Je voulais m’éloigner de Winnipeg et découvrir le vaste monde qui nous entoure. Je me suis enrôlée au NCSM Chippawa à… Winnipeg en 1942. Un choix nous était donné. Nous pouvions être rédactrices, cuisinières ou autre. Au moment où je suis arrivée, on avait besoin de cuisinières et d’assistantes. Ce n’était pas ce que je voulais, par contre, j’avais bien indiqué vouloir être rédactrice. Je m’étais déjà familiarisée avec le travail de bureau et la sténographie. Dans mon travail de rédactrice dans le Service féminin de la Marine royale du Canada, je devais tout garder ce que j’apprenais pour moi vu que je faisais partie du service silencieux, que ce soit la perte de navires, les noms des navires ou les noms des bases. À un moment donné, j’avais une petite tâche, et nous nous rendions chaque jour sur le terrain de parade à Halifax pour détruire des messages secrets. Je me souviens avoir pris la chose très au sérieux. Je ne me souviens plus de ce que j’ai lu ce jour-là. J’ai simplement effacé de ma mémoire tout ce que j’ai pu lire sur ces télégrammes ou autres. Nous avions des réactions émotives quand nous apprenions la perte de l’un de nos navires ou de l’une de nos corvettes, même chose avec certains navires de la marine marchande. Nous étions au courant des nombreux bateaux perdus en 1943 et 1944. C’est surtout 1943 qui a été mauvaise vu les sous-marins allemands qui arpentaient la côte atlantique. Je me souviens encore très bien du moment où mon nom s’est retrouvé sur l’interphone pour que je me présente au bureau. Je m’y suis donc rendue au pas de course. Il y avait une file de marins, une vingtaine, je dirais. Un autre de nos navires avait coulé et quand j’étais derrière le comptoir à vérifier les noms de l’équipage de ce navire, un jeune homme de mon âge était là, vraiment énervé, affirmant avoir perdu ses parents et tout juste venir de perdre le seul frère qui lui restait en mer. Il y avait un comptoir entre nous et je sentais qu’il avait besoin d’une épaule pour pleurer et je ne pouvais rien faire d’autre que de prendre sa main. C’est un petit événement comme ça, mais c’est gravé dans ma mémoire. J’en suis devenue plus consciente de ce que je faisais, d’où j’étais et de qui j’étais. Je me suis rendu compte que je contribuais à l’effort de guerre. Je faisais quelque chose pour la guerre et j’en étais fière. J’ai pris conscience de la fierté que j’avais d’être dans le Service féminin et de pouvoir servir mon pays. Je pense que c’est à ce moment-là que j’ai commencé à me sentir canadienne.