Au cours du XIXe et, occasionnellement, du XXe siècle, les deux premiers genres pouvaient souvent constituer des ensembles complets de pièces propres à être exécutées comme suites de concert, indépendamment des oeuvres pour lesquelles elles avaient été composées. La musique de Mendelssohn pour Le Songe d'une nuit d'été de Shakespeare et celle de Grieg pour Peer Gynt d'Ibsen en sont des exemples caractéristiques. Le troisième genre de musique de scène décrit plus haut a été utilisé principalement pour des pièces à la radio, des films ou des émissions de télévision plutôt que pour des pièces au théâtre. (Voir aussi Film - Musique de.)
Au milieu du XXe siècle, alors que la musique de scène commença à être en demande au Canada, les compositeurs canadiens montrèrent peu d'intérêt pour la production de pièces formelles du genre traditionnel; les ouvertures écrites après le milieu du siècle étaient très brèves et la musique de transition, utilisée pour relier les scènes entre elles, se comptait en secondes plutôt qu'en minutes. Dans les premières années du XXe siècle, quelques compositeurs écrivirent de la musique de scène, notamment J.-J. Gagnier; Claude Champagne qui, en 1917, fit la musique pour Ils sont un peuple sans histoire du frère Marie-Victorin; Healey Willan, qui collabora à 14 productions du Hart House Theatre à Toronto durant les années 1920; George M. Brewer, qui collabora avec le Montreal Repertory Theatre dans les années 1930, de même que Clarence Lucas, qui n'écrivit pas de partitions complètes de musique de scène mais composa des ouvertures pour As You Like It, Macbeth et Othello. Plus tard au cours du siècle, maints compositeurs écrivirent de la musique pour des pièces de Shakespeare. Au cours des années 1940, Graham George composa la musique pour des productions de la Shakespeare Society of Montreal et Fraser Macdonald signa celles des productions shakespeariennes d'Earle Grey au Trinity College à Toronto. Le Festival de Stratford, en Ontario, a sans doute commandé plus de musique originale pour ses productions de pièces de Shakespeare et d'autres auteurs que n'importe quel théâtre au Canada - plus de 100 partitions entre 1953, année de son inauguration, et 1980. Au cours de ses 15 premières années d'existence, la plus grande partie de la musique de scène fut écrite par Louis Applebaum et John Cook. À la fin des années 1980, Applebaum avait contribué à plus de 50 productions. Après 1960, un nombre croissant d'autres compositeurs reçurent des commandes de Stratford, dont Michael Conway Baker, Berthold Carriere (plus de 40 productions en 1989), Gabriel Charpentier (de nombreuses partitions), Harry Freedman, André Gagnon, Gary Kulesha, Alan Laing, Loreena McKennitt, Raymond Pannell, Alan Rae, Godfrey Ridout, Stanley Silverman, Harry Somers et Morris Surdin. À Montréal, le Théâtre du Nouveau-Monde a commandé des partitions à Blackburn (Célimare le bien-aimé, 1952; Le Temps des lilas, 1958), Charpentier (Les Choéphores, 1962; Richard II, 1962; Klondike, 1965; Le Soulier de satin, 1967), Neil Chotem (Klondike, 1967), Rolland D'Amour (Philippe et Jonas, 1953), Andrée Desautels (Dom Juan, 1954), Laurent Jodoin (Le Corsaire, 1952) et Clermont Pépin (Le Malade imaginaire, 1956). Pépin a aussi écrit la musique de productions de la Compagnie canadienne du Théâtre-Club de Montréal (La Nuit des rois, 1957; L'Heure éblouissante, 1961; Le Marchand de Venise, 1964). Charpentier, un des compositeurs les plus prolifiques pour le théâtre au Canada, a signé un grand nombre de partitions pour de nombreuses compagnies dans tout le pays. À titre de dir. mus. du Crest Theatre à Toronto, puis du Neptune Theatre à Halifax, John Fenwick écrivit la musique de scène de plus de 30 productions. En 1964, Victor Davies fut dir. mus. et compositeur pour le Manitoba Theatre Centre de Winnipeg. Neil Harris, entre autres, a aussi composé de la musique pour cette compagnie au cours des années. À Toronto, Milton Barnes reçut des commandes du Crest Theatre de 1964 à 1966. Allan Rae a également écrit de la musique pour Theatre Calgary, la Vancouver Theatre Playhouse, le Theatre Passe Muraille à Toronto, le Festival Shaw et le CNA. En 1985, il devint compositeur résident de l'Alberta Theatre Projects, où il a écrit la musique pour plus de 10 productions. On a pu entendre la musique de scène de Quenten Doolittle durant des productions du CA Banff, du Toronto Free Theatre, du Young People's Theatre, ainsi que dans plusieurs théâtres de Calgary. Don Druick a composé, arrangé et dirigé la musique pour plusieurs théâtres de Vancouver. Christopher Donison et Roger Perkins ont composé de la musique de scène pour différentes pièces du Festival Shaw.
Parmi les autres compositeurs de musique pour des pièces de théâtre figurent John Beckwith (The Killdeer, 1959), Ginette Bellavance (Le Timide au palais, 1971; Dom Juan, 1972; Julien, Julien, 1973; Cyrano de Bergerac, 1974), Keith Bissell (Incidental Music to « The Centennial Play », 1967), Michael Century (pour le festival du CA Banff), J.-M. Cloutier (La Visite de la vieille dame, 1969; Les Troyens, 1971), Ron Collier (The Mechanic, 1965), Andrée Desautels (La Fille du soleil, 1946), Hector Gratton (Légendes aux étoiles, 1952), Ronald Hannah (A Sea Liturgy, 1986), Derek Holman (Pontiac and the Green Man, 1977), Laurent Jodoin (Tessa, v. 1950), Lothar Klein (plusieurs partitions pour des pièces de Shakespeare ainsi que pour Twin Menaechmi, 1951; The Bluebird, 1952; Marco Millions, 1953; The Bacchae, 1965), Alfred Kunz (Let's Make a Carol, 1965), Roger Matton, John Mills-Cockell (Memories of My Brother et Effect of Gamma Rays on Man-in-the-Moon Marigolds, 1972; Comedy of Errors, 1989), André Prévost (Électre, 1959), Don Ross (Ecstasy of Rita Joe, 1989; Dreaming Beauty, 1990; Big Buick City, 1991), Manus Sasonkin (The Duenna, 1978), Jean Sauvageau, Owen Underhill (Suicide in B-flat, 1984) et Charles Wilson (John Fibber, 1970). La musique de scène de John Roby pour Theatre of the Film Noir a gagné un Dora Award en 1981. Norma Beecroft, Robert Fleming, Harry Freedman, William McCauley et Jean Papineau-Couture ont écrit de la musique pour des pièces de théâtre de marionnettes. Harry Somers a composé la musique de Vibrations (1978), oeuvre présentée par le Canadian Mime Theatre au Festival Shaw.
La SRC a commandé une quantité considérable de musique de scène pour la radio et la télévision, non seulement pour des pièces et des séries mais aussi pour des documentaires, des émissions de variétés et des jeux-questionnaires. John Weinzweig fut un pionnier à cet égard. Il a commencé en 1941 et a écrit la musique de plus de 100 oeuvres dramatiques pour la radio. D'autres collaborateurs à ce genre, durant les années 1940, furent Ernest Dainty, Gordon Fleming, Hector Gratton, Quentin Maclean, Barbara Pentland, Michel Perrault, Morris Surdin et Arnold Walter. Gratton écrivit la musique pour la série « Je me souviens », textes de Félix Leclerc, et composa la musique d'une production radiophonique de Maria Chapdelaine. Surdin, un des compositeurs de radio parmi les plus actifs, écrivit plus de 150 partitions (1950-72) pour la série « Jake and the Kid » et nombre d'autres pour les séries « CBC Stage », « CBC Playhouse » et « Adventure Theatre ». Jean Vallerand a écrit la musique de quelque 100 pièces pour la radio de la SRC, y compris celles présentées dans les séries « Radio-Collège » et « Sur toutes les scènes du monde ». Lucio Agostini écrivit pour « CBC Stage », « CBC Wednesday Night » et « Ford Theatre ». Il a été le seul compositeur à écrire pour la série de télévision « Front Page Challenge ». Alexander Brott écrivit des partitions pour la série radiophonique « Playhouse Theatre ». Neil Chotem composa la musique de scène de plusieurs présentations de Rupert Caplan à la radio de la SRC (The Dybbuk, The World's Illusion, The Trial, A Tribute to Eugene O'Neill) et des séries « The Iliad » et « The Odyssey » (1948-50).
En plus d'être un compositeur de musique de scène pour le théâtre, Applebaum a été un collaborateur important dans le domaine des productions de radio et de télévision. Pour la télévision, Frank Haworth composa pour les séries « Mr. O » et « Old Testament Tales » et Claude Léveillée pour les téléthéâtres Des souris et des hommes, L'Échéance du vendredi, Millionnaire à froid et Le Pélican. William McCauley composa et dirigea la musique pour la série « The Whiteoaks of Jalna » (1972) et Harry Somers signa les partitions pour la série « Images of Canada » (1972-75). John Mills-Cockell et Ricky Hyslop (ce dernier à la fois à Vancouver et Toronto) ont écrit la musique de nombreux programmes et feuilletons télévisés à la SRC et la CTV. On a pu entendre la musique de Clive A. Smith dans le film d'animation pour la télévision The Devil and Daniel Mouse de Nelvana (1978). Phil Schreibman (qui fut compositeur résident du Toronto Free Theatre) composa la musique de la série « Seeing Things », télédiffusée à la SRC (1980-87, 43 épisodes). En plus d'écrire la musique de beaucoup de productions et d'émissions de la SRC (entre autres, « Ken Dryden's Home Game », « Private Capital »), Eric Robertson a contribué à 40 épisodes du téléroman de la SRC « Street Legal » et à la coproduction BBC-CTV « OWL-TV ». On retrouve le nom de John Welsman derrière la musique de la télésérie « Road to Avonlea », et Richard Grégoire a signé la partition de « Les Filles de Caleb ». Patricia Cullen (1951-1991) écrivit de la musique pour un certain nombre de productions et de séries télévisées, y compris « The Edison Twins » et « Care Bears ». Parmi les autres compositeurs pour la télévision de la SRC se trouvent Gaston Brisson, Lloyd Burritt, André Gagnon, François Morel (L'Heureux stratagème), Antoine Padilla (Un mois à la campagne) et Georges Savaria (Yerma et La Maison de Bernarda). Ron Collier, Victor Davies, Samuel Dolin, Phil Nimmons, Robert Turner et Elliot Weisgarber ont écrit de la musique de scène à la fois pour la radio et la télévision.
Même si les coûts de commande, de répétition et d'exécution de la musique de scène ont toujours été élevés, aucun moyen de remplacement plus économique ou aussi efficace n'a pu être trouvé : le pouvoir d'évocation de la musique reste sans rival. Il est vrai que les partitions de musique électroacoustique permettent d'éliminer certains frais d'exécution, mais elles occasionnent d'autres types de dépenses et ne doivent être considérées que comme un prolongement, et non un remplacement, du genre. Il est clair que la musique de théâtre continuera d'exister tant qu'il y aura du théâtre. De tous les arts, le théâtre est le plus directement dépendant des réactions de son public. S'il a sa faveur, il prospère; s'il ne suscite que son indifférence, il sombre. Au Canada - à Stratford, au Théâtre du Nouveau-Monde et ailleurs, là où le théâtre s'épanouit - le rôle clé que joue la musique de scène dans le théâtre à succès a été reconnu. En 1991, alors que le théâtre - à la scène, à la radio, à la télévision ou au cinéma - était devenu partie intégrante de la vie canadienne, la composition de musique de scène et de musique de fond s'imposait comme un important domaine de l'activité du compositeur canadien. Pour certains, elle constituait en fait l'essentiel de leur gagne-pain.