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Ouest-de-l'Île

L’Ouest-de-l’Île est une dénomination à caractère non officiel qui représente aujourd’hui le tiers le plus à l’ouest de l’île de Montréal, majoritairement périurbain. Des suites de sa suburbanisation, la région a une histoire, une culture et une identité proches de celles de Montréal. Toutefois, comme certaines des municipalités qui constituent l’Ouest-de-l’Île se sont développées séparément de Montréal et qu’une grande partie de la communauté québécoise d’expression anglaise y est aujourd’hui concentrée, la région a des inclinations politiques, culturelles et sociales distinctes du reste de la région métropolitaine de Montréal et du Québec en général. L’Ouest-de-l’Île est principalement composé de villes-dortoirs qui se sont formées au milieu du 20e siècle. On y trouve également de grands quartiers industriels, l’aéroport international de Montréal, de grands parcs-nature et plusieurs établissements d’enseignement uniques, dont le campus Macdonald de l’Université McGill, un campus réservé aux sciences agricoles.


Frontières

Bien qu’il n’y ait pas de définition précise de l’Ouest-de-l’Île, ce dernier englobe généralement les banlieues du tiers le plus à l’ouest de l’île de Montréal et la municipalité de L’Île-Bizard. Il a comme limites naturelles le lac Saint-Louis au sud, le lac des Deux-Montagnes à l’ouest et la rivière des Prairies au nord. La frontière est de l’Ouest-de-l’Île, qui le sépare du reste de Montréal, suit habituellement, du nord au sud, l’autoroute 13 du Québec, l’autoroute 520 du Québec (l’autoroute de la Côte-de-Liesse) et la 55e Avenue, cette dernière séparant la municipalité indépendante de Dorval de la municipalité voisine, l’arrondissement montréalais de Lachine. L’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau, l’infrastructure routière qui lui est associée et le parc industriel qui l’entoure occupent une grande partie de cette limite.

Municipalités de l’Ouest-de-l’Île

Sont généralement considérées comme faisant partie de l’Ouest-de-l’Île les municipalités de Senneville, Sainte-Anne-de-Bellevue, Baie-d’Urfé, Beaconsfield, Pointe-Claire, Dorval, L’Île-Dorval, Sainte-Geneviève, Pierrefonds, Kirkland, Roxboro, L’Île-Bizard et Dollard-des-Ormeaux. Les arrondissements de Montréal que sont Lachine, LaSalle et Saint-Laurent y sont parfois greffés. La ville de L’Île-Dorval, une petite municipalité de chalets saisonniers qui n’est accessible que par traversier depuis Dorval hors hiver, est également considérée comme faisant partie de l’Ouest-de-l’Île.

Tout au long du 20e siècle, les municipalités de l’Ouest-de-l’Île sont toutes restées indépendantes. En 2000, le gouvernement du Québec a adopté des changements législatifs imposant la réorganisation des municipalités de toute la province, notamment la fusion forcée de toutes les municipalités indépendantes de l’Ouest-de-l’Île avec la ville de Montréal. C’est une décision qui a créé des remous chez les habitants de l’Ouest-de-l’Île, ce qui a conduit à l’organisation de référendums de défusion en 2004 qui sont ressortis gagnants pour 8 des 13 municipalités de l’Ouest-de-l’Île. Les municipalités de Pierrefonds, Roxboro, Sainte-Geneviève et L’Île-Bizard n’ont pas réussi à atteindre le quorum de taux de participation et sont donc restées dans la ville de Montréal, mais elles ont été réorganisées en arrondissements de Pierrefonds-Roxboro et L’Île-Bizard–Sainte-Geneviève.

Certaines banlieues situées encore plus à l’ouest à l’extérieur de l’île, par exemple Vaudreuil-Dorion, Pincourt et Hudson, sont aussi parfois intégrées dans l’Ouest-de-l’Île.

Bâtiment blanc avec un panneau sur lequel on peut lire « Baie-d’Urfé ».

Histoire

Présence autochtone

Les travaux archéologiques menés un peu partout sur l’île de Montréal et dans la région métropolitaine de Montréal indiquent que des peuples autochtones ont vécu et chassé et sont passés régulièrement dans la région à diverses époques depuis au moins 5 000 ans. Les Iroquoiens du Saint-Laurent auraient vécu sur l’île de Montréal entre l’an 1000 et la fin du 16e siècle.

17e siècle

Tout comme la ville de Montréal, l’histoire européenne de l’Ouest-de-l’Île remonte au milieu du 17e siècle. Environ 25 ans après l’établissement de Ville-Marie en 1642, l’explorateur français René-Robert Cavelier, sieur de La Salle, se voit accorder une seigneurie dans la partie ouest de l’île de Montréal. Peu de temps après, un poste de traite est établi, lequel deviendra plus tard la municipalité de Lachine. La municipalité adjacente de LaSalle est nommée en son honneur. Le plus ancien bâtiment intact de l’île de Montréal est la maison Le Ber-LeMoyne, située dans le quartier de Lachine et construite vers 1669-1671. D’autres colonies voient le jour pendant la période coloniale française à Pointe-Claire et à Sainte-Anne-de-Bellevue, colonies qui deviendront d’importantes haltes sur la route de la traite des fourrures entre Ville-Marie et l’intérieur du Canada. L’expansion de la colonie française de Ville-Marie continue vers l’ouest et donne naissance à des villages agricoles tels que Dorval et Beaurepaire (plus tard Beaconsfield).

Deux affrontements d’importance ont lieu dans l’Ouest-de-l’Île au cours des guerres franco-iroquoises. Dans la première, les Haudenosaunee attaquent la colonie de Lachine, le massacre de Lachine, le 5 août 1689. La deuxième, la bataille du Lac-des-Deux-Montagnes, a lieu le 16 octobre 1689; c’est une attaque en représailles contre une patrouille haudenosaunee. La bataille se déroule sur le territoire de l’actuelle municipalité de Senneville.

18e siècle

La colonisation de la partie ouest de l’île de Montréal augmente sérieusement en intensité après la Grande Paix de Montréal en 1701 qui met fin aux guerres franco-iroquoises. Une fois la paix établie, la colonisation peut se poursuivre à l’extérieur des fortifications de Ville-Marie ou de ses nombreux comptoirs et avant-postes. Le moulin à vent de Pointe-Claire, devenu depuis le symbole de la ville, est érigé vers 1709-1710. Le tracé d’une partie du Chemin du Roy, aujourd’hui appelée le boulevard Gouin, voit le jour au début du 18e siècle. En 1717, un territoire, la Côte-Sainte-Geneviève, est établi le long de la limite nord de l’Ouest-de-l’Île et va de la paroisse de Saint-Laurent à l’est jusqu’à Senneville à l’ouest. Il devient officiellement une paroisse en 1641. Une église paroissiale est établie à Sainte-Geneviève au milieu du 18e siècle, laquelle est remplacée par une autre en 1843, qui subsiste encore aujourd’hui.

Les fortifications de ce qui allait devenir le fort Senneville sont construites en 1686, à l’extrémité ouest de l’île de Montréal, pour défendre les colonies contre les attaques des Premières Nations depuis la rivière des Outaouais. Le fort est incendié lors d’une attaque des Haudenosaunee en 1691 et, en 1692, il est reconstruit avec des murs et des tours en pierre. Le fort est détruit par le général des États-Unis Benedict Arnold en 1776 pendant la Révolution américaine. Les ruines du fort subsistent aujourd’hui, mais elles se trouvent sur un terrain privé.

Au milieu du 18e siècle, les avant-postes de l’Ouest-de-l’Île datant du 17e siècle s’étaient transformés en villages agricoles, et toutes les terres avaient été divisées et concédées aux colons. En 1834, les principales routes de la région, dont beaucoup servent encore aujourd’hui, sont tracées. L’Ouest-de-l’Île restera principalement agricole jusqu’au milieu du 20e siècle. De nombreux lieux de l’Ouest-de-l’Île arborent encore aujourd’hui les noms des grandes familles agricoles de la région : Robillard, Brunet, Meloche, Legault, Jasmin.

19e siècle

Les transports connaissent au 19e siècle un essor qui redessine complètement l’Ouest-de-l’Île. Il y a tout d’abord le canal de Lachine, ouvert en 1825, lequel relie le port de Montréal sur le fleuve Saint-Laurent au lac Saint-Louis pour que les navires puissent contourner les rapides de Lachine et accéder aux Grands Lacs. En 1855, le chemin de fer se prolonge aussi jusque dans l’ouest de Montréal. Les cartes d’affectation des sols de l’Ouest-de-l’Île indiquent que le Grand Trunk Railway traverse la région en 1879. Il est suivi peu après du chemin de fer du Canadien Pacifique (CP), qui emprunte le même corridor. Ce dernier est toujours utilisé par la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) et le CP. L’arrivée du canal et du chemin de fer transforme le paysage de l’Ouest-de-l’Île, les terres agricoles laissant leur place à des quartiers résidentiels dans un processus qui s’étale toutefois sur un siècle.

En 1865, le futur premier ministre John Abbott achète un domaine à Senneville : c’est probablement le premier Montréalais fortuné à acheter un terrain dans l’Ouest-de-l’Île dans le but d’y construire une résidence d’été.

20e siècle

Après la Première Guerre mondiale, un hôpital pour anciens combattants est bâti à Sainte-Anne-de-Bellevue. L’hôpital prend de l’expansion après la Deuxième Guerre mondiale avec notamment la construction d’un pavillon (à Senneville) pour la rééducation et la convalescence des anciens combattants souffrant du trouble de stress post-traumatique. Un complexe hospitalier moderne ouvre ses portes en 1971.

Le collège Macdonald est fondé à Sainte-Anne-de-Bellevue en 1907. Associé à l’Université McGill, il est d’abord un collège agricole avec une école d’économie domestique ainsi que la School for Teachers de McGill (qui deviendra la faculté des sciences de l’éducation). Le collège Macdonald gardera ces fonctions alors que les bâtiments utilisés par la faculté des sciences de l’éducation sont loués pour la création du Cégep John Abbott au début des années 1970, qui les rachètera en 2002. Premier cégep (collège d’enseignement général et professionnel) de l’Ouest-de-l’Île, le Cégep John Abbott, a été nommé en l’honneur d’Abbott. C’est aujourd’hui le plus grand établissement d’enseignement de l’Ouest-de-l’Île.

Beaucoup de familles parmi les plus nanties de Montréal ont construit des résidences d’été dans l’Ouest-de-l’Île et ont apporté de l’argent pour la création de clubs privés, de terrains de golf et de clubs sportifs (navigation de plaisance, curling).

Le développement résidentiel se poursuit dans les dernières décennies du 19e siècle sur la rive nord de l’Ouest-de-l’Île. Une colonie d’été est aménagée dans les secteurs de Cartierville et de Saraguay, dans ce qui deviendra plus tard l’arrondissement de Saint-Laurent. La tendance ne s’essouffle pas avant le milieu du 20e siècle, alors que la suburbanisation résidentielle prend le dessus dans le développement de l’Ouest-de-l’Île. Les transports continuent aussi leur développement au point de donner un tout nouveau cachet à l’Ouest-de-l’Île, lui qui passe d’une zone rurale et en grande partie agricole à une zone résidentielle. Est notamment digne de mention la construction du Chemin de fer Canadien du Nord (plus tard le CN) qui traverse la ville de Mont-Royal, Saint-Laurent, et ce qui deviendra plus tard les municipalités de Dollard-des-Ormeaux, Roxboro et Pierrefonds. L’aéroport de Dorval, qui deviendra le principal aéroport international de Montréal, voit le jour pendant la Deuxième Guerre mondiale et est agrandi à la fin des années 1950 et au début des années 1960, à peu près en même temps que la construction des autoroutes 20 et 40. Les nouvelles routes donnent le feu vert à la suburbanisation de l’Ouest-de-l’Île, un processus qui s’étale de la fin de la Deuxième Guerre mondiale jusqu’aux premières décennies du 21e siècle. L’aéroport et les autoroutes 20 et 40 encouragent également l’arrivée d’industries qui occupent l’Ouest-de-l’Île sur toute sa longueur.

21e siècle

En 2019, Montréal annonce ses plans pour le Grand parc de l’Ouest, un projet d’unification de plusieurs parcs-nature et espaces verts de l’Ouest-de-l’Île en un seul grand parc contigu occupant environ 30 kilomètres carrés. Le projet de parc pourrait aussi englober des terrains de banlieues défusionnées ainsi que des terrains privés non aménagés (comme l’Arboretum Morgan, une réserve forestière de 245 hectares appartenant à l’Université McGill et située à Sainte-Anne-de-Bellevue). Si le projet est réalisé dans son intégralité, ce sera le plus grand parc urbain du Canada.

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