Paul Franklin Watson, militant de l’environnement, auteur et vedette de téléréalité (né le 2 décembre 1950 à Toronto, en Ontario). Paul Watson, fondateur de la Sea Shepherd Conservation Society (SSCS), est une figure pionnière, à l’origine de nombreux débats, au sein du mouvement pour la conservation de l’environnement. Il est connu surtout pour ses campagnes fortement médiatisées de protection de la vie marine. Sa doctrine controversée d’« action directe » implique à l’occasion des tactiques agressives, voire violentes. Il a remporté de nombreux prix. En 2000, le magazine Time l’a nommé l’un des héros de l’environnement du XXe siècle. Cependant, il a également passé du temps en prison, et ses nombreux détracteurs le considèrent comme un milicien et un écoterroriste.
Jeunesse et influences
Paul Watson naît à Toronto, en Ontario, mais grandit à St. Andrews-By-The-Sea, au Nouveau-Brunswick. Il est l’aîné de sept enfants; ses parents sont Anthony Joseph Watson et Annamarie Larsen.
Son amour de la mer et son désir de protéger les animaux se développent très tôt. Dans son livre Seal Wars, il raconte comment, tout jeune, il a perdu son « meilleur ami », un castor sauvage du nom de Bucky qui a probablement été capturé et tué. Paul Watson, pour venger sa perte, résout alors de détruire tous les pièges à animaux qu’il trouve. Le guerrier écologiste, tel qu’il se définit lui-même plus tard, apparaît donc avant même l’école secondaire.
La mère de Paul Watson meurt en 1964, alors qu’il n’est âgé que de 13 ans. Peu de temps après, son père déménage à Toronto avec la famille. Dans son livre Ocean Warrior, Paul Watson se remémore qu’« à un très jeune âge, [il] s’enfuit vers la mer pour devenir marin », se joignant à la Garde côtière canadienne en 1968, en Colombie-Britannique; il embarque dès l’année suivante sur un cargo norvégien qui lui fait visiter des « ports exotiques ». De retour sur la côte ouest, il se met à écrire pour la publication alternative Georgia Straight et se joint à une manifestation pour empêcher les essais nucléaires américains en Alaska en naviguant à proximité de la zone prévue pour le test. (La manifestation reporte les essais, qui seront plus tard annulés.)
Greenpeace
Paul Watson affirme qu’il est l’un des membres fondateurs du groupe de défense de l’environnement Greenpeace, ce que l’organisation nie par la suite. Il ne fait cependant aucun doute qu’il était l’un des premiers membres de Greenpeace, créée en 1971, pour protester contre les essais nucléaires états-uniens en Alaska. Toutefois, une âpre dispute avec le conseil d’administration quant à ses méthodes militantes le pousse à quitter, non sans amertume, le conseil d’administration de Greenpeace en 1977. La longue querelle qui s’ensuit, il les appelle moqueusement les « scoutes du mouvement écologiste », et eux en retour le traitent de terroriste, a mené Greenpeace à nier la moindre implication de Paul Watson dans la création de l’organisation.
Action directe
Selon Paul Watson, sa confiance en des tactiques plus militantes aurait été déclenchée par un événement précis en 1975, alors qu’il fait encore partie de Greenpeace. Les manifestations de l’époque sont toujours non violentes, inspirées par les protestations pacifiques de l’activiste Mohandas Gandhi. En 1975, Paul Watson et d’autres membres de Greenpeace confrontent un baleinier soviétique au large de la côte californienne, servant de boucliers humains entre les harpons et les baleines. Dans Captain Paul Watson: Interview with a Pirate, il raconte avoir vu le capitaine du bateau soviétique le regarder en passant son doigt sur son cou, comme s’il menaçait de l’égorger : « C’est là que j’ai compris que la méthode de Gandhi ne fonctionnerait pas pour nous. »
Par conséquent, il abandonne le concept de manifestation pacifique et élabore une doctrine basée sur l’action directe; il s’agit essentiellement d’une déclaration de guerre contre tout ce qu’il considère être de l’exploitation ou du braconnage illégaux. Des moyens tels que l’utilisation de grenades fumigènes ou de bombes puantes, ou encore percuter violemment d’autres navires, sont vus comme acceptables.
Sea Shepherd Conservation Society
En 1977, après sa « rupture » avec Greenpeace, Paul Watson fonde la Sea Shepherd Conservation Society (SSCS) pour protéger la vie marine. Il a longtemps soutenu que son engagement, à la fois envers la vie marine et l’action directe, provient d’une expérience partagée avec une baleine agonisante pendant l’opération de Greenpeace contre les baleiniers soviétiques, en 1975. Dans un article paru dans le Guardian, Paul Watson se souvient d’avoir établi un lien existentiel avec la baleine, qui aurait aisément pu écraser la petite embarcation, mais aurait décidé de ne pas le faire après l’avoir regardé dans les yeux:
Je me suis senti redevable envers elle, pour m’avoir épargné.
Mais j’ai perçu autre chose dans son regard: de la pitié.
Elle était désolée, non pour elle et ses semblables, mais pour nous…
C’est ce que j’ai vu dans l’œil de cette baleine qui m’a poussé à dévouer toute ma vie adulte à la défense des baleines et des autres créatures de la mer.
Dans son poème « Planet of Whales », il écrit : « L’œil solitaire du Léviathan me hante. / Je suis obsédé, affolé par la colère. »
La SSCS, par conséquent, se veut « l’organisation la plus agressive, la plus déterminée et la moins ouverte aux compromis du monde ». Le logo de l’organisation est une version modifiée du Jolly Roger, le pavillon pirate, orné d’un bâton de berger. La publicité est l’un des principaux outils de la SSCS : « Charger un baleinier n’est simplement pas utile si on ne peut pas le raconter », explique Paul Watson dans Ocean Warrior. « Dans une culture des médias comme la nôtre, une chose ne s’est pas réellement produite tant qu’elle n’a pas été diffusée. »
Percuter le Sierra
En 1979, Paul Watson et le Sea Shepherd (un vieux chalutier de la mer du Nord) trouve et rattrape le Sierra, un tristement célèbre chalutier pirate, au large de la côte portugaise. Selon les estimations du défenseur de l’environnement Nick Carter, le Sierra aurait décimé plus de 25 000 baleines au fil de ses traversées de l’océan, changeant fréquemment de nom pour éviter d’être repéré. Paul Watson percute le Sierra, causant de sérieux dommages. Le bateau se met péniblement à l’abri à l’intérieur des limites de la marine portugaise et doit faire l’objet de réparations majeures à Lisbonne, au Portugal. Selon la SSCS, « le Sierra a été coulé à quai par une seule mine limpet ayant un peu perforé la coque », le 6 février 1980.
L’incident fait de la SSCS une vedette médiatique, confirmant la théorie de Paul Watson selon laquelle les médias internationaux seraient attirés par la confrontation violente et aideraient à faire connaître leur cause à travers le monde.
Contre vents et marées
Depuis 1979, la société continue d’œuvrer un peu partout dans le monde. En 2015, le site Web de la SSCS affiche une liste d’environ deux douzaines d’opérations, passées ou en cours, ayant pour but de protéger sept espèces marines différentes : le thon rouge, le phoque, le lion de mer, la baleine, la tortue, le dauphin et le requin, sans oublier les récifs coralliens.
Dans Captain Paul Watson: Interview with a Pirate, Paul Watson affirme qu’il a « affronté les Japonais, les Soviétiques, les Norvégiens, les Féroïens, les Maltais, les Espagnols, les Cubains, les Canadiens, les Américains, les Australiens, les Équatoriens, les Costaricains, les Taïwanais, les Islandais, les Anglais, les Irlandais, les Sud-Africains, les Français, les Mexicains, les Namibiens, les Italiens, les Tunisiens et même les Makahs, une tribu autochtone ». Il ne fait pas de concession, même lorsqu’il s’agit de méthodes de pêche traditionnelle ou des droits des peuples autochtones, s’étant opposé aux Makahs de l’État de Washington et à leur chasse à la baleine. Il a également déclaré : « Je n’ai rien à faire des origines ethniques, de la culture, de la nationalité ou du sexe de quiconque détruit la vie marine… Je ne pratique aucune discrimination dans mon opposition à ceux qui manœuvrent des machines mortelles. »
Chasse aux phoques canadienne
Paul Watson est surtout connu au Canada pour son opposition virulente à la chasse aux phoques, pratiquée sur la côte Est. Sa campagne audacieuse commence à l’époque où il est encore membre de Greenpeace, avec des événements ingénieusement destinés à attirer l’attention médiatique, qui deviendront plus tard sa marque de commerce révolutionnaire.
Paul Watson décrète que la chasse aux phoques au harpon est le plus important massacre de mammifères marins au monde. Il affronte les chasseurs une première fois en 1976 et de nouveau en 1977; il se lance alors dans la mêlée armé d’une rhétorique implacable, de nombreuses caméras et de l’actrice française Brigitte Bardot. Ses tactiques se révèlent redoutablement efficaces : des images de cette chasse autrefois peu connue provoquent l’indignation générale, ce qui mène à plusieurs boycottages internationaux des produits canadiens dérivés du phoque et de la mer.
Lorsque quatre chasseurs de phoque coulent avec leur navire, en 2008, Paul Watson fait une déclaration publique, reconnaissant que la mort de ces hommes est une tragédie, mais affirmant aussi que « Le massacre de centaines de milliers de bébés phoques est un désastre encore plus important… [les chasseurs de phoques] sont des tueurs malfaisants qui quémandent maintenant la sympathie sous prétexte que quelques-uns d’entre eux ont été tués pendant qu’ils pratiquaient une activité brutale et cruelle. » Ces affirmations ont poussé la chef du Parti vert, Elizabeth May, à se retirer du conseil consultatif de la SSCS.
En 2015, quatre décennies après sa première incursion, Paul Watson déclenche de nouveau une furieuse controverse en attaquant le chanteur vedette Rod Stewart sur les médias sociaux; ce dernier avait posé pour une séance photo pendant laquelle il portait un manteau en peau de phoque, alors qu’il se trouvait à Terre-Neuve.
Whale Wars
La campagne de Paul Watson contre les baleiniers japonais aura sans nul doute été sa plus intense. Le Japon soutient que sa chasse est légale selon l’exemption de la Commission baleinière internationale pour la « recherche létale » menée à des fins scientifiques, ce que Paul Watson voit comme une manière de camoufler la chasse à la baleine industrielle. La chaîne Animal Planet commence donc en 2008 à diffuser Whale Wars, montrant des captures vidéo dramatiques de missions menées par la SSCS contre les chalutiers japonais en Antarctique. Les épisodes ont des titres tels que « Lutte à mort », et une voix dramatique, au souffle court, narre l’introduction : « La guerre fait rage dans les régions les plus reculées de la Terre… [Les baleiniers et les bergers de la mer] affirment tous deux agir selon la loi. Voici leurs combats. Voici leur guerre. » Les critiques ont souligné la subjectivité de ces représentations, qui ne se soucient guère de montrer le point de vue des Japonais.
Problèmes légaux
Malgré que la majorité de la couverture médiatique soit sympathique à sa cause, Paul Watson et la SSCS ont essuyé des revers légaux devant les tribunaux. En 1997, par exemple, il est arrêté par la police néerlandaise près d’Amsterdam pour avoir tenté de couler un bateau norvégien en 1992; il passe alors 80 jours en prison. En 2008, la Gendarmerie royale du Canada saisit le Farley Mowat, bateau de la SSCS, pour avoir tenté de perturber une chasse aux phoques.
En 2012, les autorités allemandes, munies d’un mandat international délivré par le Costa Rica, arrêtent Paul Watson pour avoir tenté de provoquer un naufrage, une offense grave qui peut entraîner une sentence de 15 ans de prison. Relâché en résidence surveillée après un mois derrière les barreaux, il prend la fuite et passe les 15 mois suivants à la mer pour éviter les poursuites. Il vit désormais à Paris, en France, malgré qu’il figure sur la liste des fugitifs internationaux d’Interpol. Il a lancé une pétition contre le Costa Rica, soutenu en cela par la Commission interaméricaine des droits de l’homme.
En juin 2015, la SSCS est surprise à enfreindre une injonction de la Cour des États-Unis en s’approchant à moins de 457 mètres d’un baleinier japonais; elle est donc obligée de payer une amende de 2,55 millions de dollars américains.
Famille
Paul Watson a eu quatre épouses, toutes actives au sein du mouvement de protection des animaux (l’une d’entre elles étant également un mannequin pour Playboy). Il a épousé sa quatrième femme, Yana Rusinovich, le jour de la Saint-Valentin 2015 à Paris, en France. Il a une fille, Lilliolani Paula Lum Watson, née en 1980.
Prix et récompenses
Courage exceptionnel dans le domaine de la protection des animaux, Fund for Animals (1979)
Prix pour l’ensemble de son œuvre, Ark Trust (1998)
Prix du compagnon de la Terre, Earth Society Foundation (1999)
Prix du « point de lumière » quotidien de George H. W. Bush, Points of Light (1999)
Nommé l’un des 20 plus grands héros de l’environnement du XXe siècle, Time (mai 2000)
Grand Prix à Paul Watson et à la SSCS pour la meilleure organisation, SPEAK (Supporting and Promoting Ethics for the Animal Kingdom) (2001)
Défenseur de l’environnement de l’année, Orangutan Foundation (2001)
Introduit au U.S. Animal Rights Hall of Fame (2002)
Médaille d’or pour son service humanitaire, Winsome Constance Kindness Trust (2007)
Prix du guerrier de la faune, zoo d’Australie (2008)
Défense de la vie marine, Asociación de Amigos del Museo de Anclas Philippe Cousteau (2010)
Outstanding Commitment2Action, Humanity4Water (2010)
Médaille de l’Étoile Polaire Jules Verne Aventures (2012)