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Projet d'expansion du pipeline Trans Mountain

Le projet d’expansion du Trans Mountain Pipeline est un projet de construction d’environ 980km de nouvelles canalisations, dont la plupart seront parallèles à l’oléoduc Trans Mountain existant. Le nouveau tracé permettrait d’acheminer du bitume dilué, ou «dilbit», depuis Edmonton, en Alberta, jusqu’à Burnaby, en Colombie-Britannique, faisant passer la capacité du réseau de pipelines de 300 000 barils par jour à 890 000 barils par jour.

Le premier propriétaire du projet, Kinder Morgan Canada, vend le projet au gouvernement du Canada en 2018. Bien qu’elle continue d’être le sujet de débats environnementaux et économiques, ainsi que de conflits politiques, l’expansion de Trans Mountain, évaluée à 12,6 milliards de dollars, est actuellement en construction.

Construction du projet d'expansion de Trans Mountain

Des ouvriers posent des canalisations pour une section du projet d’expansion de Trans Mountain dans la grande région d’Edmonton.

Contexte

L’unité canadienne de la compagnie pétrolière et gazière Kinder Morgan propose l’expansion de Trans Mountain en 2012. Le pipeline Trans Mountain est construit en 1953, et Kinder Morgan Canada en devient le propriétaire en 2005. La société défend alors l’expansion de son réseau de pipelines existant, arguant qu’elle fait partie d’un vaste effort visant à exporter plus de pétrole canadien vers la région de l’Asie pacifique par l’intermédiaire du Westridge Marine Terminal à Burrard Inlet, Burnaby. Selon Kinder Morgan, le Canada gagnerait 3,7 milliards de dollars supplémentaires chaque année en expédiant de plus grandes quantités de pétrole par-delà l’océan Pacifique (par rapport à la vente de pétrole aux États-Unis).

En 2014, des douzaines de manifestants sont arrêtés sur le mont Burnaby pour avoir tenté d’entraver les travaux d’arpentage du pipeline. En 2016, afin de restaurer la confiance du public dans le processus d’examen environnemental, le gouvernement fédéral intervient en désignant une commission pour évaluer le projet. Cette étape était distincte de l’examen de l’Office national de l’énergie. En 2016, le projet est approuvé.

Carte du projet d'expansion de Trans Mountain

La ligne orange représente le nouveau pipeline; la route existante est en noir et brun.

Différend commercial entre la Colombie-Britannique et l’Alberta

Au début de 2018, un différend commercial éclate entre la Colombie-Britannique et l’Alberta au sujet du projet. Le gouvernement de John Horgan a en effet proposé d’interdire l’augmentation du transport du bitume de l’Alberta vers la côte ouest. Il devait s’agir d’une interdiction temporaire pendant que la province demande d’autres consultations sur les risques posés par les déversements de pétrole. Rachel Notley, première ministre NPD de l’Alberta, qualifie l’interdiction d’inconstitutionnelle et déclare qu’elle bafoue les accords commerciaux en place. Elle riposte en freinant temporairement l’importation de vin de Colombie-Britannique en Alberta. Le conflit se poursuit et s’exacerbe jusqu’au printemps, et l’Alberta vote une loi qui pourrait empêcher ses exportations de pétroles actuelles d’atteindre la Colombie-Britannique. Cette dernière répond à la menace par une poursuite en justice.

Le saviez-vous?
Plus de 150 activistes anti-pipeline, incluant la chef du Parti vert Elizabeth May et le député fédéral du NPD Kennedy Stewart, sont arrêtés en mars 2018 pendant des manifestations aux installations de Kinder Morgan à Burnaby. (Un ordre de la Cour suprême de la Colombie-Britannique empêche les manifestants d’approcher à moins de cinq mètres des zones de construction de deux terminaux de la société à Burnaby.)

La société Kinder Morgan, elle, fait entendre qu’elle devra abandonner le projet d’expansion si elle ne reçoit pas, d’ici le 31 mai, « de la clarté quant à la voie à suivre » et de quoi rassurer ses investisseurs. Le premier ministre fédéral Justin Trudeau, souffrant d’énormes pressions de la part des chefs d’entreprise canadiens pour faire construire le pipeline, interrompt un voyage à l’étranger pour se rendre à une rencontre d’urgence avec John Horgan et Rachel Notley. Parallèlement, le gouvernement fédéral promet d’indemniser Kinder Morgan pour les pertes financières résultant des retards de construction.

Manifestation contre le pipeline Trans Mountain
La police arrête une manifestation lors du rassemblement contre l’expansion du pipeline Trans Mountain dans le parc du mont Burnaby, le 20 novembre 2014.

Acquisition par le gouvernement canadien

L’impasse entre la Colombie-Britannique et l’Alberta se poursuit à l’approche de la date limite de Kinder Morgan Canada. Deux jours avant la date limite, le gouvernement fédéral annonce qu’il achètera le pipeline existant pour 4,5 milliards de dollars et qu’il cherchera de nouveaux investisseurs pour achever le projet d’expansion. Tandis que Rachel Notley et certains chefs d’entreprise célèbrent cette décision, des politiciens de tout le spectre politique la qualifient de mauvaise utilisation de l’argent des contribuables. Certains opposants au projet, quant à eux, voient l’entente comme un échec : celle-ci, en effet, ne parvient ni à inspirer confiance aux investisseurs ni à résoudre les problèmes politiques qui affligent le projet. D’autres critiques encore y voient une trahison des engagements des libéraux à l’égard de la cause environnementale et des droits des Autochtones.

Approbation renversée

Les six Premières nations, la ville de Vancouver, la ville de Burnaby et deux groupes environnementaux intente une action juridique contre le projet d’expansion de Trans Mountain, après que celui-ci a reçu l’approbation du gouvernement en 2016. En août 2018, la Cour d’appel fédérale conclut alors que le gouvernement a manqué à son devoir de s’engager dans un « dialogue constructif et fructueux » auprès des Premières Nations quant à l’expansion. Elle conclut également que l’Office national de l’énergie n’avait aucunement le droit d’exclure l’expédition maritime de sa définition du projet. Cela signifie que l’ONE a failli à ses obligations de la Loi sur les espèces en péril. La Cour déclare également que l’ONE devra proposer des mesures pour atténuer l’impact du trafic des navires pétroliers sur les épaulards. Cette décision a pour effet de renverser l’approbation de l’expansion, en plus de contraindre le gouvernement fédéral à revoir certains aspects du processus de consultation et d’approbation du projet.

Don Iveson, maire d’EdmontonNaheed Nenshi, maire de Calgary, et Jason Kenney, chef du Parti conservateur uni, manifestent ouvertement leur déception quant à cette décision. De son côté, la première ministre Rachel Notley annonce l’intention de l’Alberta de se retirer du plan national de tarification du carbone jusqu’à ce que le gouvernement fédéral mette en place des conditions propices à la réalisation de l’expansion.

Le jour suivant la publication de la décision de la Cour d’appel fédérale, Kinder Morgan Canada vend le pipeline et son projet d’expansion au gouvernement.

Terminal portuaire Westridge

Vue aérienne du terminal portuaire Westridge à Burnaby, en Colombie-Britannique. Photo prise en novembre 2019.

Deuxième approbation

En février 2019, l’ONE publie un nouveau rapport d’examen sur le projet d’agrandissement, suivant l’ordonnance de réévaluation émise par la Cour d’appel fédérale l’année précédente. L’Office recommande une fois de plus l’approbation du projet, déterminant qu’il est dans l’intérêt national. L’ONE présente au gouvernement 16 nouvelles recommandations concernant la prise de mesures visant à « atténuer, éviter ou réduire les effets de la navigation maritime associée au projet ».

Le Cabinet du premier ministre Trudeau approuve l’agrandissement pour une deuxième fois en juin 2019.

État actuel

Le gouvernement, ayant l’intention de vendre le projet, se tourne principalement vers les investisseurs autochtones. La construction a repris en août 2019 et est en cours dans les terminaux, les stations de pompage et les sections du tracé en Alberta et en Colombie-Britannique.

Mots clés : Projet d'expansion de Trans Mountain

Bitume

Mélange d’hydrocarbures noir et épais extrait de la terre ou formé pendant le processus de traitement du pétrole.

Bitume dilué (« dilbit »)

Bitume dilué avec des pétroles plus légers afin qu’il puisse couler dans les pipelines.