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Ruben Cusipag

Ruben Javier Cusipag, journaliste, militant social (né le 12 juillet 1938 à Paco, à Manille; décédé le 9 juillet 2013 à Markham, en Ontario). Il était un pionnier du journalisme philippino-canadien. Il a contribué à de nombreux journaux et a été le rédacteur en chef fondateur du Atin Ito, l’un des plus anciens journaux philippins du Canada, et le fondateur du journal Balita basé à Toronto. Ruben Cusipag a également coécrit Portrait of Filipino Canadians in Ontario (1960-1990) (1993). (Voir aussi Communauté philippine au Canada.)

Ruben Cusipag
Ruben Cusipag, 23 décembre 1987.
(photo par Rick Eglinton/Toronto Star sur Getty Images)

Formation et début de carrière

Ruben Cusipag est le fils de Salvador Cusipag père et de Josefa « Nenita » Protaira Javier. Il fréquente l’école secondaire Araullo High School où il s’intéresse très tôt au journalisme, devant rédacteur en chef du journal de l’école au cours de sa dernière année. Il entre ensuite à l’Université des Philippines où il suit un cours spécial de journalisme sous la direction d’Armando Malay, journaliste et militant.

Dans les années 1960, avant même d’obtenir son baccalauréat, il commence à travailler au journal Manila Evening News, d’abord comme correcteur, puis comme reporter. Il rédige également la chronique hebdomadaire « Between Deadlines » du Manila Evening News et la chronique « Sun Spots » du Philippine Sun, sa publication sœur.

En 1972, il commence à travailler comme reporter policier pour le Taliba, l’un des quotidiens philippins de l’éditeur du Manila Times. Cependant, lorsque le président de l’époque, Ferdinand Marcos, déclare la loi martiale en septembre 1972, Ruben Cusipag fait partie des premiers écrivains et journalistes arrêtés et emprisonnés sous la dictature de Marcos. Soupçonné de subversion, il est détenu 67 jours au quartier général de la police nationale philippine. Le 1er décembre 1972, il figure parmi les premiers détenus libérés par le gouvernement. La presse étant censurée, il n’a d’autre choix, à sa libération, que de devenir spécialiste en communication à la General Electric Philippines.

Carrière au Canada

En raison de la situation politique aux Philippines, Ruben Cusipag s’expatrie. (Voir aussi Immigration au Canada.) Il arrive à Toronto avec sa famille en septembre 1974. Il travaille comme rédacteur au Newfoundland Signal, un journal hebdomadaire qui s’adresse aux habitants des Maritimes et des Terre-Neuviens (voir Provinces maritimes; Terre-Neuve-et-Labrador). Ruben Cusipag travaille également pour différents journaux communautaires, contribuant ainsi à l’essor de la presse multiculturelle ou ethnique. (Voir aussi Multiculturalisme.) À compter de 1974, il est embauché par le Philippine Times, basé à Chicago, comme chef du bureau de Toronto. De 1974 à 1975, il est correspondant spécial à l’étranger au Canada pour le Bulletin Today (maintenant exploité sous le nom de Manila Bulletin), un journal grand format quotidien philippin. Il rédige également des articles pour le Philippine Tribune, un journal mensuel torontois qui cesse ses activités en mai 1975.

Atin Ito

En décembre 1976, Ruben Cusipag cofonde Atin Ito: Philippine News Feature. Atin Ito, qui signifie « ceci est à nous », est publié à Toronto et conçu par Ruben Cusipag et des membres de sa fraternité universitaire comme un média de la Pilipinas Credit Union (voir Coopératives de crédit). L’homme d’affaires, Eduardo « Eddie » Lee devient éditeur du Atin Ito et Ruben Cusipag, son rédacteur en chef. Après quelques publications, Ruben Cusipag, qui rédige des commentaires politiques, démissionne en raison de divergences d’opinions politiques et de visions pour le journal.

Balita

Ruben Cusipag fonde le Balita en août 1978. Balita, qui signifie « nouvelles » en langue philippine, se distingue par sa position politique et par ses efforts pour rendre compte de la situation des droits de la personne aux Philippines. Les premiers numéros du Balita paraissent sous forme de magazine, puis en format tabloïde. Publié deux fois par mois, le journal voit son lectorat s’étendre à la communauté philippine de la région du Grand Toronto et de Hamilton (voir Communauté philippine au Canada).

Ruben Cusipag agissant à titre d’éditeur et de rédacteur en chef du Balita, le journal bénéficie à la fois de sa vaste expérience et de ses qualités de reporter chevronné. Ses articles sont parfois publiés sous forme de chronique dans le Toronto Star. Sous sa direction, le journal devient également un moyen d’amasser des fonds pour venir en aide aux victimes de catastrophes aux Philippines.

Dans les années 1990, le journal commence à se pencher sur des histoires locales concernant les Philippins au Canada, en particulier sur le sujet des travailleurs domestiques. S’inspirant d’entrevues et d’anecdotes déjà publiées dans le Balita et d’autres journaux, Ruben Cusipag coédite avec Maria Corazon Buenafe, Portrait of Filipino Canadians in Ontario (1960-1990) (1993). Le livre fournit un éclairage précieux sur les réussites et les difficultés des immigrants philippins au Canada au XXe siècle. (Voir aussi Immigration au Canada.)

Le 17 décembre 2001, Ruben Cusipag devient un membre fondateur du Philippine Press Club of Ontario, une organisation basée à Toronto qui représente les groupes de médias philippins canadiens. Il est par la suite nommé éditeur émérite du Balita.

Militantisme social

Ruben Cusipag s’intéresse activement aux nombreux problèmes auxquels se heurte la Communauté philippine au Canada entre les années 1970 et le début des années 1990. Tout en travaillant comme journaliste à Toronto, il édite et publie le livre de l’ancien président philippin Diosdado Macapagal, Democracy in the Philippines (1976). Le manuscrit original est introduit clandestinement au Canada et distribué secrètement, car il critique le président de l’époque, Ferdinand Marcos, et la loi martiale aux Philippines.

Ruben Cusipag participe également à de nombreuses organisations, telles que la Canada-Philippines Friendship Society (1975), un groupe politique de militants contre la dictature. Avec sa première épouse, Fely Villasin, il intègre également l’International Association of Filipino Patriots (1977), qui soutient le mouvement démocratique national aux Philippines.

De 1978 à 1985, Ruben Cusipag est directeur général fondateur du Comité de travail Canada-Asie (CTCA), une coalition interéglises qui milite en faveur des droits de la personne et de la justice sociale en Asie. Il joue un rôle clé dans le développement de son périodique trimestriel, Canada Asia Currents, qui paraît pour la première fois en 1978. Avec le CTCA, il rend compte des questions touchant les droits de la personne à la délégation canadienne dans le cadre de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies à Genève (voir Nations Unies).

Ruben Cusipag cofonde également plusieurs groupes communautaires. En juillet 1977, il participe à la création du Kababayan Community Service Centre, un organisme de bienfaisance basé à Parkdale (voir Toronto). Kababayan (qui signifie compatriote) se veut un espace de ressources pour les nouveaux immigrants philippins. Le centre étend ses programmes culturels à d’autres collectivités. En 1989, Ruben Cusipag devient aussi membre fondateur de la Markham Federation of Filipino Canadians. Il fait la promotion du patrimoine culturel philippin et mobilise d’autres groupes à Markham, Ontario.

Vie personnelle et décès

En 1992, Ruben Cusipag épouse Teresita Abesamis. Quatre ans plus tard, le 24 juillet 1996, il est gravement blessé dans un accident impliquant une voiture et un piéton. Cet accident le laisse partiellement paralysé et l’oblige à se déplacer en fauteuil roulant. Sa femme devient son aide-soignante et prend la direction du Balita.

Ruben Cusipag décède le 9 juillet 2013, trois jours avant son 75e anniversaire, à l’hôpital Markham Stouffville.