Article

Siège du fort Oswego (Chouaguen)

Le siège du fort Oswego s’est déroulé en août 1756, pendant la guerre de Sept Ans. Lors de sa première campagne en sol d’Amérique, le marquis de Montcalm et les troupes françaises réussissent à capturer facilement les forts Oswego et Ontario des défenseurs britanniques. La bataille constitue le premier siège de style européen livré par les Français en Amérique du Nord.

A map showcasing the area where the battle took place

Contexte stratégique

Dès la fin du 17e siècle, les autorités coloniales françaises établissent des forts autour du lac Ontario. L’objectif est de protéger l’accès à Montréal et de renforcer les liens diplomatiques avec les peuples autochtones, notamment par le commerce des fourrures. (Voir Traite des fourrures au Canada.)

Au début des années 1720, le lac Ontario retient également l’attention des marchands britanniques, qui souhaitent commercer avec les Haudenosaunee. Les Britanniques érigent une installation temporaire dans le secteur de la rivière Oswego, au sud-est du lac. Les peuples autochtones vont fréquenter ce poste, délaissant les postes français. À partir de 1727, les Britanniques construisent le fort Oswego, à l’ouest de la rivière, ce qui rend la présence britannique sur les rives du lac Ontario permanente.

Outre le commerce des fourrures, les Britanniques voient aussi des avantages géostratégiques à ce fort : il coupe l’accès des Français à Albany, deuxième ville en importance dans la colonie de New York et il pourrait permettre de lancer une attaque contre le fort Niagara.

Afin de renforcer leur position stratégique et de pallier les faiblesses du premier fort, les Britanniques érigent deux autres forts à proximité : les forts Ontario et George. Le fort Ontario est situé du côté est de la rivière Oswego, tandis que le fort George s’élève plus à l’ouest du fort Oswego.

Projet de Vaudreuil

Depuis 1755, le gouverneur de la Nouvelle-France, Pierre de Rigaud de Vaudreuil de Cavagnial, ambitionne de se débarrasser de la menace que représentent les trois forts pour la colonie. En 1756, le gouverneur choisit l’offensive. Mais avant d’attaquer, il souhaite affaiblir la position britannique.

En mars 1756, un détachement détruit le fort Bull, qui sert de relais pour l’approvisionnement d’Oswego. En juin, un autre détachement établit un poste de ravitaillement dans la baie de Niaouré, à mi-chemin entre les forts Frontenac et Oswego.

Du côté britannique, la garnison des trois forts, sous le commandement du lieutenant-colonel James Mercer, compte environ 1 700 hommes. Toutefois, cela ne compense pas la piètre conception et la faible artillerie des forts.

Du côté français, en ce début de mai 1756, le marquis Louis-Joseph de Montcalm vient d’arriver en Amérique avec des renforts. Vaudreuil lui soumet son plan de campagne. Après une diversion réussie des troupes françaises au lac George, Montcalm se dirige vers le lac Ontario. Il est attendu au fort Frontenac pour prendre la tête d’une armée d’environ 3 000 hommes, dont 250 alliés autochtones.

Premier siège à l’européenne

Un ingénieur militaire est envoyé à proximité d’Oswego à la fin juillet pour observer le site. Il dresse un plan des forts et détaille les travaux de siège à effectuer. Pour la première fois en Amérique du Nord, un siège à l’européenne sera livré par les Français.

À partir du 5 août, l’armée française se déplace de nuit sur le lac Ontario afin de ne pas éveiller les soupçons des Britanniques. La stratégie est efficace, puisque les militaires débarquent le 10 août à proximité d’Oswego, à l’est du fort Ontario, sans avoir attiré l’attention de l’ennemi.

Le 11 août, les Français ont déjà érigé une batterie sur la plage où ils ont accosté. Les Britanniques, qui ont découvert la présence française, tentent de la détruire avec leur flotte, en vain. Les Français poursuivent leur avancée vers le fort Ontario durant la journée. Des troupes composées de miliciens canadiens et d’alliés autochtones harcèlent et effraient les occupants du fort. Les 12 et 13 août, ils construisent une batterie de canons, malgré le feu soutenu de l’artillerie britannique. Puis, vers 16 h, le 13 août, les canons britanniques se taisent. Quelques heures plus tard, un guerrier autochtone se porte volontaire pour s’approcher des murs du fort Ontario. Les Français constatent que la garnison l’a abandonné. L’artillerie française n’a pas tiré un seul boulet sur le fort.

Dans la nuit du 13 au 14 août, les Français construisent une nouvelle batterie afin d’atteindre le fort Oswego. Tôt le matin du 14, les Français ouvrent le feu. Un duel d’artillerie s’engage. Vers 9 h, un boulet de canon fauche le commandant James Mercer. Une heure plus tard, le fort Oswego capitule. C’est une première victoire en Amérique pour Montcalm.

Les termes de la capitulation sont discutés : les honneurs de guerre sont refusés aux Britanniques. Montcalm considère que l’ennemi n’a pas opposé de résistance honorable. Tous les soldats de la garnison britannique sont faits prisonniers de guerre. Le butin est composé de pièces d’artillerie, de munitions, de vivres et de navires, qui serviront au transport des captifs. Le siège a fait peu de morts et de blessés des deux côtés.

Les alliés autochtones ne considèrent pas qu’ils sont liés aux termes de la capitulation. Les Français ne les ont pas consultés lors de la négociation. Ils vont s’en prendre aux malades et aux blessés, ainsi qu’aux hommes ivres et à ceux qui tentent de s’enfuir. Environ moins d’une centaine de Britanniques auraient péri ou été faits prisonniers dans ces circonstances. Bien que les Autochtones soient alliés avec les Français, leur guerre est parallèle à celle des Européens. Elle ne va pas à l’encontre des visées françaises, mais elle privilégie l’atteinte d’objectifs autochtones. (Voir Siège du fort William Henry.)

Le 20 août, Montcalm quitte Oswego pour rejoindre Montréal, après avoir rasé les forts et avoir laissé le port et son chantier naval inutilisables.

Conséquences

La victoire française permet de maintenir les liens commerciaux et les alliances diplomatiques entre les Français et les nations autochtones des Grands Lacs. La France, en ce début de guerre de Sept Ans, espère pouvoir compter sur ses alliés pour venir grossir ses troupes coloniales ou pour rester neutres dans ce nouveau conflit contre son voisin britannique. La campagne de 1757 bénéficiera de cette bonne entente ― environ 1 000 guerriers de ce que l’on appelle à l’époque les Pays d’en Haut y participeront. (Voir Siège du fort William Henry.)

;

Lecture supplémentaire

  • Dave Noël, Montcalm, général américain (2018).