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Soldats noirs au Canada au 19e siècle

Les soldats noirs ont servi dans des unités militaires tout au long du 19e siècle au Canada. Bien que certains commandants (blancs) refusaient les volontaires noirs, ceux-ci servaient dans la milice dans des unités intégrées et dans des unités de soldats noirs comme le Coloured Corps à Niagara, le Victoria Pioneer Rifle Corps en Colombie-Britannique et le Victoria Rifles à Halifax, en Nouvelle-Écosse. Les soldats noirs servaient en temps de paix et lors d’événements majeurs tels que la guerre de 1812 et les rébellions de 1837-1838.

Richard Pierpoint

Milice sédentaire et volontaire

De 1800 à 1867, on impose à tous les hommes un service obligatoire dans la « milice sédentaire ». (Voir Lois de Milice et Histoire des Forces armées au Canada.) Dans le Haut-Canada/Canada-Ouest, ainsi que dans le Bas-Canada/ Canada-Est, les hommes noirs peuvent servir dans leur milice locale au sein d’unités intégrées. Ce n’est pas le cas en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick, où les hommes noirs doivent servir dans des unités ségréguées rattachées au régiment local. Les régiments de « milice sédentaire » ne défilent que deux fois par année. Les citoyens mettent également sur pied des unités de volontaires pour ceux qui souhaitent obtenir un entraînement supplémentaire. Le service dans ces unités de volontaires n’est pas rémunéré, et ce sont les officiers qui en choisissent les membres. Quelques hommes noirs sont acceptés dans des unités intégrées, mais il existe également des unités de volontaires noirs tout au long du 19e siècle. La communauté noire de Sandwich, par exemple, forme un corps de milice volontaire en 1826.

Guerre de 1812

Pendant la guerre de 1812, les hommes noirs servent dans des unités intégrées et dans une unité formée exclusivement de soldats noirs, du nom de Coloured Corps. La mise sur pied de cette unité est proposée juste avant la guerre par Richard Pierpoint, une personne noire, anciennement réduite en esclavage et soldat noir ayant autrefois servi dans les Butler’s Rangers, une unité loyaliste, pendant la Révolution américaine. Sir Isaac Brock, un général, rejette l’idée au premier abord, mais se ravise après l’occupation américaine de Sandwich (Windsor) le 12 juillet 1812. L’unité est autorisée le 28 août, le commandement étant confié au capitaine Robert Runchey, un officier blanc du 1er régiment de la milice de Lincoln.

D’abord connu sous le nom de « Captain Runchey’s Company of Colored Men », le groupe combat à la bataille des Hauteurs-de-Queenston le 13 octobre 1812. Après quelques escarmouches initiales, les Colored Men tirent une volée avant de se lancer contre les forces américaines. Après cette bataille, le Coloured Corps nouvellement renommé est stationné à Fort George. Lorsque les Américains débarquent près de Fort George le 27 mai 1813, ces soldats se précipitent sur la plage et combattent les assaillants à une distance de moins de 10 m, subissant cinq pertes sur seulement 27 hommes de la compagnie. En 1814, l’unité, convertie en unité de génie, participe à la construction de Fort Mississauga. Le Coloured Corps est dissous le 24 mars 1815.

Black Soldier

Les miliciens noirs servent également dans des unités intégrées, parfois dans des compagnies distinctes. Le 104e régiment d’infanterie du Nouveau-Brunswick est un régiment britannique recruté localement. Les pionniers du régiment, ou ingénieurs, sont tous des soldats noirs. Lorsque le 104e régiment parcourt la distance séparant Fredericton de Kingston de la mi-février à la mi-avril 1813, ce sont les pionniers noirs qui ouvrent la voie, préparant les camps où les troupes devront passer la nuit lorsque d’autres hébergements ne sont pas disponibles. Le 104e régiment est actif dans tout le Haut-Canada en 1813 et en 1814. Le régiment peinant à recruter suffisamment de soldats pour grossir ses rangs, les pionniers noirs sont vraisemblablement poussés au combat. Au moins un soldat noir du 104e régiment d’infanterie est transféré dans un bataillon de vétérans en raison de blessures et de fatigue.

Au Bas-Canada, les Voltigeurs de Québec enrôlent au moins neuf soldats noirs de Montréal. Certains s’engagent avant la déclaration de guerre des États-Unis. En octobre 1814, l’un d’entre eux est promu au rang de sergent, un fait inhabituel pour les Noirs dans les unités intégrées de l’époque. Plusieurs de ces soldats noirs sont de la bataille de Châteauguay le 26 octobre 1813. Au moins trois hommes noirs servent en outre dans la milice d’élite au Bas-Canada.

Rébellion de 1837-1838

Pendant la rébellion de 1837-1838 dans le Haut-Canada, les hommes noirs font partie d’unités intégrées et forment également leurs propres unités de soldats noirs autorisées, qui sont généralement dirigées par des officiers blancs. Les premières unités de soldats noirs sont autorisées en décembre 1837, mais sont dissoutes en février 1838, lorsque s’éloigne la menace rebelle. Sept autres compagnies composées de Noirs sont autorisées en octobre 1838 lorsque s’intensifie l’activité des rebelles. La plupart de ces unités sont dissoutes en avril 1839.

Comme pour les compagnies composées de Blancs, la tâche principale de ces unités consiste à faire le guet à proximité d’éléments vitaux tels que les ponts, bien qu’elles participent occasionnellement à des combats. Cinquante soldats noirs contribuent à vaincre une force rebelle débarquée non loin de Windsor le 3 décembre 1838. Un autre « Coloured Corps » servant notamment de police dans les années 1840 pendant la construction du deuxième canal Welland sera, parmi les compagnies de soldats noirs, celle qui demeurera en service le plus longtemps. Cette compagnie est finalement dissoute à la fin avril 1850.

L’une des unités de soldats noirs les plus notables est dirigée par Josiah Henson et rattachée au 2e régiment d’Essex. La compagnie de Henson participe à l’attaque de la goélette rebelle Anne, aidant ensuite à protéger Fort Malden de Noël jusqu’en mai 1838. Contrairement au Coloured Corps, la compagnie de Henson n’est pas officiellement autorisée en tant qu’unité de soldats noirs.

Unités de volontaires noirs

Au lendemain de la rébellion de 1837-1838, les unités de volontaires deviennent la principale forme de service dans la milice au Haut-Canada/ Canada-Ouest. Les volontaires sont mieux formés et plus efficaces, bien que la milice sédentaire demeure la forme approuvée jusqu’à l’adoption de la Loi de Milice de 1854 (le Nouveau-Brunswick suit en 1862). Dans les années 1850, le lieutenant-gouverneur du Canada-Ouest approuve la formation d’unités de volontaires noirs. En 1852, une unité de milice noire d’Amherstburg se voit « accorder le droit de progression » lors de la parade du Jour de l’émancipation à Windsor. La même année, cependant, une foule composée de Blancs attaque un défilé de miliciens noirs à St. Catharines, puis s’en prend aux biens des Noirs un peu partout dans la ville.

En avril 1860, un groupe d’immigrants noirs de Californie forme le Victoria Pioneer Rifle Corps sur l’île de Vancouver. Cette unité est largement considérée comme la première unité militaire britannique ou canadienne formée à l’ouest de l’Ontario. Elle reçoit l’approbation du gouverneur James Douglas en 1860, mais est dissoute en 1865 après que le gouverneur suivant, Arthur Edward Kennedy, déclare qu’il n’acceptera aucune unité militaire basée sur la classe, la couleur ou la nationalité.

Victoria Pioneer Rifle Corps

Une autre unité de volontaires noirs est mise sur pied à Halifax, en Nouvelle-Écosse, le 4 février 1860. Les Victoria Rifles sont au nombre des unités de volontaires qui défilent lors de la visite du Prince de Galles à Halifax en août cette année-là. (Voir Tournées royales au Canada et 10 tournées royales mémorables au Canada.) Bien que les Rifles fassent preuve d’une grande habileté et soient décrits dans la presse locale comme étant très bien organisés, ils sont dénigrés par les chefs de la milice blanche et d’autres notables de la communauté. L’unité est dissoute en 1864.

Raids des Fenians, 1866

Entre 1866 et 1871, la Fraternité feniane, un mouvement indépendantiste irlandais, lance une série d’attaques armées de faible envergure au Canada. Le 2 juin 1866, la Milice canadienne vient à bout des Fenians à la bataille de Ridgeway. Après cet événement, une unité de volontaires noirs de St. Catharines escorte les prisonniers fenians pendant le voyage en train qui les emmène vers une prison à Brantford. Les volontaires se voient alors confier deux responsabilités : d’une part, ils doivent empêcher les prisonniers de s’échapper; de l’autre, ils doivent les protéger de la population locale le long du trajet entre la gare et la prison.

De la Confédération à la Première Guerre mondiale

La Loi de Milice canadienne de 1868 s’appuie sur des régiments de volontaires comme base du service militaire. Si la loi n’interdit pas l’enrôlement d’hommes noirs, de nombreux commandants rejettent quand même les volontaires noirs. Ceux qui sont acceptés servent dans les régiments officiels de la milice canadienne. De nombreux soldats noirs qui participent à la Première Guerre mondiale ont autrefois servi dans ces régiments ou ont des parents qui l’ont fait. (Voir aussi Volontaires noirs dans le Corps expéditionnaire canadien.) On recense également quelques régiments de volontaires noirs dans le Canada post-Confédération, bien que ceux-ci ne fassent pas officiellement partie des forces militaires du pays. Windsor, par exemple, dispose d’une milice volontaire noire – qui se présente d’ailleurs à un défilé de la fête du Travail en 1897 –, qui n’a pas été sanctionnée par le gouvernement. De telles unités s’inscrivent dans une longue histoire de service militaire volontaire par les hommes noirs au Canada.