Le Corps des guides était une unité militaire canadienne à cheval. Créé en 1903, c’est l’ancêtre de la branche des services du renseignement des Forces armées canadiennes. Il n’a pas été déployé en Europe pendant la Première Guerre mondiale, mais nombre de ses volontaires ont laissé leur marque dans l’histoire.

Contexte : guides dans l’armée britannique
Le concept de corps de guides typique de la tradition militaire britannique trouve son origine dans les guerres napoléoniennes du début du 19e siècle. Pendant la campagne d’Espagne, le duc de Wellington met sur pied une force spécialisée de cavaliers légers pour les missions d’éclairage, de reconnaissance et de cartographie. L’unité est dissoute après la guerre, mais l’idée reste bien vivante. Les forces à cheval sont ensuite actives au Canada lors des raids des fenians et de la rébellion du Nord-Ouest. Des Canadiens servent d’éclaireurs sous commandement britannique lors de la guerre des Boers en Afrique du Sud au début du 20e siècle.
Création du Corps des guides
C’est lord Dundonald qui a l’idée d’un corps de guides pour le Canada en 1902, après sa nomination à titre d’officier général commandant de la milice canadienne. Il avait combattu pendant la guerre des Boers et avait donc été témoin du recours à des éclaireurs. Le 1er avril 1903, le Corps des guides est officiellement créé au Canada. Les ordonnances établissent une compagnie de guides dans chacun des 12 districts militaires du Canada, sous le commandement d’un officier de renseignement de district. Les guides étaient des cavaliers spécialisés qui connaissaient parfaitement le terrain, les routes et les chemins de traverse de leur district. Le Corps avait une branche d’information à l’étranger, mais le gros de son activité portait sur la défense du Canada en cas d’attaque ou d’insurrection transfrontalière.
Le major William Denny, un autre ancien combattant en Afrique du Sud, a été nommé premier directeur général du renseignement militaire à Ottawa. Beaucoup d’autres membres de la première heure auront d’ailleurs acquis de l’expérience en Afrique du Sud et dans la rébellion du Nord-Ouest. Les membres du Corps étaient des soldats à temps partiel, des membres de la milice et donc des membres à part entière de la population de leur district. Bien des recrues venaient dans la pratique des grandes villes où était concentré le Corps. Les candidats devaient passer une série d’épreuves théoriques et pratiques, notamment l’art de monter à cheval, pour être recrutés. L’instruction était normalement donnée en été et comportait des volets d’arpentage, de croquis militaire, de reconnaissance et de tâches des officiers de renseignement.

Rôle du renseignement
En 1906, l’armée britannique avait retiré ses officiers des quartiers généraux canadiens et ses soldats des fortifications canadiennes. Elle voulait ainsi procéder à une remise graduelle du devoir de défense du pays entre les mains de la milice canadienne. Le Canada a développé son armée en suivant le modèle britannique, dans lequel les officiers de renseignement étaient des militaires de profession, qui étaient cependant en tellement petit nombre qu’il était impossible de faire passer les officiers de branches telles que celles de l’artillerie ou du génie au renseignement. Il a donc été décidé que les officiers de renseignement viendraient du Corps des guides, ses membres ayant reçu une instruction sur l’arpentage, les croquis et la reconnaissance. Si une division canadienne était envoyée à la guerre, c’était le Corps des guides qui fournissait le gros du personnel de renseignement. Le Corps est resté une unité de cavaliers, mais le travail de renseignement est vite devenu un objectif secondaire important (voir aussi Renseignement et espionnage).
Outre l’entraînement sur le terrain, l’association du Corps se réunissait chaque année pour discuter de ce qui se passait au sein de l’unité et de sujets d’actualité militaire. En 1911, par exemple, Charles H. Mitchell fait une présentation sur la navigation aérienne en temps de guerre qui aborde les répercussions de l’avion sur la façon de faire la guerre. Lors de la réunion annuelle de février 1914, des conférences sont proposées sur les techniques de renseignement et sur les guerres balkaniques (1912-1913).

Première Guerre mondiale
Lorsque la division canadienne est mobilisée à Valcartier à l’automne 1914, de nombreux membres du Corps se portent volontaires pour le service actif. Cependant, il devient rapidement évident qu’il n’y a pas de place dans la division pour une unité de guides à cheval. Les membres du Corps sont alors dispersés dans l’ensemble de la force. Nombre d’entre eux occupent des postes d’état-major au sein de l’armée, certains excellant dans les fonctions d’état-major du renseignement en raison de leur formation antérieure. Charles H. Mitchell, par exemple, devient officier supérieur du renseignement du Corps canadien après sa création en 1915. Après le transfert de Hamilton dans l’armée britannique, il est remplacé par un autre officier des guides, Johnson Lindsay Rowlett Parsons. D’autres membres du Corps des guides sont affectés à la nouvelle compagnie de cyclistes du Corps canadien et servent ensuite d’éclaireurs et de messagers sur le front ouest, remplissant ainsi le rôle initial des guides.

Après-guerre
Lors de la réorganisation de la milice après la guerre, toutes les compagnies à cheval du Corps des guides sont transformées en compagnies de cyclistes. Cependant, dans l’entre-deux-guerres, la milice ne suscite que peu d’intérêt et n’a pas beaucoup d’argent. L’armée n’avait pas besoin de cyclistes ou de guides en temps de paix et les progrès technologiques avaient rendu le vélo obsolète sur le champ de bataille. Le Corps des guides est officiellement dissous le 31 mars 1929. Une petite équipe de renseignement est toutefois restée dans chacun des districts militaires et a servi pendant la Deuxième Guerre mondiale.
