Le bataillon de cyclistes du Corps canadien était une unité militaire pendant la Première Guerre mondiale. On le considère comme l’un des précurseurs du service du renseignement militaire canadien. Les hommes étaient formés pour être des soldats mitrailleurs mobiles à bicyclette, mais ils n’ont exercé cette fonction qu’à la fin de la guerre. Le bataillon a subi un taux de pertes de 23 % : 261 hommes sont morts ou ont été blessés sur les 1 138 qui ont servi dans les unités cyclistes pendant la guerre.

Origines et formation
Quand la Première Guerre mondiale éclate en 1914, l’Armée canadienne ne compte pas de cyclistes. L’armée britannique, quant à elle, utilise des bicyclettes depuis les années 1880. En 1908, les réformes de l’armée britannique incluent la création de dix unités cyclistes pour la Force territoriale (l’armée de volontaires pour la défense du territoire). Ce n’est pas le cas au Canada, probablement en raison du manque d’infrastructures routières de qualité.
Pendant la Première Guerre mondiale, une compagnie de cyclistes est ajoutée à chaque division de l’armée britannique. La première division canadienne, formée à Valcartier, suit le modèle britannique. C’est ainsi que naît la première compagnie de cyclistes canadiens. Elle est composée de nombreux membres provenant du Corps canadien des guides, qui n’est pas dépêché outre-mer en tant qu’unité formée. Une compagnie de 100 hommes s’embarque pour l’Angleterre en octobre 1914, mais ne reçoit pas de bicyclettes avant son arrivée en Angleterre. Les premières bicyclettes fournies étaient des CCM et des Planets, fabriquées au Canada, mais elles sont ensuite échangées contre des BSA, la bicyclette standard utilisée par l’armée britannique.

Rôle des cyclistes
Les unités de cyclistes doivent servir de forces mobiles capables de protéger les flancs de l’armée contre une attaque-surprise. Historiquement, ce rôle est assumé par des soldats à cheval. Les bicyclettes présentent toutefois plusieurs avantages par rapport aux chevaux, dont on a utilisé des millions pour le transport et le ravitaillement pendant la Première Guerre mondiale. (Voir Animaux qui ont servi à la Première Guerre mondiale.) Le champ de bataille moderne est un lieu dangereux et terrifiant, tant pour les hommes que pour les animaux. Non seulement les chevaux coûtent cher à nourrir et à entretenir, mais beaucoup meurent de maladies ou de blessures infligées par l’artillerie, les mitrailleuses, les chars d’assaut et les gaz. En revanche, les bicyclettes se vendent à bon prix et résistent au bruit et au stress de la guerre moderne. Un soldat à bicyclette peut se déplacer rapidement, sans se soucier de nourrir ou de protéger sa monture. De plus, les bicyclettes se déplacent plus silencieusement et sont moins visibles que les chevaux, ce qui constitue un avantage pour les activités de renseignement.

Création et consolidation de nouvelles unités
À mesure que le Corps expéditionnaire canadien (CEC) se développe, d’autres compagnies de cyclistes sont formées pour soutenir les nouvelles divisions. À l’automne 1914, la compagnie cycliste de la deuxième division est constituée à partir d’unités de partout au Canada et envoyée outre-mer en mai 1915. Plusieurs autres pelotons sont formés et envoyés en Europe au début de 1916. Ils sont finalement regroupés au sein de la compagnie cycliste de la troisième division. Des compagnies destinées à soutenir les quatrième et cinquième divisions sont brièvement formées, mais sont ensuite dissoutes et réparties entre les autres unités de cyclistes et les unités non apparentées. En mai 1916, on regroupe les trois compagnies pour former le bataillon de cyclistes du Corps canadien et on les désigne comme les compagnies A, B et C du bataillon.

Opérations
Pendant une grande partie de la guerre, les unités cyclistes ne remplissent pas leur rôle initial de force mobile. Sur le front de l’Ouest, les belligérants se retrouvent rapidement dans une impasse, s’engageant dans une longue période de guerre relativement statique (voir guerre de tranchées). Les cyclistes servent donc de messagers, de creuseurs de tranchées, de mitrailleurs, de brancardiers et même d’escorteurs de prisonniers de guerre en France.
Les cyclistes s’engagent pour la première fois dans les combats lorsque les Alliés ripostent à l’attaque au gaz allemande pendant la deuxième bataille d’Ypres, en avril 1915. Les troupes avancent vers une position stratégique, sans masque à gaz ni casque d’acier pour se protéger. Leurs bicyclettes s’avèrent pratiquement inutiles dans ce contexte. (Voir aussi Le Canada et la guerre des gaz et La cagoule Hypo.) Les cyclistes participent ensuite à la bataille de la Somme, transportant du matériel et des brancards, et enterrant les morts. Ils contribuent aussi aux préparatifs de la bataille de la crête de Vimy, mais on les relègue surtout au creusement des tunnels. Ils prennent part aux opérations de soutien dans les tranchées pendant les campagnes de la côte 70 et de Passchendaele; certains sont même équipés de mitrailleuses ou affectés à des missions antiaériennes.

Les cyclistes sont enfin reconnus à leur juste valeur à la fin de la guerre, au sein de la Force indépendante canadienne. Cette force mobile, créée par le lieutenant-général Arthur Currie et le brigadier-général Raymond Brutinel, peut se déplacer indépendamment du corps principal. Les cyclistes y démontrent leur mobilité et leur rapidité, des qualités peu utiles dans une guerre de tranchées. L’unité de Force autonome se compose de mitrailleuses, de mortiers, de véhicules blindés et de cyclistes transportant des mitrailleuses et d’autres équipements (d’un poids total de plus de 40 kg) sur leurs bicyclettes. Ce groupe gagne en importance lorsque le conflit sort des tranchées et se transforme en une opération hautement mobile, connue plus tard sous le nom d’offensive des Cent-Jours, ou les cent jours du Canada. C’est l’apogée de l’expérience du Corps expéditionnaire canadien en matière de guerre interarmes et de guerre mobile, au cours de laquelle les cyclistes jouent un rôle clé.
Mission d’occupation
Après la signature de l’armistice, les première et deuxième divisions canadiennes sont affectées à des missions d’occupation et reçoivent l’ordre d’entreprendre une marche de 400 km vers l’Allemagne. Les compagnies A et B du bataillon de cyclistes accompagnent les deux divisions pendant la marche. Elles y effectuent des patrouilles et des gardes. En arrivant en Allemagne, les cyclistes reprennent des tâches plus légères, comme tenir des postes de contrôle sur les grandes routes.

Après la guerre
À la fin de la guerre, 261 des 1 138 hommes ayant servi dans les unités cyclistes étaient décédés ou blessés, ce qui correspond à un taux de pertes de 23 %. Après la fin des hostilités, le bataillon de cyclistes et d’autres unités connexes sont dissous lors de la démobilisation générale. En 1934, les anciens combattants des unités de cyclistes se réunissent à Toronto pour fonder l’Association du bataillon de cyclistes du Corps canadien. Ils continuent de se rencontrer régulièrement jusqu’au décès du dernier d’entre eux en 1996.
