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Dorothy Dworkin

Dorothy Dworkin, née Goldstick, infirmière, sage femme, agente de voyage, éditrice, organisatrice de collectes de fonds, directrice d’hôpital (née en 1890 à Windau, dans l’Empire russe; décédée le 22 juillet 1976 à Toronto, en Ontario). Dorothy Dworkin a fait partie des fondateurs de l’hôpital Mount Sinai au début des années 1920 et elle a fait la promotion des efforts pour fournir de meilleurs soins de santé à la communauté juive de la ville. Elle était une organisatrice active de collectes de fonds pour des causes caritatives et humanitaires, et elle a aidé à organiser le passage de nombreux immigrants de l’Europe de l’Est au Canada (voir Immigration au Canada).

Dorothy Dworkin en uniforme d’infirmière, vers 1909.

Jeunesse et carrière

Dorothy Goldstick naît à Windau (maintenant Ventspils, en Lettonie) et elle est la septième des onze enfants de Sarah et Wolfe Goldstick, un marchand. Sa famille émigre au Canada en 1904 et s’installe à Toronto (voir Immigration au Canada). Dorothy Goldstick envisage une carrière en soins de santé, mais comme elle se souvient plus tard : « en raison de ma race, de mon sexe, et du fait que j’étais relativement nouvelle venue dans ce pays, il semblait que je ne pouvais qu’espérer avoir un emploi médiocre. » Autour de 1907, elle commence à travailler pour le dispensaire privé du docteur S.J. Kaufman. Il lui recommande d’étudier la profession de sage-femme et les soins infirmiers au Mount Sinaï Hospital de Cleveland, en Ohio, où elle est certifiée par le conseil de l’état en 1909. À son retour à Toronto, Dorothy Goldstick dirige le Jewish Dispensary, qui est géré par Ida Siegel et Abe Lewis. Sous leur direction, le dispensaire offre des services médicaux gratuits aux nouveaux immigrants. Durant les heures de fermeture du dispensaire, Dorothy Goldstick fait des visites à domicile pour effectuer des accouchements. (Voir aussi Accouchement au Canada.) Elle aide également du côté de l’auxiliaire féminin du dispensaire, qui offre des services variant de la distribution de lait pasteurisé à l’organisation d’un orphelinat pour enfants juifs.

En 1911, elle épouse Henry « Harry » Dworkin, un agent publicitaire et grossiste en tabac. Entre 1917 et 1919, Harry et son frère Edward ouvrent un dépanneur au 525 rue Dundas Ouest, qui devient éventuellement Dworkin Travel. L’agence de voyages organise le passage d’immigrants juifs de l’Europe de l’Est, permettant la venue de centaines de personnes au Canada. Harry est également cofondateur du Labour Lyceum, qui est le foyer des unions juives de la ville et qui s’implique au sein de nombreux organismes syndicaux et juifs. (Voir aussi Communautés juives au Canada.)

Portrait d’Henry et Dorothy Dworkin, vers 1911.

Naissance de l’hôpital Mount Sinai

La population juive de Toronto passe d’environ 3000 habitants en 1901 à 34 619 en 1921 (voir Communauté juive au Canada). De nombreux résidents juifs de la ville ont émigré de l’Europe de l’Est et se sont installés dans le quartier Ward. Cette croissance est accompagnée du besoin de soins de santé pour cette nouvelle communauté qui fait souvent face à des problèmes de pauvreté et d’antisémitisme.

« Les gens riches pouvaient aller aux hôpitaux privés », se souvient Dorothy Dworkin lors d’une entrevue avec le Toronto Daily Star en 1968. « Les gens pauvres ne pouvaient obtenir aucune aide de la ville en ce qui concerne les hospitalisations s’ils possédaient ne serait-ce qu’un petit morceau de quoi que ce soit, même une cabane en papier goudronné. »

Dorothy Dworkin collabore avec les femmes qui ont formé le Ezras Noshem (« l’aide pour femmes ») afin d’amasser des fonds pour un nouvel hôpital. Parmi les motifs de ces efforts se trouve le refus de l’Hôpital général de Toronto d’offrir de la nourriture casher et un personnel parlant le yiddish pour les patients. Le groupe obtient un acompte pour l’ancien site de l’hôpital privé Lynhurst au 100 avenue Yorkville. Initialement nommé Toronto Jewish Maternity and Convalescent Hospital lorsqu’il ouvre ses portes en septembre 1922, il est renommé Mount Sinai Hospital l’année suivante.

Selon les récits personnels de Dorothy Dworkin, « à cette époque, les femmes étaient terrifiées par les hôpitaux ». Dorothy Dworkin conçoit de nombreux plans pour attirer les patientes vers le nouvel hôpital. Une poussette est remise à la première femme qui accouche dans l’établissement. Lorsque trois lits seulement sont occupés par des patientes avant un tour guidé, elle s’organise pour que les infirmières se déguisent en patientes pour occuper les espaces libres.

Bien qu’elle ne soit pas membre du conseil d’administration entièrement masculin de l’hôpital, Dorothy Dworkin joue un rôle de premier plan dans la gestion quotidienne de l’hôpital. Au cours des premières années, elle conduit pour aller porter des bandages et des instruments médicaux au Women’s College Hospital pour les stériliser. Les membres de Ezras Noshem aident également en effectuant des tâches dans la cuisine ou en raccommodant la literie. Comme l’édifice de l’hôpital Mount Sinai n’a pas d’ascenseur, les patients doivent être transportés de haut en bas des escaliers.

En 1925, Dorothy Dworkin fonde le Ladies’ Auxiliary de l’hôpital, qui organise des activités de collectes de fonds qui vont de concours pour bébés à des bazars. Elle et d’autres bénévoles attendent fréquemment devant les synagogues pour solliciter des dons pour l’hôpital lorsque les gens quittent les services religieux.

Croissance de Mount Sinai

Lorsqu’un projet d’agrandissement de l’hôpital est suspendu en raison de la crise des années 1930, Dorothy Dworkin, qui est désormais secrétaire du conseil d’administration de l’hôpital Mount Sinai, travaille avec acharnement pour apaiser les créanciers de l’hôpital. Au milieu des années 1930, elle fait partie de gens qui collectent 1000 $ par personne pour acheter des polices d’assurance-vie qui offrent une garantie d’hypothèque nécessaire pour financer la construction d’une annexe au bâtiment de l’hôpital.

Alors qu’elle continue de diriger les efforts pour les collectes de fonds de l’hôpital et pour la sensibilisation communautaire, elle fait également la promotion d’une plus grande implication des femmes dans le leadership médical. « Une des raisons pour lesquelles les hommes n’aiment pas que les femmes siègent aux conseils d’administration de l’hôpital, c’est qu’ils croient qu’elles ne recherchent que de “petits montants” », déclare-t-elle lors d’une réunion de la Women’s Hospital Aids’ Association en 1947. « Nous devons leur démontrer que nous sommes capables de faire de grandes choses. »

L’ancien hôpital Mount Sinai sur l’avenue Yorkville à Toronto, vers 1976.

L’hôpital quitte le 100 avenue Yorkville et déménage sur l’avenue University en 1953. Dorothy Dworkin est nommée directrice à vie du Mount Sinai en février 1955 et elle également nommée membre à vie de l’Association des hôpitaux de l’Ontario. En 1968, pour marquer la démolition des anciens édifices et la construction du nouvel hôpital de 650 lits de Mount Sinai sur l’avenue University, un défilé de véhicules antiques se rend du 100 Yorkville à l’avenue University. Dorothy Dworkin est assise dans la voiture de tête.

L’hôpital Mount Sinai au 600 avenue University à Toronto, vers 1976.

Autres activités

En plus de son implication dans l’hôpital Mount Sinai, Dorothy Dworkin occupe également des postes de direction ou au sein des conseils d’administrations de plusieurs organismes, incluant la Continental Steamship Ticket Agents Association, la Federation of the Jewish Philanthropies de Toronto et le Labour Lyceum.

Entre 1935 et 1954 à 1955, Dorothy Dworkin, avec son frère Morris Goldstick, est rédactrice en chef et éditrice de Keneder Naies (« Nouvelles Canadiennes »), une publication en langue yiddish qui est insérée dans les éditions de fins de semaine des journaux yiddish de New York, pour lesquels elle assure la distribution locale (voir Journaux).

Après la mort de son mari en 1928, Dorothy Dworkin dirige Dworkin Travel. L’agence de voyages continue d’assurer le passage pour les immigrants, ce qui mène à de fréquentes conversations avec les députés et les fonctionnaires fédéraux lorsque des problèmes surviennent (voir Immigration au Canada; Politique d’immigration au Canada). Durant l’Holocauste en Europe, elle gère des campagnes de collectes de fonds qui visent à apporter une aide internationale aux Juifs (voir Le Canada et l’Holocauste). Elle vend son entreprise au début des années 1970.

Legs

En 2009, Dorothy Dworkin est nommée Personnage d’importance historique nationale par Parcs Canada pour « sa profonde implication au sein des organismes de la santé, du travail, et de bienfaisance ».

Son petit-fils, Harry Arthurs, devient plus tard doyen de la Osgoode Hall Law School, président de l’Université York et président de l’Association canadienne des libertés civiles. En résumant les réalisations de Dorothy Dworkin en 2009, il observe que : « Elle et sa génération de femmes immigrantes ont travaillé très dur pour améliorer non seulement leur propre vie, mais également celle de tout le monde. Elles ont brisé des barrières, construit des institutions, et changé des vies. »