Les frégates porte‑hélicoptères de la classe Halifax (FFH) sont des bâtiments de guerre polyvalents de la Marine royale canadienne (MRC). La classe Halifax comprend 12 navires, conçus dans les années 1970, en remplacement des destroyers d’escorte de la classe St. Laurent et des classes connexes, en vue de fournir à la flotte une protection de lutte anti‑sous‑marine (LASM). Elle est entrée en service au début des années 1990, juste après la fin de la guerre froide, ses bâtiments s’étant finalement avérés constituer des navires de guerre extrêmement polyvalents. Grâce à un projet de modernisation majeur achevé dans les années 2010 ayant porté sur l’ensemble des navires de la classe, la classe Halifax demeure la colonne vertébrale de la flotte de surface de la MRC. Dans les années 2030, elle est remplacée par les navires de combat canadiens (CSC), dont la construction a été annoncée en 2019.
Frégate canadienne de patrouille (FCP)
Au début des années 1970, la Marine royale canadienne acquiert quatre destroyers de la classe Iroquois pour prendre la suite des destroyers d’escorte de la classe St. Laurent. Toutefois, ces nouveaux bâtiments vont s’avérer beaucoup plus grands et beaucoup plus chers que prévu et la MRC lance rapidement une nouvelle recherche pour un navire de surface de LASM plus économique.
À peu près au même moment, la United States Navy (USN) élabore le sonar à réseau remorqué constituant une adaptation des réseaux de sonars passifs du réseau SOSUS. Il s’agit alors d’une percée technologique majeure, les portées de détection étant bien plus élevées que pour les sonars actifs. Le sonar à réseau remorqué change fondamentalement le concept de lutte anti‑sous‑marine de surface, passant d’une protection rapprochée en convoi à des bâtiments stationnés indépendamment, à une certaine distance de la force principale. Compte tenu de cette indépendance, ces navires ont toutefois besoin de capacités d’autodéfense renforcées.
En décembre 1977, le Cabinet approuve ces concepts, qui seront intégrés dans la nouvelle Frégate canadienne de patrouille (FCP). Afin d’éviter les dépassements de coûts du projet Iroquois, mené en interne, le gouvernement décide que le projet FCP sera géré par un sous‑traitant externe et invite les entreprises à soumettre des propositions devant respecter un certain nombre d’exigences particulières sur le plan opérationnel et sur le plan technique. Il s’agit alors du premier projet de défense canadien majeur, un processus qui se poursuit depuis.
Conception
La conception proposée par l’entreprise Saint John Shipbuilding Limited qui remporte l’appel d’offres est révolutionnaire, le vaisseau embarquant, outre un système sonar à réseau remorqué canadianisé (CANTASS) à titre de détecteur primaire, un hélicoptère LASM de grande taille – tout d’abord le CH‑124 Sea King, ensuite remplacé, en 2018, par le CH‑148 Cyclone – servant de plateforme principale à partir de laquelle les systèmes d’armes sont utilisés. Le bâtiment est également doté d’un canon Bofors à tir rapide de 57 mm pour la défense de surface et aérienne, ainsi que de missiles Sea Sparrow, d’un système d’arme de combat rapproché (CIWS) pour la défense aérienne ponctuelle et de missiles surface‑surface Harpoon pour la défense contre les menaces de surface. Il embarque en outre 24 torpilles anti‑sous‑marines et 8 mitrailleuses lourdes de 12,7 mm. L’ensemble de ces systèmes est géré par l’intermédiaire d’un système de commandement et de contrôle informatisé (CCS‑330). Le vaisseau est alimenté par propulsion combinée diesel et turbine à gaz (CODOG). À 15 kt, il a un rayon d’action maximum de 7 100 NM (13 149 km) en mode diesel et de 4 700 NM (8 704 km) en utilisant les turbines à gaz, la vitesse maximale étant alors de 30 kt (56 km/h). Avec un déplacement de 4 770 t, il n’est que légèrement plus petit qu’un bâtiment de la classe Iroquois de 5 200 t. Pratiquement chacune de ses fonctions est contrôlée par le biais d’une série de systèmes informatisés intégrés au bâtiment, notamment les communications (SHINCOM), la commande des machines (SHINMACS), ainsi que le traitement et l’affichage (SHINPADS)
Classe Halifax
La conception gagnante est acceptée en juillet 1983, dans le cadre d’une commande initiale d’une première série de six bâtiments. En décembre 1987, une deuxième commande suit, portant sur une nouvelle série de six navires supplémentaires. Un plan circonstanciel prévoit une troisième série de six à huit bâtiments destinés au remplacement unitaire des destroyers d’escorte de la classe St. Laurent. Toutefois, ce projet est laissé de côté dans le cadre de la réduction du budget de la défense due à la fin de la Guerre froide, au titre des « dividendes de la paix ».
Les différents bâtiments de la classe reçoivent le nom de villes importantes canadiennes, le premier navire, Halifax (330), étant mis en cale sèche pour sa construction en mars 1987 et mis à l’eau, c’est-à-dire construit et lancé à partir de la cale sèche, le 30 avril 1988; à l’issue d’une longue période consacrée aux finitions et aux essais d’acceptation, le navire est finalement officiellement mis en service le 29 juin 1992. Les autres bâtiments de la classe sont nommés Vancouver (331), Ville de Québec (332), Toronto (333), Regina (334), Calgary (335), Montréal (336), Fredericton (337), Winnipeg (338), Charlottetown (339), St. John’s (340) et Ottawa (341). Ce dernier est le dernier à être mis en service, le 28 septembre 1996.
Modernisation des navires et prolongation de la vie de l’équipement (MCH/FELEX)
Dès son introduction, la classe Halifax est immédiatement reconnue comme un chef de file mondial en matière de LASM. Toutefois, la guerre froide prend fin à peu près au même moment et la disparition effective de la flotte sous‑marine soviétique comme adversaire signifie que la classe Halifax a peu de chances de démontrer ses capacités de LASM en haute mer dans le cadre d’opérations. Les navires sont alors plutôt déployés dans des environnements côtiers (voir le paragraphe « Emploi » ci‑dessous), les nouvelles menaces côtières nécessitant des mises à niveau et des modifications des capteurs et des armes des bâtiments.
Le Projet de prolongation de la vie de l’équipement des frégates (FELEX) est lancé en novembre 2001, le Projet de modernisation des navires de classe Halifax (MCH), au milieu de la durée de vie prévue, étant approuvé en 2005. Le Halifax, le premier navire, est le premier à pénétrer sur le chantier au printemps 2010 et les essais d’acceptation du dernier, le Toronto, sont menés à bien en décembre 2017. Outre une mise à niveau complète du système de contrôle du combat (CSS) et l’intégration d’armes et de capteurs améliorés, comme le système de missiles Sea Sparrow évolués, ces projets portent également sur les modifications requises pour l’introduction de l’hélicoptère CH‑148 Cyclone.
Grâce à des mises à niveau progressives, tout au long des divers réaménagements cycliques régulièrement planifiés, on estime que la classe Halifax devrait rester opérationnelle jusqu’aux années 2030. En février 2019, un contrat a été signé avec le consortium BAE‑Lockheed Martin pour un nombre de frégates britanniques de type 26 pouvant atteindre 15 navires, dans le cadre du remplacement unitaire de 12 bâtiments de la classe Halifax et de 3 destroyers de la classe Iroquois.
Emploi
Construits pour des opérations dans l’Atlantique‑Nord et dans le Pacifique, sept de ces bâtiments sont basés à Halifax et cinq à Esquimalt. Ils ont également été déployés jusqu’aux confins du globe, généralement au sein de forces alliées ou d’une coalition, parfois dans le contexte d’un Groupe opérationnel du Canada – le plus connu étant dans la région de la mer d’Oman, en soutien à la guerre en Afghanistan – mais, le plus souvent, en tant que navires isolés. Peu après sa mise en service, le Calgary est déployé dans la région du Golfe persique au sein de la première force navale alliée pleinement intégrée jamais mise sur pied avec le groupe aéronaval de l’USN. Dans le cadre de l’opération nationale qui l’éloigne le plus du Canada, le Fredericton est secrètement déployé, au large des côtes de l’Angola, au printemps 2006, en soutien à une opération de lutte contre le trafic de drogue conduite par la GRC. En 2011, les frégates Charlottetown et Vancouver sont déployées, à tour de rôle, pour des opérations côtières menées contre la Libye. Plus récemment, une frégate participe régulièrement aux opérations de respect des sanctions contre la Corée du Nord (opération Neon) ainsi que, dans les eaux européennes, à des opérations contre la résurgence de la Russie (opération Reassurance). Il est vrai que le retour, à la fin des années 2010, des sous‑marins russes tirant des missiles balistiques à propulsion nucléaire à leur niveau de la Guerre froide, a conduit les frégates de la classe Halifax à endosser à nouveau leur mission originale de LASM.