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L'Acte constitutionnel de 1791

L’Acte constitutionnel de 1791 est une loi adoptée par le Parlement britannique qui a divisé la province du Québec en deux : le Haut-Canada et le Bas-Canada. Aussi appelé Acte du Canada, il est le premier pas dans le long processus vers la Confédération, mais ses structures coloniales rigides ont aussi préparé le terrain pour la rébellion dans les deux Canada. (Voir Rébellions de 1837-1838.) L’Acte est aussi connu pour avoir donné le droit de vote aux femmes propriétaires du Bas-Canada, une inclusion jamais vue selon les normes de l’époque.

Acte constitutionnel de 1791

Réponse à l’immigration loyaliste

L’Acte constitutionnel reçoit la sanction royale en juin 1791 et entre en vigueur le 26 décembre. Il entérine les changements constitutionnels qui font partie de la réorganisation de l’Amérique du Nord britannique, dans la foulée des milliers de loyalistes venus trouver refuge au Canada au lendemain de la guerre d’Indépendance des États-Unis. (Voir aussi loyalistes noirs en Amérique du Nord britannique; Éditorial : l’arrivée des loyalistes noirs en Nouvelle-Écosse.)

Un projet de loi constitutionnelle est préparé par William Wyndham Grenville. Basée sur la loi ayant créé les colonies du Nouveau-Brunswick et du Cap-Breton en 1784, la loi de Grenville vise à assurer le développement ininterrompu des institutions parlementaires britanniques dans la région gouvernée par l’Acte de Québec de 1774. Selon William Grenville, l’objectif du projet de loi est « d’assimiler » la constitution de chaque colonie à celle de la Grande-Bretagne.


L'Acte de Québec, 1774
(British Parliamentary Archives, HL/PO/PU/1/1774/14G3n226 1774)


La province du Québec divisée

Le projet de loi poursuit quatre objectifs principaux : 1) garantir l’exercice des mêmes droits et privilèges dont bénéficient les autres sujets dans les colonies de l’Amérique du Nord britannique ; 2) accorder aux assemblées coloniales le droit de lever des impôts qui financeraient l’administration civile et judiciaire locale, allégeant ce faisant le fardeau qui repose sur le Trésor de l’Angleterre ; 3) justifier la division de la Province du Québec en colonies distinctes (le Haut et le Bas-Canada) ayant leurs assemblées législatives provinciales séparées ; et 4) renforcer les liens de dépendance politique en remédiant à la faiblesse constitutionnelle des gouvernements coloniaux précédents. Cela implique de renforcer l’autorité et le prestige du Gouverneur en faisant de lui un vrai représentant de la Couronne, et de limiter les pouvoirs des assemblées élues par la création des conseils législatifs indépendants composés de membres nommés. Ces organismes aristocratiques sont créés sur le modèle de la Chambre des Lords britannique et sont consacrés aux intérêts de la Couronne. (Voir aussi Clique du Château ou Pacte de Famille.)

Fondement du conflit

L’Acte garantit la continuité de la propriété des terres possédées sous le régime seigneurial au Bas-Canada. Il crée également les réserves du clergé au Haut-Canada.

En donnant au Haut-Canada une constitution et une administration séparées, et en favorisant la colonisation britannique dans cet espace, la Grande-Bretagne pose les premiers jalons sur le chemin menant finalement à la Confédération. Cependant, cette loi n’établit pas un gouvernement responsable. Elle répartit plutôt les pouvoirs financiers de façon à favoriser les conseils non élus plutôt que les assemblées élues. Ces facteurs donnent lieu à des conflits politiques et contribuent aux rébellions de 1837-1838. (Voir aussi Rébellion du Bas-Canada; Rébellion du Haut-Canada.)


Régime seigneurial
(oeuvre de Michael Lee)


Un droit de vote plus inclusif

En vertu de la loi, les électeurs ont été décrits comme des « personnes » qui avaient au moins 21 ans et qui, citoyens ou sujets du monarque, n’avaient pas commis de crime grave ou de trahison. Les électeurs doivent posséder des terres ou une propriété d’une certaine valeur (dans les zones urbaines, des locataires pourraient aussi voter s’ils payaient un montant minimum de loyer). Cette valeur est relativement basse à la fin du 18e siècle et au début du 19e siècle. Le résultat de ces mesures est un droit de vote relativement inclusif. De plus, comme les femmes ne sont pas spécifiquement exclues de ce droit par la loi, cela permet aux femmes propriétaires de voter au Bas-Canada.

La Common Law anglaise prévaut dans la plupart des autres colonies britanniques, y compris le Haut-Canada. En conséquence, les femmes sont exclues du vote. Au Bas-Canada, toutefois, les droits des femmes à la propriété et à l’héritage sont déterminés par la Coutume de Paris. En vertu de la loi civile française, la propriété est partagée entre maris et femmes, bien qu’elle soit administrée par le mari. Si le mari en vient à mourir, la veuve reçoit en partage la moitié de leur propriété. Les femmes au Bas-Canada ont donc un plus large accès à la propriété qu’ailleurs dans des colonies britanniques.

Comme la Coutume de Paris continue d’être appliquée aux affaires civiles après 1791, les femmes qui sont propriétaires au Bas-Canada pouvaient voter en vertu de l’Acte. Ce principe n’est pas toujours appliqué, mais de 1791 à 1849, les femmes ont voté dans environ 15 circonscriptions au Bas-Canada. En 1849, l’Assemblée législative adopte un projet de loi visant à bannir le droit de vote des femmes. (Voir Droit de vote de la femme.)

Voir aussi : Acte constitutionnel de 1791 : document; Constitution du Canada; Histoire constitutionnelle; Droit constitutionnel.