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Les athlètes canadiens noirs pionniers

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Le succès sportif, nous dit-on, nécessite du courage et de la détermination. Avec ces forces, un athlète peut surmonter n’importe quel obstacle et, s’il est assez bon, devenir le meilleur dans sa discipline, peu importe les défis qui s’imposent. Mais qu’en est-il si l’objectif n’arrête pas d’être déplacé? Qu’en est-il si les lignes d’arrivée sont tracées plus loin, les obstacles mis plus haut et les fenêtres d’opportunité scellées?

Les athlètes de cette exposition ne sont pas seulement les meilleurs dans leurs domaines, mais ils sont parmi les meilleurs de l’histoire. Ils étaient les sprinters les plus rapides, les patineurs les plus agiles, les frappeurs les plus robustes et, dans plusieurs cas, les premiers à connaître un succès à un haut niveau. Mais bien qu’ils aient obtenu le respect de leurs pairs et l’admiration émerveillée des spectateurs, il y avait des barrières à leur succès, un barrage de couleur bloquant leur chemin.

Néanmoins, ces hommes et ces femmes noirs courageux ont persévéré, et, ce faisant, ont préparé la voie pour les générations futures.

La Coloured Hockey League of the Maritimes (1895-1925)

The Coloured Hockey League of the Maritimes

La Coloured Hockey League of the Maritimes (CHL) était une ligue de hockey composée exclusivement de joueurs noirs qui a vu le jour à Halifax, en Nouvelle‑Écosse, en 1895. Mise en place par des baptistes et des intellectuels noirs, cette ligue a été conçue comme un moyen d’attirer les jeunes hommes noirs à l’église le dimanche en leur promettant la possibilité de participer à un match de hockey entre églises rivales après le service religieux. Plus tard, sous l’influence du mouvement nationaliste noir de l’époque et dans le contexte d’un intérêt grandissant pour le hockey, elle sera perçue comme un moteur potentiel pour l’obtention de l’égalité des Canadiens noirs.

Au début du 20e siècle, la CHL n’est déjà plus une modeste ligue de trois équipes et inclut des équipes régionales comme les Victorias de Truro, les Royals d’Amherst et les Moss Backs de Hammond Plains. Entre 1900 et 1905, les matchs de la CHL attirent souvent plus de spectateurs que ceux des ligues blanches. La finale du championnat interprovincial des Maritimes, disputé à Halifax entre les champions en titre de la CHL, les Sea‑Sides d’Africville et les West End Rangers de Charlottetown, attire 1 200 spectateurs.

Les matchs officiels de la ligue ont lieu entre fin janvier et début mars, puisque les équipes de la CHL ne reçoivent l’autorisation d’accéder aux arénas qu’à l’issue de la saison des ligues blanches. Les parties se disputent sans autres règles officielles que la Bible. Ironiquement, ces règles inspirées de la Bible rendent le physique plus important et permet des innovations fondamentales pour ce sport comme l’autorisation pour le gardien de se mettre à genoux pour arrêter la rondelle ainsi qu’une forme précoce de lancer frappé.

ESPN Segment on the Coloured Hockey League of the Maritimes

Sam Langford

Sam Langford était un boxeur professionnel ayant combattu dans plusieurs catégories de poids au cours d’une carrière s’étendant sur 24 ans. Boxeur complet capable de déclencher des frappes violentes, il remporte souvent des combats contre des adversaires physiquement bien plus grands que lui et se bâtit une solide réputation de combattant intrépide.

En dépit d’un palmarès impressionnant et des commentaires positifs formulés par les icônes de son sport, Sam Langford, qui se voit affublé du surnom célèbre de « Boston Tar Baby », doit faire face tout au long de sa carrière à des barrières raciales. Bien qu’il remporte des titres en Angleterre, en Australie, au Canada et au Mexique dans la catégorie des poids lourds, il est considéré comme l’un des plus grands boxeurs de l’histoire à n’avoir jamais remporté un titre aux États‑Unis.

Certains historiens estiment même qu’il pourrait avoir livré en tout plus de 600 combats. À son apogée, entre 1906 et 1914, il remporte 85 des 87 combats qu’il livre. Son pedigree professionnel varie dépendamment des sources, les plus complètes faisant état de 214 victoires, dont 138 par mise hors de combat (KO), 46 matchs nuls et 44 défaites.

On réfère à Sam Langford comme « l’homme que les champions craignaient et contre lequel ils ne voulaient pas se battre, l’homme qui était tellement bon qu’il n’a jamais eu la chance de montrer à quel point il était bon ». Il est intronisé au Panthéon des sports canadiens, au International Boxing Hall of Fame et au Nova Scotia Sports Hall of Fame. En 1999, il est nommé meilleur athlète de la Nouvelle-Écosse du 20e siècle.

Barbara Howard

Barbara Howard 1939

Barbara Howard est considérée comme la première athlète féminine noire à représenter le Canada dans une compétition internationale.

Lorsqu’elle est une adolescente à l’école secondaire Britannia à Vancouver, elle se bâtit une réputation comme étant une des sprinteuses les plus rapides de la ville. En septembre 1937, lorsqu’elle n’a que 17 ans, elle bat le record de l’Empire britannique pour le sprint de 100 verges avec un temps de seulement 11,2 secondes, ce qui l’amène à représenter le Canada aux Jeux de l’Empire britannique de 1938, à Sydney, en Australie. Elle est la chouchoute des médias aux Jeux où elle arrive sixième au sprint de 100 verges, mais remporte l’argent et le bronze dans les relais de 440 verges et de 660 verges. Barbara Howard ne participe jamais aux Jeux olympiques, annulés en 1940 et en 1944 à cause de la Deuxième Guerre mondiale.

Déterminée à devenir une enseignante, elle étudie à l’école normale et obtient un baccalauréat en éducation de l’Université de la Colombie-Britannique. En 1941, elle devient la première personne d’une minorité visible à être engagée par le Conseil scolaire de Vancouver.

Barbara Howard poursuit une carrière en enseignement pendant 43 ans, dont 14 en éducation physique, avant de prendre sa retraite en 1984. Elle est intronisée au British Columbia Sports Hall of Fame et au Panthéon des sports canadiens.

Herb Carnegie

Potentiellement la première vedette canadienne noire de hockey, Herb Carnegie est réputé comme étant le meilleur joueur noir à n’avoir jamais joué dans la Ligue nationale de hockey (LNH).

Herb Carnegie est considéré comme petit, mais gagne le surnom « Swivel Hips » grâce à son habileté à faire des feintes pour déjouer les joueurs opposants. Patineur et manieur de rondelle adroit, il est également un meneur de jeu créatif et instinctif. En 1938, le patron des Maple Leafs de Toronto, Conn Smythe, déclare supposément qu’il prendrait Herb Carnegie « demain matin » s’il pouvait le « changer en blanc. »

Après avoir été relégué à l’équipe-école des Rangers de New York, Herb Carnegie décide plutôt de jouer dans la Ligue provinciale de hockey du Québec (LPHQ). Pendant la saison de 1947-1948 avec les Randies de Sherbrooke, il marque un nombre ahurissant de 48 buts et 79 mentions d’aide en 56 matchs. Avec les Aces de Québec en 1950-1951, Herb Carnegie joue aux côtés de Jean Béliveau, qui parle de Herb Carnegie comme étant « un super joueur de hockey, un beau style, un bon patineur, un grand meneur de jeu. À cette époque, les plus jeunes apprenaient des plus vieux. J’ai appris de Herb Carnegie. »

En 1955, Herb Carnegie fonde la Future Aces Hockey School, la première école de hockey inscrite au Canada. En 1987, il établit la Future Aces Foundation, qui, depuis sa formation, a versé plus de 630 000 $ en bourses.

Herb Carnegie, qui était aussi un champion de golf senior, est intronisé au Panthéon des sports canadiens et au Ontario Sports Hall of Fame. Il était récipiendaire de l’Ordre de l’Ontario et de l’Ordre du Canada, entre autres honneurs. Le Groupe Investors, l’employeur de Herb Carnegie pendant 32 ans, a institué le prix Herbert H. Carnegie en 2003 pour souligner les employés démontrant de l’excellence professionnelle et un dévouement envers leur communauté. L’aréna de hockey connu précédemment sous le nom de North York Centennial a été changé pour s’appeler le Herbert H. Carnegie Centennial Centre en 2005.

Inside Hockey - Herbert Carnegie Interview

Harry Jerome

Premier athlète né au Canada à obtenir un record mondial en athlétisme officiel, le triple médaillé olympique Harry Jerome a battu le record canadien au sprint de 220 verges lorsqu’il n’avait que 18 ans. Il a ensuite établi de nouveaux records, ou égalé ceux en place, pour le sprint de 60 verges intérieur, le sprint de 100 verges, le sprint de 100 mètres et le relais de 440 verges.

Après avoir manqué la saison de 1963 pour se remettre d’une opération consistant à rattacher son quadriceps gauche (une blessure tellement grave qu’elle a presque mis un terme à sa carrière), Harry Jerome court le sprint de 60 verges en 6 secondes en février 1964, égalisant le record mondial. Il remporte la médaille de bronze dans la course de 100 m aux Jeux olympiques d’étéde 1964 (la meilleure performance par un Canadien dans cette course depuis que Percy Williams avait remporté l’or en 1928), en plus de médailles d’or aux Jeux du Commonwealthen 1966 et aux Jeux panaméricainsen 1967.

Après son départ à la retraite, il fait la promotion des sports amateurs et pour jeunes grâce à des programmes nationaux et provinciaux, et milite pour un meilleur support des athlètes canadiens. Il présente aussi une pétition au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes pour obtenir une meilleure représentation des minorités dans les diffusions et il fait pression sur des chaînes de magasins grande surface pour que les mannequins présents dans leur publicité ne soient pas seulement blancs.

Harry Jerome est intronisé au Panthéon des sports canadiens, au British Columbia Sports Hall of Fame, au Canadian Amateur Athletic Hall of Fame et à l’Allée des célébrités canadiennes. Il était un officier de l’Ordre du Canadaet a été nommé Athlète du siècle de la Colombie-Britannique. Une statue le représentant a été dévoilée au parc Stanley à Vancouveren 1988.

Trailer for NFB documentary Mighty Jerome (2010)

Angela James

Véritable Wayne Gretzky du hockey féminin, Angela James est une pionnière et une figure marquante du hockey féminin pendant les années 1980 et 1990. Elle mène le Canada à la victoire de quatre Championnats du monde (en 1990, en 1992, en 1994 et en 1997). Elle est l’une des trois premières femmes à être intronisées au Temple de la renommée de la Fédération internationale de hockey sur glace et l’une des deux premières femmes à être intronisées au Temple de la renommée du hockey, en plus d’être la première joueuse ouvertement gaie et la deuxième athlète noire à y être intronisée.

Angela James est victime de racisme et de discrimination au cours de son enfance. Ce n’est qu’à l’âge de huit ans qu’elle est admise dans une ligue interne pour garçons, après que sa mère menace d’intenter des poursuites en justice. La jeune athlète s’impose rapidement comme meilleure buteuse de toute la ligue, mais l’année suivante, un nouveau règlement est voté qui interdit la participation des filles. Angela James se tourne donc vers un programme de hockey féminin à Don Mills. À 13 ans, elle rejoint une ligue de hockey féminin senior et plus tard mène son équipe du Collège Seneca lors de plusieurs championnats. Elle est nommée deux fois athlète de l’année au collège.

Angela James a la réputation d’être une joueuse talentueuse, bâtie et dure à cuire, ce qui lui vaut des comparaisons avec Mark Messier. Après avoir été écartée de façon controversée de la première équipe canadienne olympique de hockey pour femmes en 1998, Angela James accroche finalement ses patins et quitte la compétition en 2000. Lors de cette dernière saison, elle marque 44 points en 27 matchs dans la Ligue nationale féminine de hockey.

Arbitre dévouée et entraineuse couronnée de succès lors de championnats, Angela James met sur pied l’école de hockey pour adultes Breakaway et est directrice de l’école de hockey féminin du Collège Seneca. Elle est intronisée au Panthéon des sports canadiens et reçoit le prix YWCA « Women of Distinction Award for Sport ». Son ancienne patinoire dans le parc Flemingdon à Toronto est renommée l’Aréna Angela James en 2009.

Angela James - Hockey Hall of Fame Induction