Près de 10 000 des prospecteurs qui arrivent au Yukon entre 1897 et 1899 sont des Canadiens français. Ils viennent de multiples villages et villes du Québec, parfois même de l’Acadie et des Prairies. L’expansion des services fédéraux et l’élargissement des obligations linguistiques de l’État fédéral après l’adoption de la Loi sur les langues officielles (1969) amènent des Canadiens français à s’établir à Whitehorse. Ces derniers se regroupent en 1979 et fondent en 1982 l’Association franco-yukonnaise (AFY). Une variété d’associations et d’institutions, notamment l’École Émilie-Tremblay de Whitehorse, sont constituées entre les années 1980 et 2000. Les paysages et la culture du Yukon attirent les francophones dont le nombre passe de 1105 à 1693 personnes entre 2006 et 2016 et leur proportion, de 3,7% à 5%.
Histoire
Le commerçant de fourrures Laurent Leroux établit en 1786 des postes de traite sur le Grand lac des Esclaves pour la Gregory, MacLeod and Company, concurrente de la Compagnie du Nord-Ouest à laquelle elle sera intégrée l’année suivante. Plusieurs décennies plus tard, en 1840, sa concurrente, la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH), envoie l’explorateur Robert Campbell avec des guides canadiens-français afin de nouer des relations commerciales dans l’actuel Yukon. En fondant Fort Reliance, un comptoir commercial en aval de la rivière Klondike en 1874, le voyageur François-Xavier Mercier cherche à briser le monopole détenu par la CBH; Mercier convainc aussi les Oblats de Marie-Immaculée d’envoyer des premiers missionnaires au Yukon.
C’est pendant la décennie 1860 qu’on découvre de premiers gisements aurifères au Yukon. À la fin du 19e siècle, les francophones sont majoritaires aux postes de Dawson City et de Mayo. À partir de 1897, les découvertes de grosses pépites d’or déclenchent la «ruée vers l’or» de 1898, qui incite 100000 prospecteurs à tenter leur chance pour s’enrichir (voir aussi Ruée vers l’or du Klondike). La même année, le gouvernement fédéral reconnaît la nécessité d’assurer une administration locale et crée le Territoire du Yukon. Parmi les prospecteurs qui arrivent entre 1897 et 1899, près de 10000 sont des Canadiens français venus du Québec, de l’Acadie et des Prairies. Ce sont en majorité des hommes, mais certaines femmes, entre autres Émilie Tremblay, contribuent également à édifier les villes-champignons.
20e siècle
On connaît peu de choses sur les Canadiens français présents au Yukon pendant la première moitié du 20e siècle. Le déplacement de la capitale territoriale de Dawson vers Whitehorse en 1953, l’expansion des services fédéraux et l’élargissement des obligations linguistiques de l’État fédéral après l’adoption de la Loi sur les langues officielles (1969) amènent des Canadiens français à s’établir Whitehorse. Ces derniers se regroupent en 1979 et fondent en 1982 l’Association franco-yukonnaise (AFY), grâce aux subventions du Secrétariat d’État (fédéral). L’AFY organise des activités de réseautage et des manifestations culturelles; en 1983, elle fonde un journal bimensuel, L’Aurore boréale, afin d’éveiller et de nourrir une conscience collective. L’AFY obtient une émission quotidienne sur les ondes de CBC Yukon dès 1985 et une pleine antenne de la chaine française de Radio-Canada en 1991.
Drapeau Franco-Yukonnais
Source: Gouvernement du Canada
Drapeau franco-yukonnais
Les francophones du Yukon se dotent d’un drapeau en 1986 (voir aussi Drapeau franco-ontarien). Il est composé d’un champ bleu, symbole de la culture française, et de trois bandes diagonales représentant les montagnes; les deux bandes blanches symbolisent l’hiver, et la bande dorée rappelle la ruée vers l’or comme moment fondateur de la communauté et le cheminement des Franco-Yukonnais sur le territoire.
Le vocable «franco-yukonnais» définit la communauté, mais les attaches québécoises ou francophones demeurent plus importantes que l’identité franco-yukonnaise émergente. Pour forger et ancrer une mémoire commune, on évoque alors les prospecteurs canadiens-français venus au Klondike à la fin du siècle dernier et on mobilise ainsi les francophones envers les revendications politiques des militants. Lorsque Daniel Saint-Jean conteste la contravention unilingue anglaise qu’un agent de la Gendarmerie royale canadienne lui donne en 1984, l’AFY presse l’État fédéral de remplir ses obligations linguistiques dans le Nord-Ouest. En 1988, Ottawa signe la première entente Canada-Yukon qui mène à l’adoption de la Loi sur les langues du Yukon et à l’inauguration du Bureau des services en français.
Institutions d’enseignement
En 1984, l’AFY obtient que deux classes de langue française, enseignant de la première à la sixième année, soient ouvertes pour une trentaine d’élèves à Whitehorse. Or, le Yukon comprend au moins 215 enfants «ayants droit », d’où l’importance d’élargir les services éducatifs en français. Dans l’arrêt Mahé (1990), la Cour suprême du Canada contraint les provinces et territoires à constituer des administrations scolaires et des édifices autonomes là où le nombre d’enfants le justifie. Les classes de langue française auront donc leur propre bâtiment en 1992, ce sera l’école Émilie-Tremblay. Le Renvoi relatif à la Loi sur les écoles du Manitoba (1993) accorde aux francophones leurs propres mécanismes de gestion; la Commission scolaire francophone (CSF) sera ainsi créée en 1996.
Entre-temps émergent plusieurs associations francophones vouées à la représentation des femmes (1995), à l’animation de la jeunesse (1995), à l’éducation des adultes (1996), au rassemblement des émigrants français (2002) et à l’intégration des autres nouveaux arrivants francophones (2005).
Critères d'admission
L’école Émilie-Tremblay régit ses admissions jusqu’en 2009, année où le gouvernement du Yukon avise la CSF de ne plus admettre que les «ayants droit». En 2015, la Cour suprême impose des mesures réparatrices: pourront s’inscrire à l’école les enfants d’immigrants qui souhaitent acquérir le français comme langue première, les enfants de langue française qui n’ont pas la citoyenneté canadienne, les enfants dont les grands-parents étaient des ayants droit et de langue française et les enfants citoyens canadiens qui parlent français et souhaitent s’intégrer à la communauté francophone. Dans une entente administrative, la CSF convient qu’elle tiendra le gouvernement au courant de l’évolution de ses critères d’admission et des inscriptions. En 2017-2018, la CSF compte trois écoles de langue française et 297 élèves inscrits de la maternelle à la 12e année.
Population
Les paysages et la culture du Yukon attirent les francophones dont le nombre passe de 1105 à 1693 personnes entre 2006 et 2016, et leur proportion, de 3,7% à 5%. Le français gagne en importance également chez les anglophones: entre 2004 et 2018, les inscriptions en immersion française doublent pour atteindre 765 élèves. Avec 14% de la population apte à parler l’anglais et le français, le Yukon vient de dépasser l’Ontario, il se classe au 3e rang relativement à son taux de bilinguisme après le Québec et le Nouveau-Brunswick.
La population francophone se compose essentiellement d’immigrants, seuls 15% sont des Franco-Yukonnais de naissance. C’est également une population urbaine: 83% vivent à Whitehorse.
Journée de la francophonie yukonnaise
Depuis 2007, le 15 mai est désigné Journée de la francophonie yukonnaise que l’on célèbre par des festivités.