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Salamandre Cendrée

La salamandre cendrée, ou salamandre rayée (Plethodon cinereus) est une petite salamandre forestière originaire de l’est de l’Amérique du Nord. Au Canada, cette espèce se retrouve de l’Île-du-Prince-Édouard au nord-ouest de l’Ontario. Une espèce similaire, la salamandre à dos rayé (Plethodon vehiculum), vit dans le sud-ouest de la Colombie-Britannique. La salamandre cendrée est abondante dans la plupart des forêts de son aire de répartition. Cependant, on l’observe peu parce qu’elle passe la plus grande partie de son temps sous la terre, sous les feuilles mortes ou d’autres objets comme des bûches, des souches ou des roches.

Salamandre cendrée, phénotype à dos rouge

Description

La salamandre cendrée est petite et mince, atteignant une longueur totale avoisinant 12,5 cm. Ses pattes sont courtes relativement à son corps. Elle possède entre dix-huit et vingt rainures sur les flancs, à l’emplacement des côtes, appelées sillons costaux. On retrouve chez les salamandres différents motifs de couleurs, appelés phénotypes. Les deux plus fréquents sont le phénotype à dos rouge, gris foncé avec une bande rouge ou orange-rouge sur le dos, à partir de la tête, et le phénotype de plomb, gris foncé uniforme et sans bandes. Ces deux phénotypes comportent des taches ou des marbrures de couleur plus claire. Leur ventre est tacheté de noir et de blanc. Il existe plusieurs phénotypes plus rares, incluant des individus albinos ou entièrement rouges, que les biologistes appellent forme érythristique (présence inhabituelle de pigmentation rouge).

Habitat de la salamandre cendrée

Répartition et habitat

Au Canada, la salamandre cendrée se retrouve dans l’Île-du-Prince-Édouard, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, dans le sud du Québec, dans le sud et le centre de l’Ontario et dans la partie la plus méridionale du nord-ouest de l’Ontario, aussi loin à l’ouest que dans la région d’Atikokan (légèrement à l’ouest de Thunder Bay). Cette espèce se retrouve aussi dans le nord-est des États-Unis, aussi loin à l’ouest que dans le Minnesota, le Wisconsin et l’Illinois et au sud jusqu’en Caroline du Nord.

La salamandre cendrée vit dans les forêts. Les bûches, souches et autres débris de bois sont des éléments importants de son habitat, lui fournissant les conditions fraîches et humides qu’elle recherche et un abri contre les prédateurs. Pendant les mois d’été chauds et secs, les individus se dissimulent souvent dans des terriers de mammifères, des cavités sous des racines et autres espaces souterrains retenant plus d’humidité que la surface du sol. La salamandre cendrée utilise aussi ces espaces souterrains pour se réfugier sous la ligne de gel et se protéger des basses températures durant l’hiver. Les femelles pondent leurs œufs dans des zones humides du tapis forestier, par exemple sous des bûches en décomposition. La salamandre cendrée ne migre pas entre les habitats où elle hiberne, se reproduit ou passe l’été.

La salamandre cendrée, mâle ou femelle, est territoriale. Elle marque son territoire à l’aide de déjections et de sécrétions chimiques, et le défend contre les intrus. Durant les disputes territoriales, les salamandres cendrées communiquent en utilisant des postures qui indiquent l’agressivité et la soumission. Si cela ne suffit pas pour résoudre le conflit, elles engagent le combat.

Le saviez-vous?
La salamandre cendrée appartient à la famille des Plethodontidae. Les espèces de cette famille ne possèdent pas de poumons! À la place, les gaz se diffusent directement à travers leur peau perméable. Leur peau doit demeurer humide pour accomplir cette fonction respiratoire. C’est pourquoi l’habitat de la salamandre cendrée se retrouve dans les parties fraîches et humides du tapis forestier. Si elle est exposée trop longtemps à des conditions chaudes et sèches, sa peau sèche et elle suffoque.


Reproduction et croissance

La salamandre cendrée s’accouple habituellement à l’automne. En moyenne, la femelle pont entre six et neuf œufs à la fin du printemps ou au début de l’été. Les œufs sont disposés en grappe, comme des raisins, et habituellement attachés au toit de la cavité de nidification. La femelle, et parfois le mâle, demeure avec les œufs pour les protéger jusqu’à leur éclosion en août ou septembre. Contrairement à la plupart des espèces de salamandres, la salamandre cendrée est entièrement terrestre et ne connaît pas de stade larvaire aquatique. Ses œufs se développent plutôt directement, c’est-à-dire que les nouveau-nés sortant de l’œuf ressemblent à des adultes miniatures. La maturité sexuelle est atteinte entre deux et six ans après la naissance. Les individus des latitudes nordiques ont la maturité la plus tardive. Au Canada, les salamandres cendrées femelles se reproduisent habituellement tous les deux ans, alors que les mâles s’accouplent chaque année. On en sait peu sur la durée de vie de cette espèce. Toutefois, une étude réalisée au Québec indique que la durée de vie ne dépasse pas neuf ans dans la nature.

Diète et prédation

La salamandre cendrée est active surtout la nuit, particulièrement pendant et après la pluie, quand le tapis forestier est humide. Elle cherche une proie en utilisant la vue et l’odorat. Elle chasse une grande variété d’espèces invertébrées, dont des insectes (par ex., fourmis, coléoptères, mouches), des araignées, des mites,des escargots, des limaces, des centipèdes et des millipèdes. La salamandre cendrée est un important prédateur dans les écosystèmes de tapis forestier. Elle influence l’abondance des communautés d’invertébrés et régule le taux des processus écologiques comme la décomposition des feuilles.

Les principaux prédateurs de la salamandre cendrée sont les serpents et les oiseaux forestiers, ainsi que certains grands invertébrés comme les araignées. La salamandre cendrée produit des sécrétions toxiques à l’aide de glandes cutanées pour dissuader les prédateurs. Comme plusieurs espèces de salamandres, elle peut aussi se séparer de sa queue si elle est attaquée ou menacée, une particularité appelée « autotomie » de la queue. La queue, qui continue à s’agiter, distrait le prédateur tandis que la salamandre s’enfuit. La queue finira par repousser. Cependant, la perte de la queue peut affecter négativement la santé et la survie de la salamandre, car sa queue contient des réserves de gras dont elle dépend pour survivre durant l’hiver.

Salamandre cendrée, phénotype de plomb

Statut et menaces

Au plan mondial, la salamandre cendrée est considérée comme une espèce « de préoccupation mineure » par l’Union internationale pour la conservation de la nature. Cette espèce est largement répandue et abondante au Canada, et son statut n’a pas été évalué par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada. Des activités qui ont pour résultat la destruction permanente de l’habitat en forêt mature, comme le défrichement pour le développement urbain ou l’agriculture, constituent la plus sérieuse menace pour cette espèce. Les activités forestières intensives, comme la coupe à blanc, ont aussi un impact négatif pour les salamandres forestières. Leur peau étant perméable aux éléments chimiques présents dans l’environnement, les amphibiens sont particulièrement sensibles à des polluants chimiques comme les pesticides, les fertilisants, les produits chimiques industriels et le sel de voirie.

La densité de la salamandre cendrée peut dépasser un individu par mètre carré de tapis forestier dans les forêts matures et en santé. Dans certaines forêts, les salamandres pléthodontides, incluant la salamandre cendrée, peuvent représenter une biomasse (poids total) aussi importante que celle des petits mammifères, et deux fois plus importante que celle des oiseaux. En raison de leur abondance, de leur sensibilité aux changements environnementaux, de leur domaine vital réduit et de leur rôle important dans les écosystèmes forestiers, les biologistes voient souvent dans la salamandre cendrée un indicateur de l’état de santé d’une forêt. Si la population de salamandres est stable et vigoureuse, cela peut indiquer que l’écosystème de la forêt est sain.

Taxonomie

Règne

Animalia

Embranchement

Chordata

Classe

Amphibia

Ordre

Caudata

Famille

Plethodontidae

Genre

Plethodon

Espèce

Plethodon cinereus