Les opérations de sous-marins allemands, également appelés U-boots (Unterseeboote), ont menacé la souveraineté du Canada lors de la Première Guerre mondiale et de la Deuxième Guerre mondiale. Les sous-marins allemands ont opéré dans les eaux canadiennes (et les eaux américaines) durant les deux guerres mondiales, ciblant les navires marchands qui naviguaient seuls ou en convoi. Des douzaines de navires marchands ont été perdus en raison des actions ennemies, tout comme des navires de guerre canadiens, et des centaines de vies.
Première Guerre mondiale
Durant la Première Guerre mondiale, l’Allemagne mène une campagne sous-marine sans limites contre tous les navires marchands, y compris ceux qui sont neutres. En 1917, la Grande-Bretagne institue finalement un système de convois pour le transport transatlantique. Toutefois, son succès fait craindre que les sous-marins ne traversent l’Atlantique pour trouver des cibles plus faciles.
Les sous-marins allemands apparaissent pour la première fois dans les eaux américaines en mai 1918. Au mois d’août, le U-156 fait son apparition dans les eaux canadiennes, posant des mines au large de Halifax et incendiant la goélette Dornfontein dans la baie de Fundy. Quelques jours plus tard, le U-156 coule le pétrolier britannique Luz Blanca à 55 km au sud de Halifax. Lorsqu’arrive la fin de la guerre, les sous-marins allemands ont coulé plusieurs navires dans les eaux canadiennes, dont la plupart sont des bateaux de pêche. La Marine royale canadienne ne peut pas faire grand-chose, car elle ne dispose que de peu de navires ou de personnel qualifié. (Voir Le Canada et la lutte anti-sous-marine pendant la Première Guerre mondiale.)
Deuxième Guerre mondiale
Les sous-marins allemands reviennent dans les eaux canadiennes et américaines en 1942 durant la bataille de l’Atlantique, avec une technologie améliorée et un double plan stratégique : attaquer des navires isolés afin d’empêcher la formation de convois et immobiliser les forces armées qui pourraient autrement être déployées dans les eaux européennes.
Mais les eaux canadiennes et américaines sont vulnérables aux attaques des sous-marins allemands. L’engagement du Canada dans la guerre outre-mer et dans l’escorte de convois dans l’Atlantique ne lui laisse que des ressources limitées pour sa propre défense intérieure. Les États-Unis, qui se joignent à la guerre en décembre 1941, sont inexpérimentés et mal préparés.
En janvier 1942, les sous-marins allemands lancent leurs premières attaques dans les eaux nord-américaines (Opération Drumbeat [Paukenschlag]). Lorsqu’arrive le mois d’avril 1942, les sous-marins allemands ont coulé 198 navires (1 150 675 tonnes), la moitié étant des pétroliers, au large de la côte est des États-Unis. En mai, on compte 19 sous-marins allemands en opération dans les eaux américaines. Les États-Unis n’arrivent à adopter un système de convois côtiers qu’à la mi-mai, malgré des conseils de la Grande-Bretagne et du Canada. Ce délai est coûteux : environ 360 navires sont perdus dans les eaux américaines entre janvier et juin 1942.
Bataille du Saint-Laurent
Des sous-marins allemands opèrent également dans les eaux côtières canadiennes durant la Deuxième Guerre mondiale. Dans la nuit du 11 au 12 mai, le U-553 torpille les navires à vapeur SS Nicoya et SS Leto au large de la côte nord de la péninsule gaspésienne. En octobre, six sous-marins allemands indépendants entrent le fleuve Saint-Laurent et le golfe par le détroit de Cabot et le détroit de Belle Isle et se rendent jusqu’à Rimouski, à quelque 300 km de Québec.
Dans ces eaux, les sous-marins allemands coulent deux navires de guerre canadiens (le NCSM Raccoon et le NCSM Charlottetown) et 20 navires en convois en 1942. Le naufrage du SS Caribou le 14 octobre 1942, qui cause la mort de 31 membres d’équipage et 136 passagers, est considéré comme le pire désastre côtier de cette bataille. Le plus gros tonnage (neuf navires incluant le Charlottetown) est coulé par le U-517, dont le capitaine Paul Hartwig devient, après la guerre, vice-amiral de la marine fédérale d’Allemagne, partenaire du Canada au sein de l’OTAN.
Les attaques des sous-marins allemands dans le Saint-Laurent alimentent le débat sur la conscription à la Chambre des communes, enveniment les relations entre le Québec et Ottawa et forcent le cabinet de guerre, le 9 septembre 1942, à fermer le Saint-Laurent à tous les navires alliés, à l’exception du commerce côtier.
Des sous-marins allemands patrouillent dans les eaux canadiennes jusqu’à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, et durant la dernière phase du conflit, ils détruisent les trois dernières victimes navales de la guerre côtière. Le NCSM Shawinigan est torpillé par le U-1228 dans le détroit de Cabot le 25 novembre 1944; aucun membre de l’équipage ne survit. Le U-806 coule le NCSM Clayoquot le 24 décembre 1944 près du phare de Halifax, et le U-190 coule le NCSM Esquimalt le 16 avril 1945 près du même endroit. Le U-190 se rend au Canada le 11 mai 1945, et il est mis en service au mois de juin dans la Marine royale du Canada, en tant que NCSM U-190. Ce sous-marin est coulé cérémonieusement le 21 octobre 1947, à l’endroit même où il a coulé le Esquimalt.
Missions spéciales et débarquements des sous-marins allemands
Les sous-marins allemands effectuent également des missions spéciales durant la Deuxième Guerre mondiale. Le 6 mai 1943, le U-262 essaie d’embarquer des prisonniers de guerre allemands évadés à North Point à l’Île-du-Prince-Édouard, tandis que le U-536 tente un exploit semblable le 28 septembre 1943 à Pointe de Maisonnette au Nouveau-Brunswick. Le U-119 et le U-220 posent des mines au large de Halifax et de St. John’s en juin et octobre 1943 respectivement.
Les sous-marins allemands débarquent des hommes au Québec et au Labrador à deux reprises durant la Deuxième Guerre mondiale. Dans la nuit du 8 au 9 novembre 1942, l’espion Werner Janowski débarque du U-518 près de New Carlisle au Québec, et il est presque immédiatement capturé. Il devient plus tard un agent double de la GRC. Dans la nuit du 22 au 23 octobre 1943, l’équipage du U-537 débarque une station météorologique automatique à Martin Bay, à 32 km au sud du cap Chidley au Labrador. La station transmet des données pendant environ trois mois. Bien qu’elle soit aperçue par des visiteurs occasionnels, elle n’est identifiée correctement qu’en juillet 1981.