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Victoria Pioneer Rifle Corps (corps des sapeurs-carabiniers de Victoria)

Le Victoria Pioneer Rifle Corps (corps des sapeurs-carabiniers de Victoria) était une unité de milice noire en Colombie-Britannique. Elle est considérée comme la première unité militaire britannique ou canadienne formée à l’ouest de l’Ontario et elle a été l’une des nombreuses unités de milice noire au Canada au 19e siècle. Formé en 1860 par des immigrants de la Californie, le Pioneer Rifles a été dissous en 1866.

Victoria Pioneer Rifle Corps

Contexte

En 1858, le gouverneur James Douglas invite les Noirs américains libres vivant à San Francisco à migrer vers la colonie britannique de l’île de Vancouver. James Douglas veut en effet augmenter le nombre de colons sur le territoire afin d’empêcher une éventuelle annexion par les États-Unis; il sait également que les Noirs américains sont confrontés à une animosité raciale croissante en Californie. Plus de 600 personnes acceptent son offre et s’installent à Victoria, à Saanich et sur l’île de Saltspring. (Voir Histoire des Noirs au Canada jusqu’en 1900; Sylvia Stark.)

Pourtant, les nouveaux immigrants sont également confrontés à la discrimination dans la colonie britannique. Ainsi, lorsque des hommes noirs se portent volontaires pour la brigade des incendies de Victoria en 1859, ils sont rejetés par les organisateurs blancs. Ils approchent donc James Douglas pour former une unité de milice volontaire. Craignant le déclenchement d’une guerre entre les États-Unis et la Grande-Bretagne au sujet de la propriété des îles San Juan (voir Guerre du cochon), il accepte leur proposition et, dès avril 1860, le Victoria Pioneer Rifle Corps est formé. (L’unité est également connue sous le nom de Pioneer Rifles ou African Rifles.) Ce n’est toutefois qu’en juillet 1861 qu’elle prête officiellement serment en tant qu’unité.

Les Pioneer Rifles

Les Pioneer Rifles sont dirigés par des officiers noirs : un capitaine, deux lieutenants et un sergent. Le recrutement commence aussitôt et atteint rapidement 60 officiers et soldats. Ces officiers sont élus sur une base annuelle. Au cours des cinq années suivantes, l’unité compte en moyenne de 40 à 50 soldats. L’une de leurs premières tâches est de construire leur propre salle d’exercice, située à l’extrémité supérieure de la rue Yates. Elle est ensuite déplacée un pâté de maisons plus loin, dans une propriété qu’ils achètent sur la rue View. La salle sert également de centre communautaire pour la communauté noire de Victoria et un lieu où sont organisés des concerts et d’autres événements destinés à collecter des fonds pour l’unité.

L’unité reçoit des sergents instructeurs de la Marine royale depuis les navires de la Marine royale dans le port d’Esquimalt et s’entraîne deux fois par semaine. Lorsque le temps le permet, ils s’exercent sur un terrain communal de quatre hectares sur Church Hill. Ils effectuent également des exercices dans le parc Beacon Hill. Un journal mentionne d’ailleurs leur « très bon style » après l’un de ces exercices. Les Pioneer Rifles célèbrent également des événements tels que l’anniversaire de la reine Victoria par un défilé. Les dépenses de l’unité sont couvertes par des souscriptions de la communauté noire et des collectes de fonds, notamment des danses et des événements musicaux. En janvier 1863, après avoir reçu des instruments de musique, les Pioneer Rifles forment une fanfare qui joue lors des bals et lorsque les Rifles sont en marche. Plus tard, les Rifles demandent le soutien du gouvernement colonial, mais sans succès.

Lors de l’inauguration du nouveau gouverneur, Arthur Edward Kennedy, en avril 1864, les Pioneer Rifles ne sont pas autorisés à défiler devant lui. L’idée de leur participation fait en effet l’objet d’un grand débat, et de nombreuses lettres de deux camps sont envoyées à ce sujet. Bien que les auteurs des lettres ne font pas référence à la couleur de la peau des membres de l’unité, au moins un officier de la Marine royale attribue l’interdiction au racisme. Les organisateurs blancs du défilé justifient quant à eux l’exclusion des Rifles en affirmant que les pompiers volontaires refusaient de défiler derrière eux.

Le gouverneur Arthur Edward Kennedy déclare pour sa part qu’il n’acceptera aucune unité militaire basée sur la classe, la couleur ou la nationalité. Il ne fait cependant rien pour soutenir les hommes noirs qui veulent intégrer un régiment (blanc) nouvellement formé. En 1866, les Pioneer Rifles sont dissous par manque d’intérêt. De nombreux immigrants noirs rentrent aux États-Unis à cette époque, après la fin de la guerre civile américaine et de l’esclavage en 1865.

Signification

Le Victoria Pioneer Rifle Corps a démontré la loyauté des citoyens noirs envers la colonie britannique et leur désir d’être considérés comme des égaux. Après s’être vus refuser la participation à une brigade de pompiers blancs, ils ont rapidement formé une unité de milice efficace. Par contraste, il faut deux tentatives avant que les résidents blancs réussissent à former leur propre unité. En fin de compte, l’animosité raciale des colons blancs mène à la fin des Pioneer Rifles.