Amarjeet Sohi, politicien, ministre du Cabinet fédéral, maire d’Edmonton de 2021 à aujourd’hui (né le 8 mars 1964 à Banbhaura, au Pendjab, en Inde). Après avoir été faussement accusé de terrorisme et emprisonné en Inde pendant 21 mois, Amarjeet Sohi s’implique dans la politique municipale d’Edmonton. Conseiller municipal pendant huit ans, il est ensuite élu comme député libéral dans le comté de Mill Woods, à Edmonton. Amarjeet Sohi devient tour à tour ministre de l’Infrastructure et des Collectivités et ministre des Ressources naturelles. Il n’est toutefois pas réélu en 2019. Le 18 octobre 2021, il devient la première personne d’une minorité raciale à devenir maire d’Edmonton.
Jeunesse et famille
Le frère aîné d’Amarjeet Sohi, Jagdev, est le premier de sa famille à quitter le Pendjab, en Inde, pour s’installer au Canada. En 1981, il parraine l’arrivée de sa famille à Edmonton. À 17 ans, Amarjeet Sohi apprend à s’adapter à sa nouvelle vie au Canada, mais, comme bon nombre d’immigrants, il subit de l’intimidation liée au racisme. Persévérant, il suit toutefois des cours d’anglais langue seconde, fréquente l’école secondaire Bonnie Doon et consacre plusieurs heures à l’apprentissage de l’anglais à la bibliothèque locale.
Amarjeet Sohi travaille dans un restaurant à service rapide, nettoie des immeubles et devient chauffeur de taxi. Il s’implique également auprès d’un théâtre amateur en tant qu’acteur et dramaturge et fait du bénévolat pour plusieurs projets culturels et récréatifs ainsi que pour une société littéraire pendjabie locale. Quoiqu’actif dans la communauté pendjabie d’Edmonton, Amarjeet Sohi n’adhère pas strictement au sikhisme et ne porte ni le turban ni la barbe. En effet, il s’oppose à la fois au fondamentalisme sikh et à l’oppression des sikhs par le gouvernement indien.
Prisonnier politique en Inde (1988 à 1990)
En 1988, Amarjeet Sohi retourne en Inde pour visiter des membres de sa famille. Il y fait de l’activisme social et revendique une réforme agraire dans l’État du Bihar. Toutefois, à la veille d’une manifestation, il est mis en état d’arrestation et accusé de terrorisme. Comme il le raconte en 2015 : « Lorsqu’ils m’ont vu, un sikh originaire du Pendjab et du Canada, ils se sont dit que j’étais probablement un terroriste ». Le jeune homme est alors torturé et interrogé pendant une semaine, puis emprisonné sans accusations formelles ni procès.
Amarjeet Sohi réussit à attirer l’attention du public en faisant une grève de la faim pendant une semaine. La presse locale indienne commence alors à parler de sa situation. Au même moment, à Edmonton, sa famille convainc David Kilgour, le député conservateur du sud-est d’Edmonton, de faire campagne pour sa libération. Le gouvernement de Brian Mulroney et le Service canadien du renseignement de sécurité apportent également leur concours. Amarjeet Sohi est enfin libéré le 9 juillet 1990, au terme d’une période de 21 mois d’emprisonnement, dont 18 en isolement.
Retour au Canada
« J’étais plutôt ébranlé à mon retour », confie Amarjeet Sohi au Edmonton Journal en 2015. « Je me suis quelque peu replié sur moi-même. Je ne me suis remis sur pied que quelques années plus tard. » Travaillant comme chauffeur d’autobus pour le réseau de transport d’Edmonton de 1998 à 2007, il s’implique également auprès du syndicat de chauffeurs local. Amarjeet Sohi épouse sa femme, Sarbjeet, au Pendjab en 1993. De leur union naît une fille, Seerat. Amarjeet devient citoyen canadien en 1994.
Conseil municipal d’Edmonton
En 2004, Amarjeet Sohi pose sa candidature comme conseiller municipal du quartier 6 d’Edmonton. Il arrive en troisième place parmi six candidats. En 2005, il fonde avec une équipe le Mill Woods Crime Council, l’un des deux conseils de prévention de la criminalité dans l’ouest de la ville. En 2007, il se présente à nouveau comme conseiller pour le quartier 6 et, cette fois-ci, remporte l’élection. Il est ensuite réélu en 2010, avec 64 % des voix, puis en 2013, avec 75 % des voix.
Pendant ses huit années comme conseiller, Amarjeet Sohi travaille à l’amélioration du système de métro léger, à la revitalisation du centre-ville ainsi qu’à la construction de nouvelles installations récréatives, d’un centre pour personnes âgées, d’une nouvelle bibliothèque et d’un centre multiculturel. Il reçoit plusieurs récompenses locales pour souligner ses efforts pour réduire la pauvreté, la violence basée sur le genre et le racisme. Il aide également à fonder REACH Edmonton, un organisme axé sur la mobilisation des administrations municipales, des organismes gouvernementaux et des citoyens pour repérer et combler les lacunes dans les programmes de services sociaux. En 2015, l’Edmonton Journal décrit Amarjeet Sohi comme un « conseiller sensé et respecté », et affirme qu’il est « ouvert aux compromis tout en faisant preuve d’un militantisme ferme, mais tranquille ». Le politicien représente également Edmonton auprès de l’Association canadienne du transport urbain et de l’Alberta Urban Municipalities Association (association des municipalités urbaines de l’Alberta).
Député fédéral
En 2015, Amarjeet Sohi devient le candidat libéral du comté de Mill Woods, à Edmonton, pour l’élection fédérale à venir. Comme bien d’autres, le comté est redécoupé pour tenir compte des changements démographiques. (Voir Redécoupage des circonscriptions électorales fédérales.) Les comtés destinés à être fusionnés pour créer celui de Mill Woods sont alors représentés par deux députés conservateurs : Mike Lake, qui a remporté trois élections de suite dans le comté Edmonton-Mill Woods-Beaumon, et Tim Uppal, qui a fait partie du Cabinet du premier ministre Stephen Harper et a été élu dans le comté d’Edmonton-Sherwood Park en 2008 et en 2011. L’élection d’Amarjeet Sohi ne s’annonce donc pas facile.
Tout au long de sa campagne électorale, Amarjeet Sohi affirme que ses priorités sont de profiter des fonds du gouvernement fédéral pour créer de nouvelles infrastructures, une nouvelle ligne de métro léger et de nouveaux logements plus abordables. Le résultat final du vote est si serré qu’il requiert un dépouillement judiciaire. Amarjeet Sohi remporte finalement l’élection avec un écart de 92 voix.
Ministre du Cabinet fédéral (2015 à 2019)
Le premier ministre Justin Trudeau invite Amarjeet Sohi à faire partie de son Cabinet à titre de ministre de l’Infrastructure et des Collectivités. Le député participe alors à la création d’un plan sur 12 ans allouant plus de 180 milliards de dollars à l’amélioration des routes, des ponts et des ports canadiens. Le plan prévoit également de la recherche et des investissements pour augmenter le nombre de lignes de transport en commun, la propreté de l’eau et des systèmes de distribution ainsi que la quantité de logements abordables. Le plan, miné par plusieurs problèmes et retards, ne réussit toutefois pas à augmenter le PIB dans la mesure voulue.
Lors du remaniement ministériel de juillet 2018, Amarjeet Sohi est nommé ministre des Ressources naturelles. (Voir aussi Ressources naturelles au Canada.) Il devient ainsi responsable de dossiers qui comportent plusieurs défis. Lorsqu’il accepte le poste, les politiques climatiques du gouvernement sont critiquées par les premiers ministres provinciaux de l’Ouest et les acteurs de l’industrie pétrolière et gazière. Le secteur pétrolier de l’Alberta s’oppose également au projet de loi C-69, qui veut modifier le processus d’approbation de projets d’infrastructure d’envergure, comme la construction de pipelines. À titre de ministre, Amarjeet Sohi dirige donc le projet d’expansion du pipeline Trans Mountain, obtient l’approbation du Cabinet et organise des consultations avec les communautés autochtones.
Lors de l’élection fédérale d’octobre 2019, Amarjeet Sohi perd le comté de Mill Woods aux mains de Tim Uppal. Contrairement à l’élection serrée de 2015, ce dernier remporte le comté avec une bonne avance (il récolte 50 % des voix et Sohi, 33 %).
Vie personnelle et retour à la fonction publique
Après sa défaite en 2019, Amarjeet Sohi accepte un poste d’enseignant à l’Université MacEwan d’Edmonton. Il donne alors un nouveau cours conçu pour apprendre aux hauts dirigeants à miser sur la collaboration communautaire dans la lutte contre le racisme systémique. Il devient également conseiller pour l’entreprise ALAR Strategy Group d’Ottawa.
Le 17 mai 2021, Amarjeet Sohi se tourne à nouveau vers la politique municipale et annonce sa candidature comme maire d’Edmonton pour succéder à Don Iveson, qui ne cherche pas à se faire réélire. Il affirme alors qu’il se présente comme leader puisqu’il croit « avoir l’esprit de collaboration, de compromis et de connexion dont la ville a besoin ». Sa campagne s’articule autour de six grands axes : la qualité de vie, le climat et l’environnement, l’équité, les services sociaux, le développement économique, et le soutien social. Il insiste d’ailleurs sur le fait qu’aucun de ces éléments ne peut être pris efficacement en charge si les autres ne le sont pas aussi.
Onze candidats posent leur candidature à la mairie, dont quatre possédant déjà de l’expérience comme conseillers. Tout au long de la campagne, Amarjeet Sohi met de l’avant son expérience dans le secteur municipal et au Cabinet fédéral. Il affirme qu’il saura bâtir des ponts entre les gens, les chefs d’entreprise et les trois paliers de gouvernement pour faire avancer les projets.
Maire d’Edmonton
Le 18 octobre 2021, Amarjeet Sohi devient la première personne d’une minorité raciale à être élue maire d’Edmonton. Sa victoire est sans équivoque : il récolte 45 % des voix, alors que Mike Nickel, en deuxième place, en récolte 25 %. Le soir de l’élection, il félicite tous les autres candidats et déclare : « J’espère que ma victoire, et celle de la communauté, sauront inspirer d’autres personnes à se porter à la candidature et à apporter des changements structurels. » Il affirme également que la diversité d’une communauté doit se refléter dans ses institutions publiques, afin que des personnes aux parcours variés aient un plus fort sentiment d’appartenance et ne soient pas dissuadées de participer à la vie publique. (La victoire d’Amarjeet Sohi survient le jour même où Jyoti Gondek, une autre personne canadienne originaire du Pendjab, devient la première femme élue mairesse de Calgary.)
En janvier 2022, le maire Sohi déclare que la ville doit se concentrer sur quatre priorités pour se remettre de la pandémie de COVID-19 : le financement des logements et des services connexes, l’amélioration du transport en commun, la relance du centre-ville, et le soutien à la candidature de la ville comme hôte de la Coupe du monde de la FIFA de 2026. Un mois plus tard, il se désole de constater que le budget provincial ne prévoit aucun financement pour ces priorités et d’autres enjeux, comme la lutte contre la crise des opioïdes.