Bataille du Long Sault | l'Encyclopédie Canadienne

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Bataille du Long Sault

La bataille du Long Sault s’est déroulée pendant une dizaine de jours en mai 1660. Elle a opposé les Français de la colonie de Ville-Marie et leurs alliés wendats et algonquins à une force beaucoup plus importante de Haudenosaunee. Les forces françaises, dirigées par Adam Dollard des Ormeaux, sont complètement décimées lors de la bataille. Pendant des siècles on a considéré les actions d’Adam Dollard des Ormeaux comme héroïques, car on croyait qu’il avait empêché les Haudenosaunee d’attaquer Ville-Marie. Des études récentes ont cependant jeté des doutes sur les récits de la bataille, sur les intentions d'Adam Dollard des Ormeaux et les actions qu’il a menées. On se demande également si Ville-Marie était véritablement menacée par les Haudenosaunee.

Contexte historique

Les Relations des Jésuites inscrivent la bataille du Long Sault dans le contexte des guerres que se font les Wendats et les Haudenosaunee depuis des décennies. D’après ce texte historique, ce sont les Wendats qui ont cherché à faire la guerre aux Haudenosaunee en représailles des pertes qu'ils avaient subies au cours des années précédentes.

Selon cette source, 40 Wendats menés par Anahotaha veulent aller attaquer leurs ennemis qui reviennent de leur chasse. Ils passent par Trois-Rivières où six Algonquins les rejoignent sous le commandement de Mitiwemeg. Le groupe poursuit sa route jusqu’à Ville-Marie et 17 Français se joignent à eux sous le commandement d'Adam Dollard des Ormeaux. Ce dernier souhaite aussi mener une campagne contre les Haudenosaunee

Contrairement aux guerriers autochtones aguerris, les volontaires français sont moins habitués à la guerre.

Bataille du Long Sault

Adam Dollard des Ormeaux et ses guerriers quittent Ville-Marie et, après plusieurs jours de canotage, s’arrêtent pour tendre une embuscade aux Haudenosaunee. Cependant, un groupe avancé d'ennemis, comptant près de 200 personnes, les repère; Adam Dollard des Ormeaux et ses compagnons trouvent alors refuge dans un ancien fort algonquin qui n’est plus qu'une simple palissade. Ce fort serait situé le long de la rivière des Outaouais, à peu près à mi-chemin entre Ottawa et Montréal, près de Carillon aujourd’hui. On débat encore de son emplacement exact.

Pendant plusieurs jours, les Haudenosaunee assiègent les Français et leurs alliés wendats et algonquins. De plus, 500 Oneidas et Kanienʼkehá꞉ka viennent prêter main-forte aux assiégeants. Les combats sont intenses et féroces, mais l’usage des armes à feu, le fort et l’expérience militaire donnent l’avantage aux Français et à leurs alliés autochtones. Lors de la bataille, les Wendats exhibent la tête coupée d’un chef onondaga au-dessus du mur de la palissade.

Toutefois, la situation se détériore pour les défenseurs du fort. Le chef wendat Annahotaha propose de négocier. Deux Wendats et un Oneida vont donc parlementer avec les Haudenosaunee. Mais au même moment des Wendats adoptés par les Haudenosaunee s’approchent du fort et convainquent bon nombre des leurs de déserter le fort. On leur affirme qu'ils seront mieux traités par les Haudenosaunee que par les Français. Les Wendats commencent à déserter, n’étant sans doute pas prêts à se battre jusqu’à la mort pour leurs alliés français. D’ailleurs, par le passé, ces derniers n’avaient pas fourni beaucoup d’appui aux Wendats dans leurs guerres contre les Haudenosaunee.

Alors que les pourparlers se poursuivent, les Français, qui se méfient, ouvrent le feu sur les Haudenosaunee, mettant fin à la trêve. Les Haudenosaunee reprennent leur attaque et tuent le chef Annahotaha. S’attaquant aux murs de la palissade avec des hachettes, les Haudenosaunee réussissent à créer des brèches dans les fortifications. Selon le récit traditionnel, Adam Dollard des Ormeaux aurait lancé un baril de poudre à canon sur les assaillants pour les retarder. L’engin explosif aurait frappé une branche d'arbre et serait retombé dans le fort, blessant gravement les derniers défenseurs. On ne sait pas si l’explosion a tué Dollard des Ormeaux sur le coup ou s’il est mort de ses blessures plus tard, mais la bataille est perdue, les Haudenosaunee sont victorieux. On dit que seuls cinq ou sept Français et quatre Wendats survivent à la bataille. Ces derniers auraient ensuite été torturés et tués.

Dollard des Ormeaux

Débat sur la représentation historique de la bataille

De nombreux historiens, politiciens, journalistes et religieux ont longtemps donné une vision héroïque de la bataille. Plusieurs soulignent la bravoure d’Adam Dollard des Ormeaux et de ses alliés autochtones, ainsi que leur martyre pour la défense de la foi et de la Nouvelle-France. François Dollier de Casson dans son ouvrage Histoire du Montréal fournit une interprétation patriotique et religieuse des actions d’Adam Dollard des Ormeaux lors de la bataille du Long Sault.

Depuis les années 1930, des historiens mettent en doute cette représentation héroïque de la bataille. Ils soulignent, entre autres, que ni Adam Dollard des Ormeaux ni les Wendats n’étaient au courant de la présence d’un groupe de guerriers haudenosaunee dans les environs de Ville-Marie. Les Français et leurs alliés pensaient plutôt attaquer des groupes de chasseurs haudenosaunee pour prendre leurs peaux de castor et en faire commerce avec un groupe d'Odawas. De plus, selon des rapports néerlandais, seulement 14 Haudenosaunee ont été tués et 19 blessés lors de la bataille. Il semble donc peu probable que des pertes si peu nombreuses aient amené les Haudenosaunee à renoncer à un assaut sur Ville-Marie. En rétrospective, certaines personnes argumentent qu’Adam Dollard des Ormeaux et ses alliés étaient les agresseurs alors que les Haudenosaunee se défendaient.

Héritage

Un bas-relief de la bataille mettant en évidence Adam Dollard des Ormeaux se trouve sur le piédestal du monument Maisonneuve sur la Place d'Armes à Montréal. (Voir Paul de Chomedey de Maisonneuve.)

Place d'Armes, Montréal

Un tableau de la bataille orne un mur du chalet du Mont-Royal au belvédère de Kondiaronk.

Une plaque commémorative décrivant la bataille se trouvait sur la route 344 près de Carillon, au Québec, mais elle a été déplacée vers un nouvel emplacement à proximité du Parc Provincial Voyageur à Chute-à-Blondeau, en Ontario.