James Patrick Brady, prospecteur, chef métis (né le 11 mars 1908 à Lake St. Vincent, en Alblerta; disparu le 7 juin 1967 dans la région de Foster Lakes, au Saskatchewan). Petit-fils d’un des soldats de Louis Riel, Jim Brady est devenu un leader parmi les Métis du nord de l’Alberta et de la Saskatchewan. Il a été actif dans la politique radicale des années 1930, essayant en vain de persuader la Fédération du Commonwealth coopératif (FCC) de la Saskatchewan de mettre en œuvre des politiques progressistes pour les Autochtones. Jim Brady est un membre fondateur de l’Association des Métis d’Alberta et des Territoires du Nord-Ouest en 1932 et est demeuré une figure majeure de l’organisation en tant qu’enseignant influent. Les derniers moments de sa vie sont entourés de mystère, car il a disparu lors d’un voyage de prospection en 1967.
Famille et premières années
Jim Brady naît en 1908 au lac Saint-Vincent, près de St-Paul-des-Métis, la plus grande communauté métisse de l’ Alberta devenue exclusivement métisse après 1885. En 1909, cependant, en raison d’un afflux de squatteurs blancs, St-Paul-des-Métis est dissoute en tant que colonie métisse et ouverte à la colonisation générale. Son père, Jim Brady Sr, est agent foncier du Dominion, maître de poste et un riche commerçant. Selon la source, l’ascendance de Jim Brady Sr. est répertoriée comme étant écossaise ou irlandaise. Sa mère, Philomena Archange Garneau, est la première infirmière métisse autorisée en Alberta.
C’est le grand-père maternel de Jim Brady, Laurent Garneau, ainsi que d’autres proches, qui s’occupent de l’élever après le décès de sa mère. Ami de Louis Riel, Laurent Garneau s’est joint à Riel et aux Métis lors de la Rébellion de la rivière Rouge de 1869-1870 et de la Rébellion du Nord-Ouest en 1885. De Laurent Garneau, Jim Brady apprend les raisons derrière les luttes des Métis dans le Nord-Ouest. Plus tard, il décrit l’ingéniosité de sa grand-mère lorsque cinq officiers de la Police à cheval du Nord-Ouest arrivent chez elle pour arrêter son mari en 1885. Ils sont à la recherche d’une lettre de Louis Riel adressée à Laurent Garneau. La grand-mère de Jim Brady, elle, est en train de faire la lessive quand les policiers arrivent, et jettent donc la lettre et d’autres documents incriminants dans sa cuve de lavage et les détruit en les frottant sur la planche à laver.
L’histoire et la composition de la ville natale de Jim Brady, St-Paul-des-Métis, ont eu une incidence importante sur le reste de sa vie. Après la Rébellion du Nord-Ouest de 1885, de nombreux Métis se sont déplacés plus à l’ouest, s’installant en petits groupes familiaux dans des régions isolées de l’Alberta. Beaucoup sont de pauvres squatteurs qui mènent une existence précaire sur de petites terres de la Couronne. En comparaison, la vie de classe moyenne de Jim Brady est relativement privilégiée. Quoi qu’il en soit, les membres de la famille de Jim Brady sont de fervents défenseurs de l’identité métisse et de l’égalité sociale. Les politiciens, les militants radicaux et les partisans des syndicats servent ainsi de tuteurs informels à Jim Brady lorsqu’il est jeune. Plus tard, il éduque lui-même les communautés métisses sur les droits des squatteurs sur les terres de la Couronne et il les mobilise autour de cet enjeu.
De façon autodidacte, Jim Brady s’éduque sur l’histoire et la politique. Selon ses proches, Jim Brady parle couramment le cri, le michif, l’anglais et le français. Il parle également un peu d’allemand et d’espagnol et connaît le latin.
Activisme politique en Alberta
À la fin des années 1920, alors qu’il travaille comme ouvrier, Jim Brady adopte des philosophies marxistes et se considère comme communiste. Avec d’autres dirigeants métis comme Felix Callihoo, Joe Dion, Peter Tomkins et Malcolm Frederick Norris, Jim Brady aide à organiser politiquement les Métis en Alberta dans les années 1930. CE travail leur vaut le surnom « Les cinq grands » ou « Les cinq fabuleux ». Jim Brady joue aussi un rôle essentiel dans la création de l’Association des Métis de l’Alberta (aujourd’hui la Nation des Métis de l’Alberta) et de peuplements métis en Alberta.
En 1933, l’Association des Métis de l’Alberta compte 1 200 membres répartis dans 41 chapitres locaux ; sa priorité est de faire pression sur le gouvernement pour améliorer les conditions sociales et économiques des Métis et des Indiens non inscrits de la province. Jim Brady et ses alliés pressent en effet le gouvernement provincial d’étudier leurs conditions de vie. En raison de leur intense lobbying, le gouvernement de l’Alberta nomme la Commission royale Ewing en 1934 pour entendre les témoignages et faire des recommandations concernant la pauvreté, les problèmes de santé et le manque d’éducation des Métis dans la province. Au cours des audiences, Jim Brady joue un rôle de stratège politique. Son lobbying contribue à l’adoption par le gouvernement albertain de la Metis Population Betterment Act en 1938, qui donne aux Métis de l’Alberta des parcelles de terre et des programmes d’aide socia
Jim Brady, 1944
Service militaire
Lorsque la Deuxième Guerre mondiale éclate, les Forces armées canadiennes refusent initialement l’entrée de Jim Brady dans l’armée en raison de ses affiliations communistes. Au lieu d’aller à la guerre, ce dernier continue donc à s’impliquer activement dans le Parti communiste du Canada et la Fédération du Commonwealth coopératif (FCC), une implication ayant commencé dans les années 1930. En 1941, il supervise la colonie métisse de Wolf Lake, parrainée par le gouvernement et dont l’existence est de courte durée. Deux ans plus tard, en juin 1943, Jim Brady est accepté dans l’armée et se joint à l’effort de guerre outre-mer, montant à bord d’un navire de transport de troupes à destination de l’Angleterre en octobre. Pendant son service militaire, il tient un journal détaillé de ses expériences de guerre. Ces « journaux », qu’il tient de 1944 à 1965, sont conservés dans le fonds James Brady (collection) au Glenbow Museum de Calgary, en Alberta.
Le saviez-vous?
Pendant qu’il est dans la colonie métisse de Wolf Lake en 1941 et à Cumberland House, en Saskatchewan, en 1949, Jim Brady commence à créer un enregistrement visuel de la vie des Métis. Photographe amateur, il croque des portraits de Métis vivant et travaillant autour de ces colonies. On y voit des femmes dans les champs et des hommes en vêtements de travail ou en uniforme. Sur ses photos, Jim Brady inclut toujours le nom du sujet, la date et le lieu, et parfois le lieu de naissance. Cela a permis de créer de nouvelles archives sur l’identité métisse à une époque où la plupart des Métis apparaissent dans les registres gouvernementaux uniquement par leur nom de famille. Aujourd’hui, des centaines d’images de Jim Brady, dont certaines remontent aux années 1920, se trouvent dans les archives du Glenbow Museum de Calgary, en plus de sa correspondance, de journaux intimes et d’albums contenant des coupures de presse sur sa carrière politique.
Après la Deuxième Guerre mondiale, Jim Brady travaille pour le ministère des Ressources naturelles en tant qu’agent de conservation. Il fait aussi de la prospection et aide à établir des coopératives de ressources dans les industries du poisson, du bois et de la fourrure, principalement dans le nord de la Saskatchewan et de l’Alberta.
Après la guerre, lorsque Jim Brady s’installe dans le peuplement métis de Deschambault Lake, en Saskatchewan, il devient agent de terrain au poste de traite du gouvernement et supervise les pêcheurs locaux. De 1948 à 1951, il vit à Cumberland House, un site géré par la Fédération du Commonwealth coopératif, en Saskatchewan ; cependant, au début des années 1950, il commence à être désillusionné par la fédération.
En 1951, Jim Brady s’installe à La Ronge, dans le nord de la Saskatchewan, où il vit dans une cabane en bois rond débordant de livres savants. Tout au long de sa vie, Jim Brady étudie avec passion l’histoire et la politique et vise l’égalité des droits pour les Métis. Comme il l’explique à un journaliste en 1960 : « Ils [les Métis] doivent être libérés des handicaps que le colonialisme leur a imposés. » Lors d’une convention de la FCC en 1963, il tente en vain de porter à l’attention du chef Tommy Douglas le degré de souffrance des Autochtones dans le Nord.
Avec Malcolm Frederick Norris, Jim Brady contribue à la création de l’Association des Métis de la Saskatchewan et est l’un des principaux organisateurs du chapitre de La Ronge (aujourd’hui connue par les membres de la communauté métisse sous le nom de « Jim Brady Local #19 »). En 1965, l’objectif de l’organisation est « d’organiser les personnes d’origine indienne dans la province de Saskatchewan afin d’assurer la reconnaissance et la réalisation de nos espoirs et de nos aspirations à un meilleur mode de vie en accord avec les possibilités offertes par la société canadienne ».
Dans ses dernières années, Jim Brady renonce à organiser de grands projets et se concentre plutôt sur la réduction des risques locaux et l’éducation dans la région de La Ronge.
Disparition de Jim Brady
En juin 1967, Jim Brady et son ami cri Absolum « Abbie » Halkett, conseiller de la bande de Lac La Ronge, partent en voyage de prospection près du lac Lower Foster, dans le nord de la Saskatchewan. Bien que l’on ait retrouvé leur campement sur la rive et leurs canoës dans l’eau, les deux hommes, eux, disparaissent. Une recherche approfondie du lac par la GRC ne révèle aucun indice, et leur corps n’est jamais retrouvé. Certains membres de la communauté pensent que les deux hommes ont été assassinés en raison des visions politiques radicales de Jim Brady et de leur franc-parler à tous deux concernant les conditions de vie inférieures aux normes dans les communautés du nord.
Des décennies plus tard, Eric Bell, qui a rencontré Jim Brady dans son enfance et qui dirige les services de gestion des urgences de La Ronge, envoie une équipe de recherche et de récupération pour explorer le lac. Ils utilisent un véhicule télécommandé qui peut prendre des images sous l’eau. Deux recherches, en août et septembre 2018 respectivement, permettent de découvrir une « anomalie non naturelle dans le lac ». Deux spécialistes conviennent que cela pourrait indiquer la présence de restes humains, mais ces preuves, selon la GRC, ne sont toujours pas concluantes.
Patrimoine
La communauté métisse célèbre Jim Brady comme l’une des figures politiques les plus influentes du 20e siècle et un acteur clé du mouvement de libération des Métis. Aujourd’hui, certaines familles métisses se rappellent encore comment la fierté de Jim Brady et son dévouement à instaurer un changement positif ont contribué à ouvrir leur esprit et à envisager un meilleur avenir pour leur peuple.
Un monument en pierre dédié aux contributions de Jim Brady à la communauté métisse et au patrimoine de la Saskatchewan se dresse devant le centre d’amitié Kikinahk à La Ronge. Financé par le Fonds de développement culturel des Métis de SaskCulture, il a été dévoilé lors des Journées Jim Brady, le 10 juillet 2011.