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Corridor Québec-Windsor

Le corridor Québec-Windsor est une région géographique, historique et culturelle unique au Canada. S’étendant du fleuve Saint-Laurent au bassin des Grands Lacs, depuis la ville de Québec, au Québec, à l’est, jusqu’à Windsor, en Ontario, à l’ouest, c’est la région la plus populeuse et la plus industrialisée du Canada. Elle compte environ la moitié de la population canadienne et trois des plus grandes régions métropolitaines du pays. Le corridor, qui possède les caractéristiques d’une conurbation, un réseau continu de collectivités urbaines, est également considéré comme faisant partie de la mégalopole des Grands Lacs. La région comprend les deux plus grandes villes du Canada (Toronto et Montréal), la capitale nationale (Ottawa) et les capitales des deux provinces les plus peuplées et les plus prospères sur le plan économique (le Québec et l’Ontario). C’est également là que se trouvent certains des premiers établissements connus du Canada (autochtones et non autochtones), ainsi que des établissements permanents parmi les plus anciens du pays. Le géographe Maurice Yeates a qualifié le corridor Québec-Windsor de « rue principale » du Canada. La région est considérée comme l’équivalent canadien de la mégalopole du corridor nord-est des États-Unis.

Le centre-ville de Montréal vu de l’autre côté de l’eau.

Limites

Comme son nom l’indique, le corridor Québec-Windsor s’étend de la région métropolitaine de la ville de Québec, à l’est, à la ville de Windsor, en Ontario, à l’ouest. La ville de Detroit, au Michigan, et la ville de Windsor se font face de part et d’autre de la rivière Détroit. Bien qu’elles fassent partie de la même région métropolitaine, elles sont séparées par la frontière internationale, qui divise le corridor Québec-Windsor des États-Unis et de la région de la mégalopole des Grands Lacs. En 1975, le géographe Maurice Yeates définit la région. Selon sa description, elle couvre environ 175 000 km², soit à peu près la même superficie que l’Angleterre et le pays de Galles réunis, ou un tiers de la France. Sa forme est grossièrement rectangulaire, avec une largeur variant entre 160 et 240 km et une longueur allant de 1 050 à 1 210 km. La baie Georgienne, le lac Huron, le lac Sainte‑Claire (et la rivière Sainte-Claire) constituent les limites occidentales. Le lac Érié, le lac Ontario, le fleuve Saint-Laurent (dans la région des Mille-Îles, où il sépare l’Ontario de l’état de New York) et la frontière canado-américaine dans le sud du Québec forment les limites méridionales. Le géographe note en 1975 que les frontières nord et est sont plus difficiles à délimiter. Il ajoute toutefois qu’on peut les définir grossièrement (d’ouest en est) par la baie Georgienne, le parc provincial Algonquin, les hautes terres Laurentiennes et la région métropolitaine de la ville de Québec. Au Québec, le corridor suit à peu près l’étendue de la région physiographique des basses terres du Saint-Laurent. Cette région s’étend juste à l’est de la capitale provinciale et suit une courte ligne droite allant du fleuve Saint-Laurent jusqu’à la frontière américaine.

Carte de la région qui délimite le corridor Québec-Windsor.

Historique

Bien que le concept de mégapole ou de conurbation soit relativement récent, le corridor Québec-Windsor est habité par des humains depuis des millénaires. Cela s’explique par la grande qualité du sol, l’abondance et la diversité de la vie végétale et animale, le climat tempéré, la profusion des sources d’eau douce et des voies navigables. Il est également le site de certaines des premières colonies européennes au Canada. Plusieurs d’entre elles se trouvent à proximité d’établissements autochtones anciens, perpétuant ainsi un modèle d’établissement humain qui remonte à des milliers d’années. Par exemple, en 1642, des colons français fondent la ville de Montréal, qu’ils appellent initialement « Ville-Marie ». Cependant, lors de son deuxième voyage, en octobre 1535, Jacques Cartier mentionne un village amérindien nommé Hochelaga. Pendant son voyage, il se rend dans le village iroquoien de Stadaconé, situé près du site actuel de la ville de Québec, fondée par Samuel de Champlain en 1608. Ce sont les Iroquoiens du Saint-Laurent qui établissent ces deux collectivités. Ils auraient vécu dans la vallée du fleuve Saint-Laurent entre les années 1200 et 1600. D’autres groupes autochtones auraient également habité dans cette région, qu’on appelle aujourd’hui le corridor Québec-Windsor, notamment les Wendats (Hurons), les Haudenosaunee (Iroquois), les Innus (Montagnais-Naskapis) et les Anichinabés (y compris les Algonquins, les Odawas, qui ont donné leur nom à la ville d’Ottawa, et les Ojibwés).

Comme les peuples autochtones pendant des milliers d’années, les colons français utilisent le fleuve Saint-Laurent et les Grands Lacs ainsi que leurs affluents comme voies navigables. Ils explorent ainsi le continent et récoltent des marchandises précieuses, comme les peaux de castor. La grande qualité du sol, le climat tempéré, les sources d’eau douce et le bois, autant de ressources qui soutiennent les collectivités autochtones pendant des millénaires, aident les colons européens à peupler le territoire qui allait devenir le Canada.

De nombreux événements clés de l’histoire du Canada avant la Confédération se déroulent en partie ou en totalité dans le corridor Québec-Windsor. Parmi eux figurent la création de Nouvelle-France, les guerres iroquoises, la Grande Paix de Montréal, la Conquête par la Grande-Bretagne, l’invasion américaine, l’arrivée des loyalistes, la guerre de 1812, les rébellions de 1837-1838, la construction du canal Rideau et du canal de Lachine, les émeutes de Montréal de 1849, ainsi que la construction du Grand Trunk Railway. Diverses collectivités du corridor Québec-Windsor offrent un refuge aux esclaves afro-américains en quête de liberté, lorsqu’ils arrivent au Canada via le chemin de fer clandestin.

Centres de population

Selon le recensement de 2021, 12 des 18 plus grandes collectivités du Canada (chacune comptant plus de 400 000 habitants) se trouvent dans le corridor Québec-Windsor.

Les autres grands centres de population du corridor Québec-Windsor, dont la population de la région métropolitaine de recensement dépasse 100 000 habitants, sont Sherbrooke (Québec), Barrie (Ontario), Kingston (Ontario), Guelph (Ontario), Trois-Rivières (Québec), Brantford (Ontario), Peterborough (Ontario), Belleville- Quinte West (Ontario), Chatham-Kent (Ontario) et Drummondville (Québec).

Ville

Province

Population de la région métropolitaine de recensement (2021)

Toronto

Ontario

6 202 225

Montréal

Québec

4 291 732

Ottawa-Gatineau

Ontario et Québec

1 488 307

Québec

Québec

839 311

Hamilton

Ontario

785 184

Brampton

Ontario

656 480

Kitchener-Cambridge-Waterloo

Ontario

575 847

London

Ontario

543 551

Laval

Québec

438 366

St. Catharines-Niagara

Ontario

433 604

Windsor

Ontario

422 630

Oshawa

Ontario

415 311


Vieux-Québec

Géographie et climat

Le corridor Québec-Windsor Corridor abrite l’écozone des plaines à forêts mixtes (voir Régions naturelles). La population relativement dense de cette région influence en partie cette écozone, la plus petite du Canada. Les hivers se situent autour de -5 °C et les étés atteignent 17 °C en moyenne. Cette région, aux conditions météorologiques très changeantes, se trouve dans l’une des principales trajectoires de tempête de l’Amérique du Nord. Elle se compose principalement de vastes plaines aux collines en pente douce et abrite le sol agricole le plus fertile du Canada. On y trouve également de vastes étendues d’eau et leurs affluents, qui contribuent à l’irrigation des plaines et influencent les régimes climatiques et météorologiques. Les forêts anciennes ont autrefois dominé la région (voir Forêts anciennes au Canada), mais l’agriculture et l’urbanisation ont considérablement réduit leur superficie. Les forêts actuelles se caractérisent par un mélange homogène de conifères et d’arbres à feuilles caduques. Les grands mammifères présents dans la région comprennent l’ours noir, l’orignal, le cerf de Virginie, le lynx roux et le loup. On aperçoit souvent des bélugas nager dans le fleuve Saint-Laurent, et, dans un cas particulier, même jusqu’à Montréal. On trouve également dans cette région des coyotes, des ratons laveurs, des loutres de rivière, différentes espèces d’écureuils, des tamias, des mouffettes, des castors, des marmottes, des opossums, des renards, des lapins et des lièvres. La forte densité de la population, l’industrialisation et la disparition progressive des terres agricoles au profit de l’immobilier entraînent une pollution et une dégradation environnementale importantes dans la région.

Loup dans l’herbe verte

Transport

Le corridor Québec-Windsor a longtemps été un point central pour le transport et les communications est-ouest. Il remonte à l’époque où le fleuve Saint-Laurent, la rivière des Outaouais, les Grands Lacs et leurs nombreux affluents constituent un réseau de voies navigables pour le commerce, la communication, le transport et même la guerre, tout au long de la période coloniale. Les rapides, comme ceux de Montréal, empêchent les grands navires océaniques à voile et à vapeur de remonter plus loin dans les Grands Lacs jusqu’à la construction de canaux et d’écluses au 19e siècle. En 1959, on inaugure la voie maritime du Saint-Laurent, fruit d’une collaboration entre les États-Unis et le Canada. Elle permet aux grands navires modernes, tels que les vraquiers, de contourner les rapides et l’important dénivelé entre le golfe du Saint-Laurent et le lac Supérieur.

À partir du milieu du 19e siècle, on développe des chemins de fer dans la région afin de relier les grands centres démographiques et les ports aux villes et villages des régions agricoles périphériques. La combinaison des chemins de fer et des canaux, qui relient les principales voies navigables, les centres de population et les régions agricoles rurales, explique en grande partie pourquoi le corridor Québec-Windsor devient la région la plus populeuse du Canada. Les produits agricoles et les ressources primaires, comme le bois, sont facilement acheminés vers les grands établissements, puis exportés ou redistribués à l’intérieur du pays. De plus, des vagues d’immigrants peuvent arriver par les grands ports et trouver un emploi dans les secteurs de la fabrication, de la transformation ou de l’entreposage en ville, ou encore se rendre dans les zones rurales pour démarrer leur propre ferme ou entreprise.

Cette histoire du transport et de la communication se poursuit aujourd’hui dans le corridor Québec-Windsor. On y trouve certains des couloirs aériens les plus fréquentés du Canada, ses autoroutes les plus achalandées (l’autoroute 401 en Ontario et l’autoroute 40 au Québec, toutes deux faisant partie de la Transcanadienne) et son corridor ferroviaire de voyageurs le plus emprunté (voir Autoroutes emblématiques au Canada). VIA Rail donne à ce tronçon de son réseau le nom de « Le Corridor », en référence au corridor Québec-Windsor.

On emploie souvent l’expression « corridor Québec-Windsor » dans le contexte d’un projet de train à grande vitesse, envisagé depuis longtemps, pour desservir la région. On met de l’avant la densité de population élevée et le grand nombre de personnes qui se déplacent entre ses grands centres démographiques pour justifier un tel projet.

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