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La cagoule Hypo

La cagoule hypo est un des premiers masques à gaz. Elle a été mise au point par le capitaine médecin terre-neuvien Cluny Macpherson durant la Première Guerre mondiale. Cluny Macpherson a commencé à travailler à la cagoule hypo après la première attaque au gaz dichlore lancée par les Allemands, pendant la deuxième bataille d’Ypres, en avril 1915. L’armée britannique a commencé à distribuer des cagoules Hypo aux soldats canadiens et britanniques en mai 1915. Peu après, sa conception a été modifiée pour produire les cagoules P, PH et PHG. À la fin de la guerre, 2,5 millions de cagoules Hypo avaient été distribuées. Le masque à gaz a été une des plus importantes innovations de la Première Guerre mondiale.

Cagoule Hypo

Contexte

Le 22 avril 1915, pendant la deuxième bataille d’Ypres, l’armée allemande lance la première attaque au gaz dichlore de la guerre, dispersant à peu près 160 tonnes de gaz dans l’atmosphère. Le nuage de gaz jaune-vert (d’à peu près 10 km de largeur par 1 km de profondeur) se répand sur les lignes algériennes (françaises) et canadiennes et s’installe dans les tranchées. Lorsqu’il se combine à l’humidité des yeux, du nez et des poumons, il se transforme en acide, produisant des brûlures et des cloques. Les hommes sont aveuglés et les tissus de leurs poumons sont détruits. Beaucoup meurent, et ceux qui survivent souffriront de problèmes pulmonaires tout au long de leur vie.

Une deuxième attaque au gaz est lancée deux jours plus tard. Les troupes canadiennes reçoivent rapidement l’ordre de placer des linges imbibés d’eau ou d’urine sur leur visage. Ainsi, le dichlore se cristallise sur le tissu avant d’atteindre les poumons. Comme les attaques au gaz se poursuivent, l’armée britannique cherche des moyens de protéger ses soldats. Le 3 mai 1915, l’armée distribue 30 000 serviettes de coton, enrobées de gaze, saturées de bicarbonate de soude, qui doivent être tenues sur le nez et la bouche. Des lunettes sont utilisées pour protéger les yeux. L’étape suivante est le respirateur « Black Veil », qui est équipé d’un cordon pour le tenir en place.

La conception de Cluny Macpherson

Le respirateur Black Veil est rapidement remplacé par la cagoule Hypo. Celle-ci est conçue par le capitaine Cluny Macpherson, officier médical du Royal Newfoundland Regiment, qui a commencé à y travailler peu après la première attaque au gaz, le 22 avril 1915. Son prototype est basé sur un casque allemand pris à l’ennemi, qui est recouvert d’une cagoule de coton. La cagoule est un sac de flanelle imbibé d’une solution chimique, avec une visière de mica. Elle est connue sous le nom de « cagoule Hypo » parce que la solution chimique comprend de l’hyposulfite, en plus du bicarbonate de soude et de la glycérine. La cagoule se porte sur la tête et est repliée sous le cou. Ainsi, elle est maintenue en place plus facilement que le respirateur Black Veil.

L’armée britannique commence à distribuer la cagoule Hypo en mai. Le 6 juin 1915, les troupes britanniques et canadiennes en France ont reçu les nouveaux masques à gaz. Ils sont aussi distribués aux soldats australiens et néo-zélandais à la fin de 1915 à Gallipoli, où l’on s’attend à ce que les Turcs lancent une attaque de gaz (qui ne se produira jamais).

La cagoule Hypo comporte toutefois quelques inconvénients. La visière de mica est fragile, et sera rapidement remplacée par une version en celluloïd ou en acétate de cellulose. Elle s’embue facilement, ce qui rend la vision difficile, et le traitement chimique est irritant pour la peau et pour les yeux. La cagoule est difficile à ajuster et rend la visée d’une arme difficile. La cagoule Hypo provoque des maux de tête, probablement en raison de l’accumulation de gaz carbonique, puisqu’elle ne comporte aucune valve pour inhaler ou exhaler.

Cagoule P
Cagoule PH

Développements ultérieurs

La cagoule doit être modifiée car de nouveaux agents chimiques sont mis au point et utilisés dans les combats, particulièrement le phosgène. À la mi-novembre 1915, la cagoule Phénate (ou « P ») est distribuée aux soldats canadiens et britanniques. Cette version est imbibée de phénate de sodium et offre une protection aux nouveaux gaz. Elle comporte aussi des lunettes de protection en verre et une valve en forme de tube. Toutefois, il apparaît bientôt que la cagoule P n’offre pas une protection suffisante face à de fortes concentrations de phosgène. Les cagoules sont alors traitées avec une solution d’hexamine de phénate et distribuées sous le nom de cagoules PH à partir de janvier 1916. Le corps canadien reçoit ses premières cagoules PH au début de février. En juillet 1916, la cagoule PH est la plus commune parmi les troupes britanniques et canadiennes en France. Une autre version, la cagoule PHG (hexamine de phénate-lunettes de protection) est mise au point pour les artilleurs afin de les protéger du gaz lacrymogène en plus du chlore et du phosgène. Les cagoules P, PH et PHG sont toutes basées sur la conception de Cluny Macpherson.

En 1916, un nouveau modèle est mis au point, où l’air traverse une boîte de filtrage chimique pour éliminer le gaz. Le petit appareil respiratoire (Small Box Respirator, SBR) est distribué aux troupes britanniques en août 1916 et au corps canadien à la fin de novembre 1916. Dans cette version, l’air traverse une boîte de filtrage et est décontaminé avant de se rendre dans la cagoule par un tube de caoutchouc. À partir de 1917, les soldats reçoivent un SBR et une cagoule PH en réserve.

Mitrailleurs portant des cagoules PH

Importance

Dans une lettre datée du 15 mai 1915, Cluny Macpherson écrit : « J’ai été assez chanceux de mettre au point la cagoule qui s’est montrée la plus efficace pour protéger contre les gaz sans immobiliser les hommes. » Bien que rudimentaire et encombrante, la cagoule Hypo offrait aux soldats une certaine protection contre le chlore gazeux. Avec quelques modifications, la conception de Cluny Macpherson a donné les cagoules P, PH et PHG, beaucoup plus efficaces contre le chlore et d’autres gaz mortels comme le phosgène. À peu près 2,5 millions de cagoules Hypo ont été distribuées à des soldats, sur les 55 millions de masques à gaz britanniques produits pendant la Première Guerre mondiale. Après son retour à Terre-Neuve, Cluny Macpherson a continué à concevoir des respirateurs afin de protéger les mineurs des maladies pulmonaires.