Le Canada est un État fédéral. Ceci signifie que les pouvoirs et les devoirs du gouvernement sont répartis entre deux niveaux. Il y a un gouvernement national (central, ou fédéral) et plusieurs plus petits gouvernements régionaux (provinciaux). Les champs de compétences de chaque niveau ont été définis pour la première fois à la Conférence de Québec en 1864. (Voir Résolutions de Québec.) Ils sont inscrits dans la Loi constitutionnelle de 1867. Ils ont été la source de débats et de tensions entre les provinces et le gouvernement fédéral depuis la Confédération. (Voir Relations fédérales-provinciales.) Malgré cela, cette partie de la Constitution est demeurée en grande partie inchangée depuis lors.
Contexte historique
Les Pères de la Confédération attribuent d’abord les pouvoirs du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux lors de leurs pourparlers à la Conférence de Québec, en 1864. (Voir Résolutions de Québec.) Ces pouvoirs sont ensuite affinés et formellement énoncés dans l’Acte de l’Amérique du Nord britannique (maintenant appelé la Loi constitutionnelle de 1867) en 1867. Ils sont interprétés, ou jugés, par le comité judiciaire du Conseil privé jusqu’en 1949. Par la suite, ils sont jugés par la Cour suprême du Canada.
La répartition du pouvoir exécutif (le premier ministre du Canada, les premiers ministres provinciaux et leurs Cabinets) est semblable à la répartition du pouvoir législatif. La répartition des pouvoirs parmi les tribunaux canadiens est également divisée dans une certaine mesure. Mais la plupart relèvent du gouvernement fédéral.
Comment se divise le pouvoir
L’article 91 de la Loi constitutionnelle de 1867 confère de vastes pouvoirs au gouvernement fédéral. Son but législatif est d’assurer « la paix, l’ordre et le bon gouvernement du Canada en ce qui a trait à toutes les questions qui ne relèvent pas des catégories de sujets de la présente loi exclusivement attribuée aux législatures des provinces ». Un principe clé des Pères de la Confédération était que le Parlement aurait le pouvoir sur les questions d’intérêt national. Les questions d’intérêt régional seraient confiées aux provinces.
Le Québec est régi par un Code civil. Alors les provinces obtiennent la compétence sur la propriété et les droits civils. Le Québec est exclu de l’article 94. Ceci permet l’éventuelle normalisation du droit privé pour les autres provinces.
Pouvoirs fédéraux
Le Parlement reçoit également une plus grande compétence résiduelle. Ceci veut dire que tous les pouvoirs (et les nouveaux pouvoirs à venir) qui ne sont pas accordés aux provinces iront au gouvernement fédéral. La seule exigence est qu’ils soient de nature générale et non locale. Au fil du temps, les tribunaux définissent le pouvoir résiduel fédéral comme incluant : l’incorporation des entreprises ayant des objectifs fédéraux, l’aéronautique, la radio, la télévision, l’ énergie nucléaire, la capitale nationale, les droits miniers extracôtiers, les langues officielles dans la sphère fédérale, la citoyenneté, les affaires étrangères, le contrôle des médicaments, et les pouvoirs d’urgence en temps de paix et de guerre (Voir aussi Loi sur les mesures de guerre; Loi sur les mesures d’urgence.)
Les autres domaines de compétence fédérale incluent : les échanges et le commerce, la fiscalité directe et indirecte, la monnaie, le service postal, le recensement et les statistiques, la défense nationale, la fonction publique fédérale, la navigation, les pêches, les activités bancaires, les droits d’auteur, les peuples autochtones et les réserves, la citoyenneté, le mariage et le divorce, le droit criminel, les prisons, et les travaux interprovinciaux.
Pouvoirs d’amendement
La répartition des pouvoirs peut être modifiée. Par exemple, en 1940, le Parlement acquiert le pouvoir sur l’assurance-chômage grâce à un amendement (une modification) constitutionnel. En 1949, également par amendement, le Parlement obtient le pouvoir de modifier la Constitution. Les seules exceptions concernent les questions affectant les pouvoirs provinciaux. Cependant, en 1949, dans une décision rendue à propos du Sénat, la Cour suprême du Canada restreint l’interprétation de la phrase « Constitution du Canada. » Elle déclare que cette phrase de l’article 91.1 de la Loi constitutionnelle de 1867 renvoie à la Constitution fédérale interne. Elle ne se réfère pas à la Constitution de tout le Canada. Par exemple, le Parlement ne peut pas abolir le Sénat. Il représente les provinces et n’est pas uniquement une question fédérale.
La Loi constitutionnelle de 1982 abroge (annule) l’article 91.1. Par conséquent, l’article 44 de la Loi stipule que, sous réserve de l’approbation provinciale dans certains cas, « le Parlement peut exclusivement adopter des lois modifiant la Constitution du Canada en ce qui concerne le gouvernement exécutif du Canada, ou le Sénat et la Chambre des communes. » En 2014, la Cour suprême du Canada clarifie la question. Elle statue que les modifications apportées à la composition du Sénat et à la nomination des sénateurs doivent respecter la règle de 7/50. Ceci nécessite le consentement du gouvernement fédéral et de sept provinces comptant au moins 50 % de la population du Canada. Le tribunal statue également qu’abolir le Sénat nécessite le consentement du gouvernement fédéral et des dix provinces.
Les provinces ont le droit de modifier leur constitution interne (à l’exception de ce qui concerne le cabinet du lieutenant-gouverneur) depuis 1867.
Pouvoirs provinciaux
Entre autres choses, les provinces ont compétence sur : leurs constitutions internes, l’imposition directe dans la province, les municipalités, les commissions scolaires, les hôpitaux, la propriété et les droits civils (leur plus grand domaine de compétence). Elles supervisent également : le droit civil et pénal, les amendes pour infractions aux lois provinciales, les prisons, la célébration du mariage, la fonction publique provinciale, les travaux locaux, et les sociétés ayant des objectifs provinciaux.
Les interprétations des tribunaux du pouvoir fédéral sur le commerce ont tendance à être restrictives. Leurs interprétations du pouvoir provincial sur la propriété et les droits civils ont tendance à être plus libérales.
Croisement de pouvoirs
Quatre champs de compétence sont partagés entre les provinces et le gouvernement fédéral : l’agriculture, l’immigration, les pensions de vieillesse, et les prestations supplémentaires. En cas de dispute, la loi fédérale l’emporte pour les domaines visés par l’article 95 (agriculture et immigration). La loi provinciale l’emporte pour les domaines visés par l’article 94A (pensions de vieillesse). L’éducation est attribuée aux provinces. Mais elle est soumise à certaines garanties religieuses.
Chaque niveau de gouvernement doit demeurer dans sa propre sphère. Toutefois, il est arrivé souvent que l’un ou l’autre ait assumé des pouvoirs qui ne lui appartenaient pas clairement. Par exemple, les provinces ont changé certaines taxes indirectes, comme les taxes de ventes et d’achat, en taxes directes.
Le pouvoir de dépenser de l’argent demeure un domaine flou et contesté. Le Parlement suppose qu’il peut dépenser là où il n’a pas nécessairement le pouvoir d’adopter des lois. Ce genre de dépenses est généralement bien reçu par les provinces lorsqu’elles s’appliquent aux paiements de péréquation. Mais elles sont mal vues lorsqu’elles empiètent sur les domaines provinciaux comme la santé, la sécurité sociale et l’éducation.
Péréquation et ressources naturelles
En vertu de la Loi constitutionnelle de 1982, la péréquation est inscrite à l’article 36. Elle garantit que tous les Canadiens ont accès à des services publics semblables, à des niveaux d’imposition semblables. Cependant, la manière de mettre ceci en pratique n’est pas claire.
En 1982, le pouvoir des provinces sur les ressources naturelles est élargi pour inclure un pouvoir partagé en matière de commerce et de mise en marché interprovinciaux. Les provinces obtiennent également le pouvoir de taxation indirecte de leurs ressources naturelles. (Voir Finances intergouvernementales.)
Tension fédérale-provinciale
L’histoire du fédéralisme canadien est essentiellement une liste de disputes au sujet de la répartition des pouvoirs. Des années 1880 jusqu’aux années 1930, les pouvoirs fédéraux sont réduits. Ceci est principalement dû au fait que le comité judiciaire du Conseil privé ignore les désirs centralisateurs de plusieurs (mais pas tous) des auteurs de la Constitution. Il favorise plutôt l’autonomie provinciale. La Cour suprême du Canada, quant à elle, renforce généralement les pouvoirs du gouvernement fédéral.
Il y a eu diverses conférences constitutionnelles entre les provinces et le gouvernement fédéral. Malgré ceci, peu de changements ont été apportés à la répartition des pouvoirs. L’Accord du lac Meech aurait élargi le pouvoir provincial dans les nominations à la Cour suprême du Canada et au Sénat. Il aurait également légèrement renforcé le pouvoir provincial dans le domaine partagé de l’immigration. Cependant, dans l’ensemble, cela n’aurait pas apporté de changements majeurs dans la répartition des pouvoirs prévue dans la Constitution.