Charlie Watt, dirigeant inuit (né le 29 juin 1944 à Fort Chimo [aujourd’hui Kuujjuaq], au Québec). Il fonde la Société des Inuits du Nord québécois en 1972 et est négociateur pour la Convention de la baie James et du Nord québécois, signée en 1975. Il est sénateur de 1984 à 2018. Depuis janvier 2018, il est président de la Société Makivik, au Nunavik, sa terre natale du nord du Québec.
Jeunesse et formation
Charlie Watt est issu d’une famille inuite de Fort Chimo (aujourd’hui Kuujjuaq), au Québec. Sa mère, Daisy Watt (1921-2002), guérisseuse et interprète, devient à son époque une aînée inuite très respectée. Sa sœur, Sheila Watt-Cloutier, est une dirigeante politique, auteure et militante pour l’environnement et les droits ancestraux.
Tout au long de sa vie, Charlie Watt suit des cours dans différents établissements du Canada : dans les Territoires du Nord-Ouest (à Yellowknife), en Ontario (à Kingston et à Ottawa), au Québec (à Montréal et à Kuujjuaq), en Nouvelle-Écosse (à Halifax) et au Manitoba (à Brandon).
Carrière politique
De 1969 à 1972, Charlie Watt est agent des Affaires du Nord pour le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (aujourd’hui les ministères fédéraux des Affaires autochtones et du Nord). En 1972, il fonde la Société des Inuits du Nord québécois (SINQ), un organisme qui a pour objectif de protéger les intérêts politiques et économiques des Inuits dans le nord du Québec.
Opposé au Projet de la baie James – qui, selon les Inuits et les Cris, menace leurs territoires et leurs modes de vie –, Charlie Watt fait partie des négociateurs pour l’établissement de l’entente finale qui sera signée en 1975. Considéré comme étant le premier des traités modernes, la Convention de la baie James et du Nord québécois (CBJNQ) prévoit l’octroi d’une indemnité de 90 millions de dollars. Charlie Watt restera président de la SINQ jusqu’en 1978. Cette année-là, il devient président fondateur de la Société Makivik (1978–1982), organisme qui succède à la SINQ et qui a pour vocation de mettre en œuvre les ententes portant sur les revendications territoriales et de contribuer au développement politique et économique de la région du Nunavik. Il sera trésorier de cet organisme de 1987 à 1988 et à nouveau président de 1988 à 1994.
Charlie Watt met également sur pied, en 1973, la Labrador Inuit Association (LIA). En 1977, l’organisme présentera au gouvernement fédéral une revendication territoriale visant à obtenir des droits sur certains territoires situés au Labrador. Une entente accordant aux Inuits du Labrador 72 520 km2 de terres et une surface de 48 690 km2 sur le domaine maritime est signée le 22 janvier 2005. Les Nunatsiavut administrent aujourd’hui de manière autonome ce territoire ancestral des Inuits du Labrador.
Charlie Watt a participé au rapatriement de la Constitution canadienne, en particulier pour ce qui a trait à l’article 35, qui consacre les droits des Autochtones.
Durant toute sa carrière en politique et dans la fonction publique, Charlie Watt a siégé au conseil d’administration de divers organismes autochtones, notamment en tant que coprésident du Comité inuit sur les affaires nationales (1979–1984), membre du Comité du Nunavik (1985–1995) et membre du conseil d’administration de l’Inuit Tapirisat du Canada de 1988 à 1994 (aujourd’hui l’Inuit Tapiriit Kanatami, ou ITK). Il a également siégé au sein de divers groupes parlementaires tels que l’association parlementaire Canada-Mexique et le Groupe parlementaire Canada-Russie.
Charlie Watt a aussi soutenu et protégé activement les droits des Autochtones. En 2002, par exemple, il refuse de soutenir un projet de loi sur le contrôle des armes à feu qui, selon lui, ne tient pas compte des réalités socio-économiques propres aux communautés inuites, qui feraient que certains propriétaires d’armes à feu auraient du mal à respecter de telles exigences d’enregistrement. Il s’est également opposé à certaines lois linguistiques du Québec qui tendent à favoriser l’usage du français aux dépens de l’inuktitut (voir aussi : Politiques linguistiques du Québec).
Sénateur
Le premier ministre Pierre Trudeau nomme Charlie Watt au Sénat en décembre 1983 et celui-ci prête serment le mois suivant. Représentant le Québec et la division sénatoriale d’Inkerman, Charlie Watt assume les fonctions de président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones de février 1977 à octobre 2000. Il est également membre du Comité sénatorial permanent des pêches et océans et du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Il quitte le Sénat en mars 2018.
Secteur privé
En 1990, la Société Makivik fait l’acquisition de First Air sous la présidence de Charlie Watt. (Charlie Watt est président de l’organisation de 1978 à 1982 et de 1988 à 1994.) Makivik se targue d’être aujourd’hui le troisième plus grand transporteur aérien du Canada. De 1988 à 1994, Charlie Watt est également président d’Air Inuit Ltd., la première compagnie aérienne canadienne appartenant à des Autochtones.
Il a aussi été président de diverses sociétés, notamment de Seaku Fisheries (de 1988 à 1994), d’Uttuulik Leasing (de 1988 à 1994) et de Kigaq Travel (de 1988 à 1994). Il est élu président de la Société Makivik pour une troisième fois en janvier 2018.
Travail communautaire
En 2012, Charlie Watt met sur pieds la Fondation Charlie Watt – aujourd’hui appelée la Fondation Tukia – qui a pour vocation d’offrir une aide sanitaire et économique aux communautés inuites du Canada. En faveur de l’autodétermination, cette fondation œuvre au sein des collectivités inuites pour promouvoir et protéger la langue et la culture des Inuits et pour offrir des solutions dans les domaines du logement, du développement et de l’éducation.
Vie personnelle
Charlie Watt est marié à Ida (Epoo) et est père de cinq enfants : Donald, Robert, Lisa, Billy et Charlene. Il vit à Kuujjuaq, au Nunavik, la terre des Inuits du Québec. Lorsqu’il ne travaille pas, Charlie Watt aime passer du temps à la chasse, à la pêche ou à élever des attelages de chiens.
Prix et autres distinctions honorifiques
En 1994, Charlie Watt est nommé officier de l’Ordre national du Québec. Trois ans plus tard, il reçoit le prix national d’excellence décerné aux Autochtones (aujourd’hui appelé le prix Indspire) pour son rôle dans l’amélioration de la vie des habitants du Nunavik. Il a également reçu la Médaille du jubilé de diamant et la Médaille du jubilé d’or de la reine, respectivement en 2002 et en 2012.