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Réconciliation au Canada

Au Canada, le processus de réconciliation est lié à la relation que le gouvernement fédéral a avec les peuples autochtones. Le terme en est venu à décrire les tentatives faites par des individus et des institutions pour sensibiliser la population à la colonisation et ses impacts continus sur les peuples autochtones. La réconciliation fait également référence aux efforts déployés pour reconnaître les préjudices causés par diverses politiques et divers programmes de colonisation, comme les pensionnats indiens. Pour certains, le mot représente l’opportunité de réfléchir au passé, de guérir et corriger les choses. Pour d’autres cependant, les gestes actuels de réconciliation semblent être simplement performatifs et ils manquent d’action significative pour adresser le mal fait par la colonisation.

Réconciliation au Canada

Définition

En 2015, la Commission de vérité et réconciliation (CVR), créée en 2008 pour documenter les effets des pensionnats indiens sur les peuples autochtones, définit la réconciliation comme étant un processus qui consiste à « établir et maintenir une relation mutuellement respectueuse entre les peuples autochtones et non autochtones de ce pays. » La CVR déclare aussi que pour qu’une réconciliation se concrétise au Canada, « il faut prendre conscience du passé, reconnaître les dommages qui ont été infligés, expier les causes, et prendre des mesures pour changer les comportements. »

Contexte historique

Le discours officiel sur l’idée d’une réconciliation au Canada commence en 1998, lorsque le gouvernement fédéral répond au rapport de 1997 de la Commission royale sur les peuples autochtones, qui comprend un chapitre sur les pensionnats indiens. La réponse est intitulée Rassembler nos forces : le plan d’action du Canada pour les questions autochtones, et elle comprend une déclaration de réconciliation. Dans cette réponse, le gouvernement canadien reconnaît que ses propres politiques visaient à assimiler les peuples autochtones, et il reconnaît également le rôle qu’il a joué dans le développement et l’administration des pensionnats indiens. Lors du dévoilement de ce rapport, la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Jane Stewart, souligne l’engagement du gouvernement fédéral de 350 millions de dollars pour une guérison communautaire « en tant que première étape pour faire face à l’héritage de la violence physique et sexuelle qui a sévi dans les pensionnats indiens. » Les excuses officielles du Canada concernant les pensionnats indiens ont été présentées 11 ans plus tard, en 2008, sous la direction du premier ministre Stephen Harper.

En 2005, le gouvernement fédéral annonce le programme d’indemnisation de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens. Entre autres questions, le programme prévoit 60 millions de dollars pour que la Commission de vérité et réconciliation puisse documenter les expériences des survivants des pensionnats indiens. Les appels à l’action de la CVR, lancés en 2015, deviennent une priorité pour les organismes, les entreprises et les ministères du Canada, qui cherchent à améliorer les expériences des peuples autochtones en matière de protection de l’enfance, d’éducation, de la langue et de la culture, de la santé, et de la justice.

Chez les peuples autochtones, le terme « réconciliation » est largement utilisé après le rapport de la CVR avec l’espoir que les gouvernements régleront les multiples incidents et formes d’abus commis dans les pensionnats indiens. Cette perspective et l’optimisme impliqué ont été atténués par des critiques et des questionnements sur les efforts de réconciliation qui ont été faits (ou non), et sur ce que la réconciliation signifie réellement dans ce contexte.

Efforts de réconciliation

Les établissements d’enseignement, plus particulièrement les écoles primaires et secondaires, ont apporté certains des changements les plus importants suite aux appels à l’action de la CVR, y compris d’importants remaniements des programmes pour y inclure l’histoire des pensionnats indiens. D’autres établissements, comme les agences de protection de l’enfance et les systèmes de soins de santé et de justice, ont été plus lents à adopter des changements significatifs pour améliorer leurs relations avec les peuples autochtones et la manière dont ils les traitent. Par exemple, les peuples autochtones sont encore surreprésentés dans le système de justice, les taux de bébés et d’enfants appréhendés dépassent encore de loin ceux des non Autochtones (voir aussi Rafle des années soixante), et un déséquilibre frappant au niveau des soins de santé offerts aux peuples autochtones signifie qu’ils sont encore loin derrière la plupart des Canadiens en matière de santé générale, incluant les décès prématurés. De nombreuses réserves continuent également d’avoir un accès limité, ou inexistant, à un approvisionnement en eau potable (voir aussi Ségrégation raciale des Autochtones au Canada).

En 2018, le premier ministre Justin Trudeau annonce son intention de créer une Journée nationale de la vérité et de la réconciliation. Cependant, le projet de loi de février 2019 qui vise à créer cette fête n’est jamais adopté. En juin 2021, le projet de loi C-5, instituant la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, reçoit la sanction royale. La première Journée nationale de la vérité et de la réconciliation est célébrée le 30 septembre 2021. Le 30 septembre est aussi la Journée annuelle du chandail orange. Tout comme pour la relation que ce jour férié visait initialement à réparer, certains peuples autochtones du Canada notent que le concept de réconciliation n’est pas clair. Ils notent que le gouvernement canadien continue de poursuivre les peuples autochtones en justice pour leurs revendications à leurs droits et leurs titres. Dans un même temps, les peuples autochtones ont remporté plus de 250 affaires judiciaires canadiennes concernant leurs terres. (Voir aussi Territoire autochtone.)

En 2019, la Colombie-Britannique devient la première juridiction au Canada à mettre en œuvre la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA). Le premier ministre de la province, John Horgan, qualifie la déclaration de guide pour « assurer que cette réconciliation soit durable. » Cependant, depuis que la Colombie-Britannique a adopté DNUDPA, les peuples autochtones affirment que leurs droits ne sont pas respectés. Les dirigeants disent qu’un manque de consultation de la part du gouvernement est en cause, ainsi qu’un manque de reconnaissance de leurs droits sur les enjeux de la santé et de la sécurité, et de manière semblable, sur les projets de ressources sur leurs terres. (Voir aussi L’obligation de consulter.)

Certains peuples autochtones soulignent le fait que leurs communautés n’ont toujours pas accès aux droits fondamentaux humains tels que l’approvisionnement en eau potable, la sécurité et l’éducation, des droits dont bénéficient les autres Canadiens. (Voir aussi Condition sociale des Autochtones au Canada.) Certains soutiennent également que le système actuel représente une forme de répartition de pouvoir inclinée, de sorte que les peuples autochtones et non autochtones n’arrivent pas à table en tant que pairs, mais plutôt en tant que nantis et démunis. De cette manière, les efforts de réconciliation sont perçus comme des performances plutôt que comme étant authentiques.

Espoir de réconciliation

Des organismes comme Réconciliation Canada, et des établissements d’enseignement comme les écoles et les universités ont renforci le dialogue sur les peuples autochtones, historiquement et actuellement. Ils le font sous un thème et un objectif final de réconciliation. Grâce à la CVR, de nombreux Canadiens sont maintenant plus informés au sujet des impacts de la colonisation, des pensionnats indiens, et des attitudes racistes qui les ont institués (voir aussi Loi sur les Indiens). Pour les survivants des pensionnats indiens, les conversations entourant la réconciliation sont primordiales afin de créer une sensibilisation au sujet des préjudices du passé, et des changements nécessaires au Canada. La CVR ouvre la voie à des changements importants dans la façon dont les Canadiens comprennent leur propre histoire, y compris le traitement que le pays a infligé aux peuples autochtones.

Bien que le mot « réconciliation » continue de vouloir dire différentes choses pour différentes personnes, et qu’il demeure controversé parmi les peuples autochtones en raison du manque d’action qui l’accompagne, il existe tout de même des raisons d’être optimiste qui persistent. Les efforts individuels et institutionnels peuvent mener à des dialogues et à des efforts significatifs afin d’améliorer la relation entre les peuples autochtones et le Canada, et afin de continuer à réparer les torts historiques d’une façon qui offre aux peuples autochtones le respect de leurs pleins droits, et d’un traitement approprié.

Lecture supplémentaire

Liens externes