Rosalie Silberman Abella, FRSC, juge à la Cour suprême du Canada de 2004 à 2021, juge à la Cour de la famille de l’Ontario de 1976 à 1992, juge à la Cour d’appel de l’Ontario de 1992 à 2004, avocate (née le 1er juillet 1946 à Stuttgart, en Allemagne). Rosalie Silberman Abella est la première femme juive et la première ancienne réfugiée à être nommée à la Cour suprême du Canada. Elle est également la personne la plus jeune ainsi que la première femme enceinte à devenir juge au Canada. Rosalie Abella a été juge à la Cour suprême de 2004 à 2021. Elle est surtout reconnue pour sa défense de l’équité en matière d’emploi, pour avoir déterminé le contexte juridique qui interdit la discrimination en matière d’emploi et pour avoir élargi la définition des personnes ayant droit aux prestations de survivant dans les couples de même sexe. Elle a reçu 40 diplômes honorifiques et a été intronisée à l’Allée des célébrités du Canada.
Jeunesse et famille
Rosalie Silberman naît dans un camp pour personnes déplacées à Stuttgart, en Allemagne, durant l’année suivant la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Ses deux parents survivent à l’Holocauste. Ils sont originaires de la Pologne, où ils se sont mariés le 3 septembre 1939, au même moment où les nazis commencent à envahir leur pays. Les nazis assassinent le frère aîné de Rosalie, Julius, qui n’a que deux ans. Le père de Rosalie, Jacob, a étudié le droit avant la guerre. Il est nommé chef des services juridiques d’un camp pour personnes déplacées géré par l’armée américaine.
La famille est autorisée à immigrer au Canada en mai 1950. Ils arrivent par un navire de transport des troupes américaines, le USNS General Stuart Heintzelman, qui les transporte de Bremerhaven, en Allemagne, jusqu’au Quai 21 à Halifax. Ils arrivent au Canada en tant que réfugiés, mais Jacob Silberman n’est pas autorisé à pratiquer le droit parce qu’il n’a pas sa citoyenneté. Alors il entre au pays en tant que berger et tailleur de sous-vêtements. Ceci a un impact sur la jeune Rosalie, qui devient déterminée à devenir avocate. Finalement, son père a une carrière réussie dans la vente d’assurances jusqu’à son décès en 1970. Par la suite, la mère de Rosalie, Fanny, a une carrière réussie dans l’immobilier.
Rosalie Abella attribue à son père le mérite de lui avoir inculqué un amour et un respect profonds pour le droit, et de l’avoir encouragée à réaliser ses rêves. Rosalie Abella affirme que son père a commencé à la traiter en égale autour de l’âge de 12 ans, ce qui, selon elle, a stimulé sa confiance intellectuelle. Elle attribue à sa mère le mérite de lui avoir inculqué les vertus du courage et de la charité.
Éducation
À l’âge de 10 ans, la jeune Rosalie Silberman est une virtuose du piano reconnue. Elle remporte de nombreux prix et elle joue souvent à la télévision. Elle reçoit un diplôme en piano classique au Conservatoire royal de musique en 1964, et à l’époque, elle est l’une des plus jeunes de leurs diplômés. Elle continue à jouer du piano tout au long de sa vie, et elle aime les répertoires de George Gershwin, de Irving Berlin et de Cole Porter.
Elle étudie à l’Université de Toronto, et elle obtient un baccalauréat en arts en 1967 et un baccalauréat en droit en 1970. Au cours de sa deuxième année à l’université, elle rencontre un étudiant qui fait son doctorat en histoire, Irving Abella, et ils tombent amoureux. Ils se marient en 1968 et ils ont deux fils, Jacob et Zachary, qui deviennent tous deux des avocats.
Débuts de carrière judiciaire
Rosalie Abella est admise au Barreau de l’Ontario en 1972. Elle exerce le droit criminel et civil pendant quatre ans avant d’être nommée à la Cour de la famille de l’Ontario en 1976. Elle n’a alors que 29 ans, et de plus, elle est enceinte. Elle devient la personne la plus jeune et la première femme enceinte dans l’histoire du Canada à être nommée juge. (Voir aussi Magistrature du Canada.)
En 1983, Rosalie Abella est l’autrice et la présidente de l’Étude ontarienne sur l’accès aux services juridiques par les personnes handicapées. En 1984, elle est l’unique commissaire de la Commission royale sur l’égalité en matière d’emploi du gouvernement fédéral, aussi connue sous le nom de Comission Abella. C’est dans ce rôle qu’elle crée le terme équité en matière d’emploi. Elle élabore également les concepts juridiques d’équité en matière d’emploi et de discrimination, qui sont subséquemment adoptés par la Cour suprême du Canada lors de sa première décision concernant les droits à l’égalité en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés en 1989. Ces concepts sont plus tard adoptés en Afrique du Sud, en Nouvelle-Zélande et en Irlande du Nord.
Durant cette période, Rosalie Abella anime le débat des chefs anglophone lors des élections fédérales de 1988. Elle est également membre de l’enquête du Conseil canadien de la magistrature sur la condamnation injustifiée de Donald Marshall Jr.
Cour d’appel de l’Ontario
Rosalie Abella est nommée à la Cour d’appel de l’Ontario en 1992. En 1998, elle rédige une décision historique qui élargit la définition des personnes ayant droit aux prestations de survivant dans les couples de même sexe. C’est un moment charnière pour les efforts visant à établir l’égalité des droits pour la communauté LGBTQ du Canada.
Cour suprême du Canada
Rosalie Abella est nommée à la Cour suprême du Canada par le premier ministre Paul Martin. Elle est officiellement assermentée à son poste le 30 août 2004. Rosalie Abella prend sa retraite de la magistrature le 1er juillet 2021 après avoir atteint l’âge de retraite obligatoire de 75 ans. « La justice est l’application des lois à la vie », dit-elle lors de son discours d’adieu, « et pas seulement que l’application des lois aux faits. »
À la veille de sa retraite, Sean Fine du Globe and Mail écrit : « Dans son corpus d’environ 200 décisions s’étalant sur 17 ans devant le plus haut tribunal du Canada et couvrant presque tous les principaux domaines du droit, elle s’est battue pour les opprimés et les personnes vulnérables, et elle a contribué à donner le ton moral à la cour. » Sian Elias, ancienne juge en chef de la Nouvelle-Zélande, reconnait l’étendue de son influence en disant : « Le travail de Rosie Abella en matière des droits de la personne et du droit constitutionnel de la Cour suprême est utilisé par les juges de tous les tribunaux supérieurs dans le monde de la common law. »
Activités organisationnelles
Au cours de sa carrière, Rosalie Abella écrit 90 articles et elle est coautrice de quatre livres. Elle s’implique également profondément au sein de divers organismes publics. Elle est présidente de la Commission des relations de travail de l’Ontario, de la Commission de réforme de l’Ontario et du Comité de sélection des bourses Rhodes pour l’Ontario. Elle est également membre de la Commission ontarienne des droits de la personne, du Tribunal académique de discipline de l’Université de Toronto, du Tribunal des relations de travail dans la fonction publique de l’Ontario et du Comité consultatif du premier ministre de l’Ontario sur la Confédération. Elle est juge pour le prix Scotiabank Giller, directrice de l’Institut de recherche en politiques publiques et vice-présidente du conseil des gouverneurs de l’Institut national de la magistrature.
Carrière post-judiciaire
Après avoir pris sa retraite de la Cour suprême, Rosalie Abella est nommée professeure invitée à la faculté de droit de Harvard et maître de recherche universitaire à la faculté de droit de Yale. Elle est également éminente juriste invitée à la faculté de droit de l’Université de Toronto, et elle est nommée William Hughes Mulligan Distinguished Visiting Professor in International Studies à la faculté de droit de l’Université Fordham.
Prix et distinctions
Rosalie Abella est nommée membre de la Société royale du Canada en 1997. Elle est élue à la American Academy of Arts and Sciences en 2007 et à la American Philosophical Society en 2018. Elle reçoit la Knight Commander’s Cross of the Order of Merit décernée par le président de l’Allemagne en 2020. En 2023, elle est intronisée à l’Allée des célébrités du Canada pour ses actions humanitaires. Également en 2023, Rosalie Abella devient la première juge canadienne à être le sujet d’un long métrage documentaire; le film Without Precedent : The Supreme Life of Rosalie Abella est présenté en première au festival du film Hot Docs de Toronto.
Rosalie Abella reçoit 40 diplômes honorifiques. Elle reçoit également le Rose Wolfe Distinguished Alumni Award de l’Université de Toronto, le prix pour Service distingué de l’Association du Barreau de l’Ontario, le prix Touchstone de l’Association du Barreau canadien, le prix Bora Laskin for Distinguished Service in Labour Law (voir aussi Bora Laskin), le Calgary Peace Prize et le International Justice Prize de la Peter Gruber Foundation, parmi de nombreux autres.
Voir aussi Magistrature du Canada; Système judiciaire canadien.