Au Canada, le baseball a des racines plus profondes que ce que la plupart des gens réalisent. Ce sport a déjà été si populaire au Canada qu’on parlait même d’en faire notre sport national. L’histoire remonte assez loin. La première partie a eu lieu à Beachville en Ontario, à environ 40 km à l’est de London, le 4 juin 1838, avec une pelote de fil torsadé recouverte de peau de veau servant de balle, et un bâton sculpté dans du cèdre. Parmi les spectateurs se trouvait un bataillon de volontaires écossais qui étaient en route pour nettoyer les restes de la rébellion du Haut-Canada. Cette partie de baseball s’est déroulée sept ans avant la fondation de la première équipe américaine de baseball, les Knickerbockers Base Ball Clubs de New York.
Premières historiques
Le sport se propage rapidement dans tout le Canada. On joue au « bâton » dans la colonie de la rivière Rouge dans les années 1830. Lors d’un match à Huntington au Québec, dans les années 1830, un certain Hazelton Moore effectue un lancer qui vise intentionnellement la tête du frappeur et déclenche une bagarre avec ce dernier. Les habitants de Saint John au Nouveau-Brunswick, et de Halifax en Nouvelle-Écosse, utilisent les terrains communautaires pour jouer au baseball dans les années 1830 et 1840. Le premier club de baseball de Saint John est formé en 1853, tandis que celui de Halifax est fondé en 1868.
Succès régionaux
Toutefois, le sport prospère surtout dans le sud-ouest de l’Ontario. Les Maple Leafs de Guelph sont les premiers à importer des joueurs professionnels américains, dont Bud Fowler, le premier Noir à jouer au baseball professionnel. Prouvant que la victoire au baseball est toujours « une question de lancer », le lanceur étoile canadien William Smith mène l’équipe de Guelph au championnat mondial de baseball semi-professionnel à Watertown, dans l’État de New York en 1874. L’année suivante, Fred Goldsmith, un des premiers lanceurs de balle courbe du baseball, aide l’équipe des Tecumsehs de London à détrôner l’équipe de Guelph en tant que champions canadiens.
En 1877, en concurrence avec la Ligue nationale qui essaie de monopoliser les meilleurs talents de baseball, divers petits centres américains organisent la International Association. London et Guelph s’y joignent, et les Tecumsehs remportent le premier championnat dans une victoire de fin de saison de 5-2 contre les Alleghenys de Pittsburgh. Ce n’est pas exactement une « série mondiale », mais c’est néanmoins 115 ans avant que les Blue Jays de Toronto remportent leur première victoire.
Le sport continue à prospérer localement. En 1904, le baseball est si populaire au Yukon qu’un championnat international de deux matchs y est disputé, et est remporté par l’équipe de Whitehorse contre celle de Skagway, en Alaska. Les villes minières du Cap-Breton soutiennent une ligue mineure à la fin des années 1930. Au Québec, la Ligue provinciale survit hors du contrôle de la Ligue majeure de baseball de 1935 jusqu’à 1969. C’est dans cette ligue que se produit la première fissure dans l’apartheid du baseball, jetant les bases des célèbres débuts de Jackie Robinson et les Royaux de Montréal, en 1946.
Joueurs et équipes de renom
En plus de l’histoire oubliée du baseball au Canada, plusieurs personnes sont également oubliées. Le premier joueur d’origine canadienne à jouer dans la ligue majeure, William Phillips de Saint John au Nouveau-Brunswick, joue pour Cleveland en 1879. La plupart d’entre nous connaît Ferguson Jenkins, de Chatham en Ontario, qui est le premier Canadien élu au Baseball's Hall of Fame de Cooperstown dans l’État de New York, et Larry Walker de Maple Ridge en Colombie-Britannique, qui est nommé joueur le plus utile de la Ligue nationale en 1997, et est intronisé à Cooperstown en 2020.
Mais les exploits de plusieurs autres Canadiens sont largement inconnus. « Tip » O’Neill, de Springfield en Ontario, établit des records des ligues majeures en 1877 pour les coups sûrs, les doubles, le pourcentage de coups, et le total de buts, ainsi que le record de tous les temps au bâton de 0,492 (bien que ceci inclut des buts sur balles, comme c’était la règle à l’époque; selon les normes actuelles, il aurait atteint 0,435 cette année-là, ce qui est le deuxième record de l’histoire de la LMB derrière le 0,440 de Hugh Duffy en 1894).
La carrière de lanceur de Bob Emslie, de Guelph en Ontario, est marquée par sa saison de 32-17 pour les Orioles de Baltimore en 1884, lorsqu’il enregistre également une moyenne de points mérités de 0,275 en un incroyable 455,1 de manches jouées. Jimmy Claxton, de Wellington en Colombie-Britannique, est non seulement le premier Noir à jouer au baseball organisé au 20e siècle, il est également le premier joueur noir à figurer sur une carte de baseball américain, et le premier joueur des Negro Leagues du Canada à voir ses statistiques être élevées aux chiffres des ligues majeures. George « Mooney » Gibson, de London en Ontario, est membre des Pirates de Pittsburgh, l’équipe gagnante de la Série mondiale de 1909. Phil Marchildon, de Penetanguishene en Ontario, est l’as de l’équipe de lanceurs des Phillies de Philadelphie durant les années 1940. Claude Raymond, de Saint-Jean-sur-Richelieu au Québec, lance presque exclusivement comme releveur dans les ligues majeures pendant 12 ans (en 1959, et de 1961 à 1971), terminant sa carrière avec une moyenne de points mérités de 0,366 en 721 manches jouées. Ron Taylor de Toronto, lance 11 manches en blanchissage pour Cleveland à ses débuts dans la ligue majeure en 1962, débutant une carrière de 11 ans dans la LMB.
Et bien sûr, il ne faut pas négliger les réalisations historiques des personnes plus marginalisées. L’équipe Chatham Colored All-Stars (1932–1939) est la première équipe de baseball organisé entièrement composée de Noirs en Ontario, et la première équipe à remporter le championnat de la Provincial Ontario Baseball Amateur Association. Les membres de l’équipe Asahi de Vancouver remportent plusieurs titres de ligue à Vancouver et sur la côte nord-ouest avant d’être tragiquement internés avec d’autres Canadiens d’origine japonaise durant la Deuxième Guerre mondiale. Il y a également les 68 Canadiennes venant de six provinces qui ont signé un contrat pour jouer dans la All-American Girls Professional Baseball League (AAGPBL) entre 1943 et 1954. Elles ont été intronisées en tant que groupe au Musée et Temple de la renommée du baseball canadien en 1998. Ce groupe comprend entre autres Mary « Bonnie » Baker, qui a servi d’inspiration pour le rôle de Geena Davis dans le film hollywoodien A League of Their Own (1992; v.f. Une ligue de jupons), et Helen (Callaghan) Candaele St. Aubin, une frappeuse si excellente qu’elle est surnommée la « Ted Williams féminine ». Son fils Casey Candaele, est un ancien joueur des Expos de Montréal, et le seul joueur des ligues majeures dont la mère a également été joueuse de baseball professionnel.
Comme l’écrit l’historien du baseball William Humber : « l’histoire du baseball au Canada est celle de la tribu perdue… de l’histoire du baseball américain ». L’histoire du baseball au Canada est non seulement le rappel d’un âge d’or dans le sport, avant que tout cela ne devienne une question d’argent, mais également l’histoire des chemins non empruntés au cours de notre périple en Amérique du Nord.