La moraine d’Oak Ridges est un relief important du sud-ouest de l’Ontario. Elle fait partie des moraines linéaires de la région des Grands Lacs et de la ceinture de verdure de l’Ontario. Située au nord du lac Ontario, cette moraine de 160 km de long doit son nom à ses chênes autrefois abondants. Elle constitue l’un des derniers corridors verts de la région, assurant des fonctions environnementales vitales, notamment en filtrant l’eau potable et en servant d’habitat à plusieurs espèces. En 2001, le gouvernement provincial de l’Ontario désigne la moraine d’Oak Ridges comme une zone protégée pour la préserver de l’expansion urbaine.

Description
La moraine d’Oak Ridges est un relief irrégulier formé d’une crête orientée est-ouest dans le sud-ouest de l’Ontario. Elle est parallèle au lac Ontario, à 60 km de celui-ci. Sa topographie particulière se compose de collines et de kettles. Les collines glaciaires s’étendent en pente douce depuis l’escarpement du Niagara, près de Caledon, jusqu’à la rivière Trent. La moraine varie en largeur de 14,5 km à moins de 0,5 km à Glendley, à l’ouest du lac Rice, et couvre une superficie de 1900 km2.
La moraine est composée de six principaux plateaux cunéiformes : Albion Hills, Mount Wolfe, Kettleby, Uxbridge, Pontypool et Rice Lake. Chaque formation possède ses propres caractéristiques et ses propres motifs sédimentaires. Les plus hautes atteignent environ 430 m. Sa composition sableuse lui permet de filtrer les eaux souterraines, assurant ainsi une source d’eau potable grâce à son vaste aquifère. Elle constitue également une barrière naturelle entre les bassins versants qui se jettent dans le lac Ontario au sud, et ceux qui se déversent dans la baie Georgienne, le lac Simcoe et la rivière Trent au nord.
Histoire naturelle
Les origines de la moraine d’Oak Ridges remontent à la glaciation wisconsinienne, il y a 13 000 ans (voir Histoire géologique du Canada). Pendant cette période, la région est recouverte d’une épaisse couche de glace. Lorsque les nappes de glace fondent et se retirent, une crête complexe de matières sédimentaires se forme sous l’eau. Selon les théories, une fissure distincte s’étendant d’est en ouest aurait fendu la couche de glace à l’extrémité ouest. Cette fissure aurait permis la formation de chenaux de hautes eaux sous la glace, ainsi que le dépôt de limon, de sable et de gravier. Les dépôts glaciaires auraient fini par former le relief élevé de la moraine. Celle-ci sépare aujourd’hui les bassins versants s’écoulant vers le nord (comme la baie Georgienne et le lac Simcoe) de ceux s’écoulant vers le sud (comme le lac Ontario).
Il y a environ 9 000 ans, à mesure que les nappes glaciaires fondent et reculent vers le nord, de petites plantes de toundra commencent à pousser sur la moraine. Au fil du temps, elles sont remplacées par des pins et des épinettes. Finalement, cette moraine devient une forêt mature dominée par les chênes et les érables. Cette forêt offre un refuge aux espèces sauvages et aux peuples autochtones.
Le nom « Oak Ridges » est inspiré par l’écosystème de la prairie haute et de la savane de chênes qui domine autrefois les sections de la moraine, tout comme celui du village d’Oak Ridges, situé à Richmond Hill, en Ontario.
Établissements humains
Au fil du temps, la moraine d’Oak Ridges subit d’importants changements induits par l’homme. Les peuples autochtones sont les premiers habitants à exploiter les ressources naturelles de la région. Dans les années 1300, le site du lac Wilcox est un établissement iroquoien. Par la suite, jusqu’au début des années 1700, les Premières Nations Mississauga migrent dans la région. Ces groupes autochtones brûlent régulièrement les prairies dans le cadre de leurs pratiques de gestion des terres.
L’influence européenne commence à la fin du 18e siècle, avec l’établissement de colonies par des loyalistes et des quakers de l’Empire-Uni. Cependant les sols sablonneux et les terrains vallonnés freinent le développement agricole. Au 19e siècle, l’exploitation de carrières de gravier et de sable ainsi que la déforestation massive au profit de l’agriculture rendent de plus en plus précieuses les ressources naturelles de la moraine. La moraine d’Oak Ridges s’étend sur 32 municipalités et plusieurs comtés. Les principales activités économiques de la région sont l’agriculture, les loisirs et les services urbains destinés aux résidents permanents et saisonniers.

Recherche et protection
C’est vers 1819 que John Bigsby, un médecin de l’armée britannique, découvre et nomme pour la première fois la moraine d’Oak Ridges, alors qu’il effectue des relevés géologiques dans le Haut-Canada. Il la décrit dans son article de 1829 sur la topographie et la géologie du bassin du lac Ontario. Plus tard, en 1863, la Commission géologique du Canada précise les limites des crêtes s’étendant de Peterborough jusqu’à l’escarpement du Niagara. Cependant, ce n’est que cinquante ans plus tard que l’étendue de la moraine est officiellement documentée, grâce aux travaux du géologue Frank Taylor sur les moraines du sud-ouest de l’Ontario.
La désertification menace depuis longtemps le sol sablonneux de la moraine en raison des pratiques agricoles du 19e siècle. La première demande de protection de la moraine remonte à 1908, lorsque le premier chef forestier de l’Ontario, Edmund Zavitz, le recommande dans un rapport. D’importants efforts de reboisement des terres agricoles abandonnées commencent peu après. En 1946, l’Ontario crée des offices de protection de la nature pour aborder cette question et restaurer la moraine. Après la Deuxième Guerre mondiale, plusieurs plans d’urbanisme proposent de préserver la moraine en la réservant à des activités récréatives et de protection de la nature, en dehors de la zone urbanisée. À partir des années 1970, alors que les questions environnementales gagnent en importance sur la scène politique, de nombreux groupes environnementalistes militent pour protéger les espaces verts adjacents à la moraine.
En 1989, des résidents de la région se soucient de la conservation de la moraine et fondent la coalition « Save the Oak Ridges Moraine » (STORM). Celle-ci contribue grandement à la prise de conscience de cette problématique, autant sur le plan régional que provincial. Les initiatives locales aboutissent à la réalisation d’études de planification ainsi qu’à l’établissement d’une stratégie à long terme visant à protéger la moraine. Cependant, la moraine devient un sujet de controverse politique en 1999, lorsque des promoteurs envisagent la construction de grands lotissements à Richmond Hill, afin d’y loger plus de 100 000 personnes. Des groupes environnementalistes lancent alors une campagne médiatique comparant la moraine à la « citerne pluviale de l’Ontario », dans le but de sensibiliser davantage le public. Cette campagne suscite une vague d’opposition. En 2000, la Commission des affaires municipales de l’Ontario reprend le dossier.
Après une série de consultations auprès des intervenants et du public, on dévoile une stratégie pour protéger la moraine d’Oak Ridges. En 2001, le gouvernement provincial adopte la Loi de 2001 sur la conservation de la moraine d’Oak Ridges, qui vise à limiter le développement dans cette région. Moins d’un an plus tard, le Plan de conservation de la moraine d’Oak Ridges (PCMOR) est établi. Ce plan établit des lignes directrices pour l’utilisation des terres et la gestion des ressources afin de préserver l’intégrité écologique et hydrologique de la moraine. En 2020, la Fondation de la moraine d’Oak Ridges, créée en 2002 pour compléter les objectifs de la PCMOR, fusionne avec la Fondation de la ceinture de verdure.
La moraine d’Oak Ridges demeure l’un des derniers corridors verts continus dans le centre-sud de l’Ontario, la région la plus densément peuplée du Canada. Selon la Fiducie foncière de la moraine d’Oak Ridges, cette zone écologiquement diversifiée abrite 1 171 espèces de plantes, 51 espèces de mammifères et 73 espèces de poissons. On y dénombre aussi 88 espèces en péril, tant au niveau provincial qu’au niveau national, ce qui témoigne de sa remarquable biodiversité. Avec l’escarpement du Niagara, la moraine d’Oak Ridges fait partie intégrante de la ceinture de verdure de l’Ontario.
À la fin de 2022, Doug Ford, le premier ministre de l’Ontario, et son gouvernement annoncent leur intention de redésigner des parties du territoire du Plan de conservation de la moraine d’Oak Ridges. Ils souhaitent y construire de nouveaux logements. Cette décision est annulée un an plus tard.